Texte intégral
J'avais prévu de longue date de m'exprimer devant vous, aujourd'hui, à l'occasion de ce colloque organisée par l'association nationale des docteurs en sciences économiques et en gestion, l'ANDESE.
Malheureusement, des obligations de dernière minute liées à mon activité gouvernementale m'ont empêché d'être parmi vous. Je vous prie de bien vouloir m'en excuser. J'ai demandé à M. Pierre MIRABAUD, délégué interministériel à l'aménagement et à la compétitivité des territoires, de se faire mon porte-parole devant vous aujourd'hui.
Je tiens en premier lieu à féliciter votre association, et son président, M. Daniel Bretonès, d'avoir pris l'initiative d'organiser cette rencontre consacrée aux pôles de compétitivité. Je sais que ce sujet mobilise à l'heure actuelle l'ensemble des acteurs économiques, au premier rang desquels le monde académique et universitaire. L'action de votre association est importante pour diffuser la science économique et la gestion. Je pense qu'elle a une valeur ajoutée évidente à apporter dans la réflexion et l'action que le Gouvernement et les acteurs publics ont entreprise en faveur des pôles de compétitivité. Les nombreux articles parus sur le sujet dans votre revue "Vie & sciences économiques" sont là pour le prouver. J'y reviendrai plus tard.
Je tiens à saluer la présence dans la salle de nombreux acteurs des pôles de compétitivité déjà labellisés ainsi que de nombreux élus locaux.
La politique du Gouvernement français en faveur des pôles de compétitivité est un outil majeur de renforcement de l'attractivité de notre pays. J'en veux pour preuve la participation des plus grands groupes internationaux dans ces pôles, mais aussi les sollicitations que nous recevons d'entreprises étrangères qui souhaitent s'installer sur notre territoire pour rejoindre les pôles de compétitivité travaillant dans divers secteur d'activités.
D'abord permettez-moi de rappeler brièvement les motivations et le contexte de la création des pôles de compétitivité
Les pôles de compétitivité ont largement été initiés par Nicolas SARKOZY lorsqu'il était ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie, sur la base de différentes contributions dont un rapport de la DATAR, la délégation à l'aménagement du territoire, rendu public en septembre 2004. La France avait en ce domaine quelque retard par rapport à d'autres grandes nations industrielles comme les Etats-Unis, l'Allemagne, l'Italie, qui ont entrepris depuis des années une politique de soutien à la constitution de clusters. La science économique a étudié de près la contribution de ces clusters l'émergence d'un nouveau type d'économie, l'économie de la connaissance, et la démultiplication de croissance que ces clusters apportent du fait même de la concentration territoriale des industries, des centres de recherches et des établissements d'enseignement supérieur. La France avait du retard. Il fallait le rattraper.
La politique des pôles de compétitivité a pour objectif de stimuler l'innovation et d'améliorer la compétitivité de l'industrie française. Elle participe de ce fait à la lutte contre les délocalisations. Elle est aussi la manifestation visible et volontariste que la France a toujours un avenir industriel même si les industries d'aujourd'hui et de demain ne sont plus les mêmes que celles d'hier, même si leur développement passe dorénavant plus par la maîtrise de la connaissance et de l'innovation qu'auparavant. J'étais la semaine dernière au salon 3GSM, à Barcelone, salon spécialisé dans les technologies de l'information et de la communication. J'ai été impressionné par le formidable réservoir de croissance des entreprises de ce secteur. Et nous avons en France de nombreux pôles qui ont, dans ce secteur précis, une envergure mondiale.
En accompagnant les initiatives des acteurs économiques et scientifiques, les pôles de compétitivité permettront d'accroître la compétitivité de l'économie française et de renforcer l'attractivité du territoire national, contribuant à y développer et à y maintenir des activités au service de la création d'emplois.
Pour cela, le Gouvernement a labellisé en juillet 2005 67 pôles de compétitivité ? devenus 66 par fusion de 2 d'entre eux, pour leur qualité en termes de stratégies et d'ambitions pour l'emploi et les territoires qui les accueillent. Ces pôles de compétitivité répondent à quatre caractéristiques principales :
? Ils sont créateurs de richesses nouvelles à forte valeur ajoutée et d'emplois qualifiés.
