Déclaration de M. Jean-François Copé, ministre délégué à l'intérieur et porte-parole du gouvernement, sur la mise en œuvre des lois de décentralisation et l'objectif de réforme des dotations, Nice le 2 octobre 2004.

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Circonstance : Visite au Conseil général des Alpes-Maritimes à Nice le 2 octobre 2004

Texte intégral

Monsieur le Préfet,
Monsieur le Président, cher Christian,
Madame et Messieurs les Parlementaires,
Mesdames et Messieurs les élus,
Je voudrais d'emblée remercier mon ami Christian ESTROSI de nous accueillir ici, et vous dire que je suis très heureux d'être parmi vous aujourd'hui.
C'est capital pour moi d'avoir ces échanges avec vous, à double titre d'ailleurs :
- Elu local moi-même, je connais bien vos responsabilités et les difficultés que vous pouvez rencontrer.
- Ministre délégué à l'Intérieur, je suis tout spécialement en charge des collectivités locales. A ce titre, j'ai besoin de vous rencontrer pour connaître vos attentes, et répondre à toutes vos préoccupations.
Car ne nous y trompons pas : ce grand mouvement de décentralisation que nous menons depuis presque 2 ans, il s'adresse avant tout à vous. Nous l'avons conduit parce que nous avons confiance dans votre capacité d'initiative.
Votre département est d'ailleurs l'exemple même de cette efficacité. Je sais que le conseil général a reçu cette année la Marianne d'Or : c'est une belle récompense, à la hauteur de votre volonté, de votre énergie. L'action que vous menez pour tout ce qui touche aux déplacements, au logement, à l'environnement, au développement économique est absolument remarquable, et je tenais à le saluer.
C'est justement sur ces qualités, sur ces valeurs que nous voulons miser pour réussir la décentralisation.
1. Nous avons tenu nos engagements
Je peux vous le dire, cette décentralisation, il aura fallu batailler pour la faire. On s'est heurté au scepticisme des uns, aux réticences des autres. Il aura fallu lever les uns après les autres tous les malentendus. Le tout dans un contexte politique d'après-régionales qui ne portait pas à la sérénité !
Mais il n'empêche qu'aujourd'hui nous avons tenu nos engagements, à la fois sur la forme et sur le fond.
- Sur la forme, parce qu'avec Dominique de Villepin, nous avons conduit une vraie concertation, dans un climat d'écoute et de dialogue. Mais qu'en même temps, nous avons su faire preuve d'esprit de responsabilité et de décision, en tenant notre calendrier.
- Les deux lois (sur l'autonomie financière et sur les transferts de compétences) ont été votées dans les délais prévus, lors de la session extraordinaire. Et nous nous serions volontiers passé d'utiliser le 49-3, si nous n'avions pas eu à faire face à une obstruction parlementaire totalement stérile.
- Sur le fond ensuite, parce que les collectivités locales peuvent enfin compter sur des marges de manoeuvre, à la fois pour décider et pour financer l'exercice de leurs nouvelles compétences :
* Décider, parce que la décentralisation va transférer des compétences aussi importantes et aussi concrètes que :
- la formation professionnelle, et la coordination de l'action économique aux régions
- l'action sociale, la gestion du RMI-RMA, le réseau des routes nationales aux départements
- le logement social aux communes et intercommunalités.
J'ai d'ailleurs personnellement tenu à ce que la loi comporte un titre sur l'intercommunalité. Cela vous concerne au premier chef, car je sais que votre département est particulièrement en pointe sur ce sujet, avec 4 communautés d'agglomération et 8 communautés de communes sur le département.
Par ailleurs, comme nous nous y étions engagés, la loi confie aux régions et départements la gestion des 96 000 techniciens, ouvriers et personnels de service (TOS) des collèges et lycées et 33 000 agents des DDE.
- Ce que je veux vous dire, c'est qu'on a réussi à faire une réforme équilibrée, qui concerne tous les niveaux de collectivités, et qui confie à chacun les compétences qu'il est le mieux à même d'exercer.
Chacun y trouvera son compte : l'Etat, pour lequel la décentralisation est un levier formidable de modernisation ; les élus, parce qu'ils vont enfin disposer de plus de marges de manoeuvre ; et les citoyens, parce que l'action publique sera plus efficace, et plus proche d'eux.
* Et puis notre décentralisation, elle a quand même une sacré vertu : elle est irréprochable sur le plan financier.
On avait un anti-modèle : c'était l'APA. Il n'était pas question pour nous de vous confier des charges nouvelles, mais sans les financements correspondants.
Alors là encore, on a tenu parole, et on a respecte deux engagements :
- d'abord un financement à l'euro près des transferts de compétences. C'est une garantie constitutionnelle. Tout sera étroitement contrôlée par la commission d'évaluation des charges : sa composition a été modifiée pour en garantir l'impartialité. il n'y aura donc aucune mauvaise surprise.
Lorsque tous les transferts de compétences auront eu lieu, à compter de 2008, le montant des ressources transférées s'élèvera à près de 10 milliards d'euros
(5 milliards au titre du RMI-RMA + 2,2 milliards pour les régions grâce au transfert de la TIPP + 2,2 milliards pour les départements grâce au transfert de la TCA)
- deuxième engagement : le respect de l'autonomie financière.
Là encore, nous allons pouvoir tenir nos promesses. Dès 2005, les régions vont bénéficier d'une part de la TIPP et dès 2006, sous réserve de l'accord de nos partenaires européens, elles pourront en moduler le taux.
Ce n'était pas une bataille gagnée d'avance. Loin de là ! Jusqu'en août, la direction des affaires juridiques de la Commission européenne se montrait très réservée. Je me suis moi-même rendu à Bruxelles rencontrer le commissaire européen chargé du dossier, Monsieur Frits Bolkenstein, pour défendre notre position. Et nous sommes sur le point d'aboutir, puisque le 14 septembre, la commission a rendu un avis favorable à cette régionalisation de la TIPP.
Sur tous ces points, la parole du Gouvernement a été tenue.
2. Nous allons vous accompagner dans la mise en oeuvre de ces textes
Je suis déterminé à poursuivre aujourd'hui ce travail, en vous accompagnant au mieux dans la mise en oeuvre de ces textes.
Je veux, devant vous aujourd'hui, vous dire très clairement quels sont mes engagements :
- premier engagement : des décrets pris dans les temps.
Sur les 62 décrets d'application nécessaires, 35 devront être publiés avant le 31 décembre, pour une application à compter du 1er janvier 2005. Je m'engage à veiller scrupuleusement à ce que ces 35 décrets soient publiés dans les temps au JO.
- deuxième engagement : une réactivité ministérielle et préfectorale optimale, face à tous les problèmes que vous pourriez rencontrer. Vous trouverez auprès du préfet de votre département toutes les réponses à vos questions. Il doit être pour vous un interlocuteur privilégié ; je ne doute pas que Monsieur BREUIL remplira parfaitement ce rôle de conseil et d'explications auprès de vous.
- troisième engagement : poursuivre des relations de confiance entre l'Etat et les collectivités locales.
De ce point de vue, le budget 2005 est un bon budget et constitue un effort vraiment substantiel en faveur des collectivités locales, dans un contexte budgétaire difficile. L'Etat a en effet décidé de reconduire le contrat de croissance et de solidarité dans les mêmes conditions qu'en 2004.
- La reconduction de ces règles d'indexation permet de voir l'enveloppe du contrat de croissance progresser de 2,87% cette année, contre 1,7% en 2004.
3. Les chantiers d'avenir