? Ils se positionnent sur des marchés mondiaux et des activités bénéficiant d'un fort potentiel de croissance.
? Ils proposent de réels partenariats entre les acteurs, ainsi qu'un mode de gouvernance de qualité.
? Ils présentent une stratégie claire de développement économique et de recherche.
Ces pôles, qui ont chacun leurs spécificités, ne doivent pas être comparés entre eux mais appréhendés au regard des enjeux de développement qu'ils représentent pour la France et les territoires où ils se situent.
Pour financer l'ensemble des projets finalement retenus, nous avons mis des moyens à la hauteur. Le Premier ministre a décidé de doubler les moyens d'accompagnement de l'Etat initialement prévus en consacrant au minimum 1,5 milliards d'euros : 400 M euros de crédits d'intervention directe des ministères, 300 M euros d'exonérations fiscales et de charges sociales sur les projets de R&D, 800 M euros de financements provenant de différentes agences et établissements publics comme l'Agence nationale pour la recherche (ANR), l'Agence pour l'innovation industrielle (AII), Oséo-Anvar et la Caisse des Dépôts et Consignations.
Ou en sommes-nous aujourd'hui ? Quelles sont les prochaines échéances ?
Tout d'abord le Gouvernement français veut maintenir sur ce sujet un calendrier volontaire et serré. C'est une exigence.
Les CIACT du 14 octobre et du 20 décembre 2005 ont permis d'acter 64 projets de contrats ? sur les 66. Le prochain CIACT mettra une touche finale au dispositif par la labellisation des 2 derniers pôles, spécialisés dans le secteur automobile, qui ont fusionné et qui n'en forment désormais plus qu'un.
2006 sera donc l'année de mise en oeuvre opérationnelle de cette politique. Au passage, je rappelle qu'entre juillet et décembre 2005, les différents ministères et agences ont, selon leurs propres programmes et procédures, engagé plus de 300 M euros dans le financement des pôles, notamment de leurs projets R&D. Ce n'est pas rien et cela permet de répondre notamment aux critiques formulées sur le retard dans la mise en place des financements.
Depuis ma prise de fonction, je me suis rendu dans une cinquantaine de départements français. Cela m'a permis de visiter la moitié des pôles de compétitivité. Evidemment, j'ai entendu poindre les critiques sur la mise en place de cette politique, des critiques parfois rapides, parfois faciles. Mais j'y ai été attentif. Ces critiques sont au nombre de trois :
- un système de financement hétérogène : les acteurs des pôles trouvent que les sources de financement sont trop nombreuses, trop complexes et en conséquence peu lisible ;
- un dispositif régional parfois complexe : au niveau local, le dispositif gouvernemental a conduit à la mise en place de différents comités ? comité d'orientation, comité des financeurs, commissions scientifiques ? dont le nombre a pu être jugé, à l'usage, incompatible avec une gouvernance véritablement opérationnelle et réactive ;
- un engagement financier jugé insuffisant : cette critique est sortie très vite, souvent mal à propos, avant même que les circuits de financement ne se mettent véritablement en place.
Je veux dire une chose simple : l'Etat sera aux côtés des acteurs locaux, pour accompagner et dynamiser les projets qui vont entrer dans leur phase opérationnelle en 2006. Le Gouvernement va répondre à la demande des acteurs économiques qui veulent de la simplicité, de la réactivité, des actes. En un mot, que nous nous mettions au diapason du monde de l'entreprise, que nous parlions la langue de l'efficacité.
Nicolas SARKOZY et moi-même avons proposé tout un train de mesures concernant les pôles de compétitivité et qui seront adoptées lors du prochain CIACT qui devrait se tenir le lundi 6 mars prochain. Je ne peux, vous le comprendrez aisément, rentrer dans le détail des mesures concrètes qui seront annoncées. Cependant, en voilà l'esprit.
- en matière de procédures : je veux des procédures simples, lisibles, rapides. Ca veut dire un "guichet" unique de dépôt des dossiers avec un dossier unique. Ca veut dire un fonds unique et interministériel de financement pour tous les crédits relevant de l'Etat, un fonds unique reposant sur le principe d'un appel à projets, plusieurs fois par an.
- en matière de gouvernance : il faut laisser les acteurs s'organiser comme ils l'entendent. Ainsi, si les acteurs souhaitent simplifier leur gouvernance locale, par exemple en réduisant le nombre de commissions, qu'ils le fassent. Si un pôle veut fonctionner avec une seule et unique commission, et si un accord local se fait jour, c'est très bien. Si les acteurs locaux estiment qu'il faut moins de participants dans cette commission, c'est très bien. Je veux de la souplesse et de l'adaptabilité. A cet égard, laissez-moi attirer votre attention sur une chose importante qui est la bonne association du monde des PME. Là aussi, j'entends aussi souvent dire que les pôles de compétitivité sont réservés à une élite, aux grands groupes industriels. Certains pôles ont prévu dans leur gouvernance des vice-présidences dédiées à des représentants du monde des PME. C'est une bonne initiative, à encourager. C'est là le signe d'une union des forces entre les entreprises de toute taille.
- en matière de financements : hier encore, un quotidien de la presse économique titrait sur l'insuffisance des crédits mis en place par l'Etat. Derrière le titre accrocheur, l'article révélait une réalité plus nuancée. J'ai l'impression qu'il y a parfois comme un malin plaisir à vouloir mettre le Gouvernement en difficultés sur ce sujet comme si cette politique réussissait trop bien. Et pourtant? Et pourtant laissez-moi vous assurer que tous les crédits prévus seront mis en place, à l'heure dite, dès ce début d'année et sur trois ans.
Sur les financements en faveur des pôles de compétitivité, non seulement l'Etat respectera sa parole, mais il ne faut pas oublier que ces crédits de l'Etat constituent un formidable effet de levier entraînant des participations des grandes agences (Agence pour l'innovation industrielle, Agence nationale pour la recherche), des grands organismes publics (comme OSEO ? ANVAR ou la Caisse des dépôts) et des collectivités locales, au premier rang desquels les Conseils Régionaux. J'en profite pour saluer, à sa juste mesure, l'engagement des collectivités territoriales qui ont su s'emparer de cette politique industrielle nouvelle initiée par le Gouvernement. Et enfin, pourquoi ne pas le dire? Ce n'est pas parce que les pôles de compétitivité demanderont 100, qu'il leur sera accordé 100. C'est un raisonnement que les industriels, confrontés à la négociation au jour le jour, comprendront.
- en matière de nouveaux pôles : je considère que la politique en faveur des pôles de compétitivité est une politique qui doit vivre. Ce n'est pas une politique statique. Les pôles sont appelés à évoluer. D'ailleurs, depuis juillet dernier, certains d'entre eux ont d'ores et déjà fusionné. Mais de nouveaux pôles vont émerger. Bien sûr, ils ne seront pas légion. La volonté du Gouvernement n'est pas de faire un 2ème appel à projets. Néanmoins, si, dans un territoire, les acteurs territoriaux arrivent à se mobiliser, à monter un dossier, à prouver le bien fondé de leur démarche, le Gouvernement sera prêt à les accompagner. D'ailleurs, le prochain CIACT validera un nouveau pôle, dans le domaine de la santé, qui n'était pas dans la liste des 67 arrêtée en juillet 2005 mais faisait partie des 105 candidats.
Laissez-moi terminer sur les liens étroits que je perçois entre les pôles de compétitivité et l'aménagement du territoire.
Avant que le Gouvernement auquel j'appartiens ne se mette en place, la tendance était plutôt de retenir une quinzaine de pôles, peut-être une vingtaine, tout au plus. La logique était avant tout industrielle, centrée autour de grands pôles à vocation mondiale, la plupart d'entre eux situés dans les grandes métropoles de notre nation : Paris, Lille, Toulouse, Bordeaux, Marseille, Grenoble, Nice? D'ailleurs, à franchement parler, ces pôles étaient de facto déjà constitués. Et puis, l'appel à projets lancé par le Gouvernement a révélé une mobilisation sans précédent au sein des territoires français. Ce n'est pas quinze projets de pôles, ni trente, ni quarante, qui sont remontés à Paris, mais 105. Partout en France, des acteurs qui n'avaient pas l'habitude de se parler, des industriels, des chercheurs, des universitaires, ont commencé à se rencontrer, à se réunir, à se parler, à échanger. Fallait-il briser cet élan? Je ne le crois pas.