Premier grand chantier : la réforme des dotations. Depuis des années, on en parle. Depuis des années, on fait la liste de tout ce qui ne va pas, et de tout ce qu'il faudrait faire. Nous, nous avons décidé d'agir. Avec un objectif : faire une réforme globale, fortement péréquatrice.
Cette réforme des dotations, nous sommes en train d'y travailler. Je souhaite vous en exposer brièvement les grandes lignes :
* Réforme de la DGF des communes : il s'agit
- de mettre en place une dotation de base de 50 à 125 euros par habitant en fonction croissante de la taille des communes
- d'ajouter 3 euros par hectare à la dotation forfaitaire versée à chaque commune, quel que soit le nombre d'habitants, pour aider les communes rurales qui comptent une faible population
- de réduire progressivement l'écart de dotation par habitant entre les intercommunalités rurales et urbaines
- et enfin de garantir à chaque commune qu'elle conservera le niveau de dotation forfaitaire qu'elle a perçue avant la réforme, en mettant en oeuvre à chaque niveau un complément de garantie.
* Réforme des dotations de péréquation :
En matière de péréquation, l'objectif est de faire évoluer les sommes réservées à la croissance de la Dotation de Solidarité Urbaine (DSU) et de la Dotation de Solidarité Rurale (DSR) de façon identique (+20%), tout en préservant la dotation d'intercommunalité. Ces augmentations iront aux communes ayant des Zones Urbaines Sensibles pour la DSU et aux bourgs centres pour la DSR.
* réforme de la DGF des départements :
Il s'agit de réduire les écarts entre départements en élargissant l'accès à la dotation de fonctionnement minimale (DFM), et en créant une dotation de péréquation urbaine pour les départements très urbains qui subissent de fortes contraintes de charges.
=> Vous le voyez, la philosophie de cette réforme est tout le contraire d'une démarche de saupoudrage. Le Gouvernement assume le fait qu'il s'agisse d'une réforme fortement péréquatrice, à la fois pour le milieu rural et pour le milieu urbain.

- Enfin, dernier grand chantier à venir : celui de la réforme de la taxe professionnelle. La commission Fouquet a rendu son pré-rapport fin juillet et nous engagerons la réflexion sur cette réforme dès la remise des conclusions définitives, à la fin de l'année.
- A l'aide de tous ces outils financiers, je souhaite donner aux territoires les moyens de leur développement économique, au service de la préservation et de la création d'emplois.
En retour, sachez que j'ai besoin de vous, pour faire de cette grande réforme une véritable réussite, au service du dynamisme de nos territoires.
Vous allez être au coeur de toutes les initiatives, de toutes les expérimentations qui vont être menées. C'est vous qui, par votre travail au quotidien, allez être les moteurs de cette décentralisation.
Je compte sur votre mobilisation. En retour, sachez que vous trouverez toujours auprès de moi un interlocuteur attentif et disponible.

(Source http://www.interieur.gouv.fr, le 21 octobre 2004)