On me cite souvent l'exemple des Etats-Unis. C'est vrai qu'aux Etats-Unis, vous avez des clusters sur la Côte Est, sur la Côte Ouest, et presque rien au milieu, un désert. Ce n'est pas ma conception du développement économique et industriel de notre pays. Ce n'est pas ma conception de l'aménagement du territoire. Car, pour en revenir à des définitions simples, l'aménagement du territoire c'est la recherche d'un développement harmonieux et équilibré des territoires, de tous nos territoires. Tous les territoires ont un droit à la compétitivité, un droit à l'excellence.
Le parti pris alors par le Gouvernement ? Nicolas SARKOZY et moi-même avons poussé en ce sens ? a été de retenir 67 pôles, 67 pôles qui méritaient d'être retenus. Ils forment un maillage extraordinaire de notre territoire. Quand je visite les pôles, je suis toujours étonné de l'extrême capillarité des pôles. Ils innervent réellement les territoires, y compris des villes moyennes ou des territoires ruraux. Deux exemples. Je suis allé récemment dans la Manche, à Saint-Lô. J'y ai visité une entreprise associée au pôle "Transactions électroniques sécurisées". Cette entreprise fabriquait des cartes à puce. Deuxième exemple : en décembre dernier, j'étais en Côte d'Or. A Montbard, petite sous-préfecture, des entreprises participent activement au pôle de compétitivité nucléaire par la fabrication de tubes vapeur à destination de nos centrales. Je pourrai multiplier les exemples.
Mon argument est que la France s'est dotée d'une nouvelle politique industrielle, une politique volontariste, une politique qui ne sombre pas dans le défaitisme, une politique qui pense que tous les territoires ont un droit à la compétitivité. Ce n'est d'ailleurs pas un hasard si la délégation à l'aménagement du territoire ? la DATAR ? a laissé la place au 1er janvier 2006 à la délégation à l'aménagement et à la compétitivité des territoires. Les mots ont un sens. Il n'est plus possible de concevoir une politique uniforme, à partir de Paris, et qui ne prendrait pas en compte la diversité et la richesse de nos territoires.
Trop longtemps, l'aménagement du territoire a été perçu comme le "pompier" des territoires. Il fallait éteindre les incendies qui s'allumaient suite aux restructurations industrielles douloureuses que traversaient notre pays : les mines, la sidérurgie, les industries traditionnelles? Ce rôle demeure. Mais, aujourd'hui, nous inversons la tendance. Nous voulons reprendre l'initiative dans nos territoires. Les décisions que prendra prochainement le Gouvernement, tant sur les futurs contrats de plan que sur les fonds européens, vont être frappées de ce principe simple : l'emploi est notre bataille majeure, et pour gagner cette bataille, il faut restaurer, soutenir et amplifier la compétitivité et l'attractivité de nos territoires, de tous nos territoires.
Le sujet des pôles de compétitivité, vous l'avez perçu, me passionne. J'aurais pu vous parler de nombreux autres sujets liés aux pôles de compétitivité. En 2006, j'ai la ferme intention d'inciter les pôles de compétitivité à se regrouper au niveau national pour créer une fédération nationale ou un club national des pôles de compétitivité. Vous êtes bien placés pour savoir l'importance du décloisonnement, du partage d'informations, du travail en réseau. Tout cela a été réussi au niveau local. Il faut agir maintenant au plan national.
Je considère également comme très important l'évaluation de cette politique lancée par le Gouvernement, une évaluation in itinere, "en marchant". L'association nationale des docteurs en sciences économique a une partition à jouer. Je serais très heureux de pouvoir l'associer à court terme à cette démarche d'évaluation.
En guise de conclusion, laissez-moi vous faire partager une conviction simple : notre pays est un "grand" pays. Il recèle une énergie formidable, une volonté de créer, une volonté d'avancer. Il faut juste libérer cette énergie, accompagner cette volonté. Et les résultats seront là. La France n'est pas irrémédiablement promise à voir partir ses entreprises et ses industries à l'étranger. L'aménagement du territoire, pour moi, représente cette lutte contre l'irrémédiable, ce désir ardent d'aller contre le courant, contre ce que tous les autres vous présentent comme inéluctable.
Je vous remercie de votre attention.Source http://www.diact.gouv.fr, le 8 mars 2006
Malheureusement, des obligations de dernière minute liées à mon activité gouvernementale m'ont empêché d'être parmi vous. Je vous prie de bien vouloir m'en excuser. J'ai demandé à M. Pierre MIRABAUD, délégué interministériel à l'aménagement et à la compétitivité des territoires, de se faire mon porte-parole devant vous aujourd'hui.
Je tiens en premier lieu à féliciter votre association, et son président, M. Daniel Bretonès, d'avoir pris l'initiative d'organiser cette rencontre consacrée aux pôles de compétitivité. Je sais que ce sujet mobilise à l'heure actuelle l'ensemble des acteurs économiques, au premier rang desquels le monde académique et universitaire. L'action de votre association est importante pour diffuser la science économique et la gestion. Je pense qu'elle a une valeur ajoutée évidente à apporter dans la réflexion et l'action que le Gouvernement et les acteurs publics ont entreprise en faveur des pôles de compétitivité. Les nombreux articles parus sur le sujet dans votre revue "Vie & sciences économiques" sont là pour le prouver. J'y reviendrai plus tard.
Je tiens à saluer la présence dans la salle de nombreux acteurs des pôles de compétitivité déjà labellisés ainsi que de nombreux élus locaux.
La politique du Gouvernement français en faveur des pôles de compétitivité est un outil majeur de renforcement de l'attractivité de notre pays. J'en veux pour preuve la participation des plus grands groupes internationaux dans ces pôles, mais aussi les sollicitations que nous recevons d'entreprises étrangères qui souhaitent s'installer sur notre territoire pour rejoindre les pôles de compétitivité travaillant dans divers secteur d'activités.
D'abord permettez-moi de rappeler brièvement les motivations et le contexte de la création des pôles de compétitivité
Les pôles de compétitivité ont largement été initiés par Nicolas SARKOZY lorsqu'il était ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie, sur la base de différentes contributions dont un rapport de la DATAR, la délégation à l'aménagement du territoire, rendu public en septembre 2004. La France avait en ce domaine quelque retard par rapport à d'autres grandes nations industrielles comme les Etats-Unis, l'Allemagne, l'Italie, qui ont entrepris depuis des années une politique de soutien à la constitution de clusters. La science économique a étudié de près la contribution de ces clusters l'émergence d'un nouveau type d'économie, l'économie de la connaissance, et la démultiplication de croissance que ces clusters apportent du fait même de la concentration territoriale des industries, des centres de recherches et des établissements d'enseignement supérieur. La France avait du retard. Il fallait le rattraper.
La politique des pôles de compétitivité a pour objectif de stimuler l'innovation et d'améliorer la compétitivité de l'industrie française. Elle participe de ce fait à la lutte contre les délocalisations. Elle est aussi la manifestation visible et volontariste que la France a toujours un avenir industriel même si les industries d'aujourd'hui et de demain ne sont plus les mêmes que celles d'hier, même si leur développement passe dorénavant plus par la maîtrise de la connaissance et de l'innovation qu'auparavant. J'étais la semaine dernière au salon 3GSM, à Barcelone, salon spécialisé dans les technologies de l'information et de la communication. J'ai été impressionné par le formidable réservoir de croissance des entreprises de ce secteur. Et nous avons en France de nombreux pôles qui ont, dans ce secteur précis, une envergure mondiale.
En accompagnant les initiatives des acteurs économiques et scientifiques, les pôles de compétitivité permettront d'accroître la compétitivité de l'économie française et de renforcer l'attractivité du territoire national, contribuant à y développer et à y maintenir des activités au service de la création d'emplois.
Pour cela, le Gouvernement a labellisé en juillet 2005 67 pôles de compétitivité ? devenus 66 par fusion de 2 d'entre eux, pour leur qualité en termes de stratégies et d'ambitions pour l'emploi et les territoires qui les accueillent. Ces pôles de compétitivité répondent à quatre caractéristiques principales :
? Ils sont créateurs de richesses nouvelles à forte valeur ajoutée et d'emplois qualifiés.
? Ils se positionnent sur des marchés mondiaux et des activités bénéficiant d'un fort potentiel de croissance.
? Ils proposent de réels partenariats entre les acteurs, ainsi qu'un mode de gouvernance de qualité.
? Ils présentent une stratégie claire de développement économique et de recherche.
Ces pôles, qui ont chacun leurs spécificités, ne doivent pas être comparés entre eux mais appréhendés au regard des enjeux de développement qu'ils représentent pour la France et les territoires où ils se situent.
Pour financer l'ensemble des projets finalement retenus, nous avons mis des moyens à la hauteur. Le Premier ministre a décidé de doubler les moyens d'accompagnement de l'Etat initialement prévus en consacrant au minimum 1,5 milliards d'euros : 400 M euros de crédits d'intervention directe des ministères, 300 M euros d'exonérations fiscales et de charges sociales sur les projets de R&D, 800 M euros de financements provenant de différentes agences et établissements publics comme l'Agence nationale pour la recherche (ANR), l'Agence pour l'innovation industrielle (AII), Oséo-Anvar et la Caisse des Dépôts et Consignations.
Ou en sommes-nous aujourd'hui ? Quelles sont les prochaines échéances ?
Tout d'abord le Gouvernement français veut maintenir sur ce sujet un calendrier volontaire et serré. C'est une exigence.
Les CIACT du 14 octobre et du 20 décembre 2005 ont permis d'acter 64 projets de contrats ? sur les 66. Le prochain CIACT mettra une touche finale au dispositif par la labellisation des 2 derniers pôles, spécialisés dans le secteur automobile, qui ont fusionné et qui n'en forment désormais plus qu'un.
2006 sera donc l'année de mise en oeuvre opérationnelle de cette politique. Au passage, je rappelle qu'entre juillet et décembre 2005, les différents ministères et agences ont, selon leurs propres programmes et procédures, engagé plus de 300 M euros dans le financement des pôles, notamment de leurs projets R&D. Ce n'est pas rien et cela permet de répondre notamment aux critiques formulées sur le retard dans la mise en place des financements.
Depuis ma prise de fonction, je me suis rendu dans une cinquantaine de départements français. Cela m'a permis de visiter la moitié des pôles de compétitivité. Evidemment, j'ai entendu poindre les critiques sur la mise en place de cette politique, des critiques parfois rapides, parfois faciles. Mais j'y ai été attentif. Ces critiques sont au nombre de trois :
- un système de financement hétérogène : les acteurs des pôles trouvent que les sources de financement sont trop nombreuses, trop complexes et en conséquence peu lisible ;
- un dispositif régional parfois complexe : au niveau local, le dispositif gouvernemental a conduit à la mise en place de différents comités ? comité d'orientation, comité des financeurs, commissions scientifiques ? dont le nombre a pu être jugé, à l'usage, incompatible avec une gouvernance véritablement opérationnelle et réactive ;
- un engagement financier jugé insuffisant : cette critique est sortie très vite, souvent mal à propos, avant même que les circuits de financement ne se mettent véritablement en place.
Je veux dire une chose simple : l'Etat sera aux côtés des acteurs locaux, pour accompagner et dynamiser les projets qui vont entrer dans leur phase opérationnelle en 2006. Le Gouvernement va répondre à la demande des acteurs économiques qui veulent de la simplicité, de la réactivité, des actes. En un mot, que nous nous mettions au diapason du monde de l'entreprise, que nous parlions la langue de l'efficacité.
Nicolas SARKOZY et moi-même avons proposé tout un train de mesures concernant les pôles de compétitivité et qui seront adoptées lors du prochain CIACT qui devrait se tenir le lundi 6 mars prochain. Je ne peux, vous le comprendrez aisément, rentrer dans le détail des mesures concrètes qui seront annoncées. Cependant, en voilà l'esprit.
- en matière de procédures : je veux des procédures simples, lisibles, rapides. Ca veut dire un "guichet" unique de dépôt des dossiers avec un dossier unique. Ca veut dire un fonds unique et interministériel de financement pour tous les crédits relevant de l'Etat, un fonds unique reposant sur le principe d'un appel à projets, plusieurs fois par an.
- en matière de gouvernance : il faut laisser les acteurs s'organiser comme ils l'entendent. Ainsi, si les acteurs souhaitent simplifier leur gouvernance locale, par exemple en réduisant le nombre de commissions, qu'ils le fassent. Si un pôle veut fonctionner avec une seule et unique commission, et si un accord local se fait jour, c'est très bien. Si les acteurs locaux estiment qu'il faut moins de participants dans cette commission, c'est très bien. Je veux de la souplesse et de l'adaptabilité. A cet égard, laissez-moi attirer votre attention sur une chose importante qui est la bonne association du monde des PME. Là aussi, j'entends aussi souvent dire que les pôles de compétitivité sont réservés à une élite, aux grands groupes industriels. Certains pôles ont prévu dans leur gouvernance des vice-présidences dédiées à des représentants du monde des PME. C'est une bonne initiative, à encourager. C'est là le signe d'une union des forces entre les entreprises de toute taille.
- en matière de financements : hier encore, un quotidien de la presse économique titrait sur l'insuffisance des crédits mis en place par l'Etat. Derrière le titre accrocheur, l'article révélait une réalité plus nuancée. J'ai l'impression qu'il y a parfois comme un malin plaisir à vouloir mettre le Gouvernement en difficultés sur ce sujet comme si cette politique réussissait trop bien. Et pourtant? Et pourtant laissez-moi vous assurer que tous les crédits prévus seront mis en place, à l'heure dite, dès ce début d'année et sur trois ans.
Sur les financements en faveur des pôles de compétitivité, non seulement l'Etat respectera sa parole, mais il ne faut pas oublier que ces crédits de l'Etat constituent un formidable effet de levier entraînant des participations des grandes agences (Agence pour l'innovation industrielle, Agence nationale pour la recherche), des grands organismes publics (comme OSEO ? ANVAR ou la Caisse des dépôts) et des collectivités locales, au premier rang desquels les Conseils Régionaux. J'en profite pour saluer, à sa juste mesure, l'engagement des collectivités territoriales qui ont su s'emparer de cette politique industrielle nouvelle initiée par le Gouvernement. Et enfin, pourquoi ne pas le dire? Ce n'est pas parce que les pôles de compétitivité demanderont 100, qu'il leur sera accordé 100. C'est un raisonnement que les industriels, confrontés à la négociation au jour le jour, comprendront.
- en matière de nouveaux pôles : je considère que la politique en faveur des pôles de compétitivité est une politique qui doit vivre. Ce n'est pas une politique statique. Les pôles sont appelés à évoluer. D'ailleurs, depuis juillet dernier, certains d'entre eux ont d'ores et déjà fusionné. Mais de nouveaux pôles vont émerger. Bien sûr, ils ne seront pas légion. La volonté du Gouvernement n'est pas de faire un 2ème appel à projets. Néanmoins, si, dans un territoire, les acteurs territoriaux arrivent à se mobiliser, à monter un dossier, à prouver le bien fondé de leur démarche, le Gouvernement sera prêt à les accompagner. D'ailleurs, le prochain CIACT validera un nouveau pôle, dans le domaine de la santé, qui n'était pas dans la liste des 67 arrêtée en juillet 2005 mais faisait partie des 105 candidats.
Laissez-moi terminer sur les liens étroits que je perçois entre les pôles de compétitivité et l'aménagement du territoire.
Avant que le Gouvernement auquel j'appartiens ne se mette en place, la tendance était plutôt de retenir une quinzaine de pôles, peut-être une vingtaine, tout au plus. La logique était avant tout industrielle, centrée autour de grands pôles à vocation mondiale, la plupart d'entre eux situés dans les grandes métropoles de notre nation : Paris, Lille, Toulouse, Bordeaux, Marseille, Grenoble, Nice? D'ailleurs, à franchement parler, ces pôles étaient de facto déjà constitués. Et puis, l'appel à projets lancé par le Gouvernement a révélé une mobilisation sans précédent au sein des territoires français. Ce n'est pas quinze projets de pôles, ni trente, ni quarante, qui sont remontés à Paris, mais 105. Partout en France, des acteurs qui n'avaient pas l'habitude de se parler, des industriels, des chercheurs, des universitaires, ont commencé à se rencontrer, à se réunir, à se parler, à échanger. Fallait-il briser cet élan? Je ne le crois pas.
On me cite souvent l'exemple des Etats-Unis. C'est vrai qu'aux Etats-Unis, vous avez des clusters sur la Côte Est, sur la Côte Ouest, et presque rien au milieu, un désert. Ce n'est pas ma conception du développement économique et industriel de notre pays. Ce n'est pas ma conception de l'aménagement du territoire. Car, pour en revenir à des définitions simples, l'aménagement du territoire c'est la recherche d'un développement harmonieux et équilibré des territoires, de tous nos territoires. Tous les territoires ont un droit à la compétitivité, un droit à l'excellence.
Le parti pris alors par le Gouvernement ? Nicolas SARKOZY et moi-même avons poussé en ce sens ? a été de retenir 67 pôles, 67 pôles qui méritaient d'être retenus. Ils forment un maillage extraordinaire de notre territoire. Quand je visite les pôles, je suis toujours étonné de l'extrême capillarité des pôles. Ils innervent réellement les territoires, y compris des villes moyennes ou des territoires ruraux. Deux exemples. Je suis allé récemment dans la Manche, à Saint-Lô. J'y ai visité une entreprise associée au pôle "Transactions électroniques sécurisées". Cette entreprise fabriquait des cartes à puce. Deuxième exemple : en décembre dernier, j'étais en Côte d'Or. A Montbard, petite sous-préfecture, des entreprises participent activement au pôle de compétitivité nucléaire par la fabrication de tubes vapeur à destination de nos centrales. Je pourrai multiplier les exemples.
Mon argument est que la France s'est dotée d'une nouvelle politique industrielle, une politique volontariste, une politique qui ne sombre pas dans le défaitisme, une politique qui pense que tous les territoires ont un droit à la compétitivité. Ce n'est d'ailleurs pas un hasard si la délégation à l'aménagement du territoire ? la DATAR ? a laissé la place au 1er janvier 2006 à la délégation à l'aménagement et à la compétitivité des territoires. Les mots ont un sens. Il n'est plus possible de concevoir une politique uniforme, à partir de Paris, et qui ne prendrait pas en compte la diversité et la richesse de nos territoires.
Trop longtemps, l'aménagement du territoire a été perçu comme le "pompier" des territoires. Il fallait éteindre les incendies qui s'allumaient suite aux restructurations industrielles douloureuses que traversaient notre pays : les mines, la sidérurgie, les industries traditionnelles? Ce rôle demeure. Mais, aujourd'hui, nous inversons la tendance. Nous voulons reprendre l'initiative dans nos territoires. Les décisions que prendra prochainement le Gouvernement, tant sur les futurs contrats de plan que sur les fonds européens, vont être frappées de ce principe simple : l'emploi est notre bataille majeure, et pour gagner cette bataille, il faut restaurer, soutenir et amplifier la compétitivité et l'attractivité de nos territoires, de tous nos territoires.
Le sujet des pôles de compétitivité, vous l'avez perçu, me passionne. J'aurais pu vous parler de nombreux autres sujets liés aux pôles de compétitivité. En 2006, j'ai la ferme intention d'inciter les pôles de compétitivité à se regrouper au niveau national pour créer une fédération nationale ou un club national des pôles de compétitivité. Vous êtes bien placés pour savoir l'importance du décloisonnement, du partage d'informations, du travail en réseau. Tout cela a été réussi au niveau local. Il faut agir maintenant au plan national.
Je considère également comme très important l'évaluation de cette politique lancée par le Gouvernement, une évaluation in itinere, "en marchant". L'association nationale des docteurs en sciences économique a une partition à jouer. Je serais très heureux de pouvoir l'associer à court terme à cette démarche d'évaluation.
En guise de conclusion, laissez-moi vous faire partager une conviction simple : notre pays est un "grand" pays. Il recèle une énergie formidable, une volonté de créer, une volonté d'avancer. Il faut juste libérer cette énergie, accompagner cette volonté. Et les résultats seront là. La France n'est pas irrémédiablement promise à voir partir ses entreprises et ses industries à l'étranger. L'aménagement du territoire, pour moi, représente cette lutte contre l'irrémédiable, ce désir ardent d'aller contre le courant, contre ce que tous les autres vous présentent comme inéluctable.
Je vous remercie de votre attention.Source http://www.diact.gouv.fr, le 8 mars 2006