Déclaration de M. Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre, sur les priorités de la politique du logement, l'amélioration de l'accès au logement social et à la propriété, Paris le 4 février 2004.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Texte intégral

Madame et messieurs les Ministres, d'hier, d'aujourd'hui et de demain
Mesdames et messieurs les Parlementaires,
Mesdames et messieurs les Présidents,
Messieurs les Directeurs,
Mesdames et messieurs,
Bravo aux organisateurs, bravo à G. De Robien d'avoir choisi un lieu de création pour parler de logement, parce que je crois que c'est un point très important. Parmi tous les lieux où j'ai des discours à faire, celui-là me paraît le plus sympathique, sans parler du public. Je voudrais vous dire que j'ai un grand plaisir de participer avec vous les acteurs du logement car quelle que soit votre profession vous êtes une assemblée de passions. J'ai commencé ma vie d'élu local dans le logement social, y compris en présidant un organisme et j'ai vu ce côté assez exceptionnel qu'il y a dans cette famille, avec les aspects culturels, sociaux, les engagements, les passions et les compétences rassemblées et très diversifiées. Dans le logement, où on conjugue à haut niveau, et le technique et l'humain. Il n'y a pas tant de secteurs où le niveau technique et le niveau humain sont aussi bien équilibrés et autant exposés à la vie quotidienne et vraiment aux aspirations de tous les jours et finalement, aux problèmes de notre société puisque le logement est un vrai reflet et des attentes et des problèmes.
Je voudrais remercier Gilles de Robien, le ministre, d'avoir organisé ce colloque avant la préparation de la loi, de l'initiative qui nous permettra d'aller plus avant. Ma présence témoigne de l'engagement de tout le Gouvernement aux côtés du président de la République en faveur du logement. J'ai plaisir à dire à P. Méhaignerie que cet engagement dépasse très largement les engagements de Bercy, même si, naturellement, ces engagements de Bercy sont nécessaires. Mais c'est un engagement collectif car la politique du logement très interministérielle.
C'est un bien fondamental qui touche à la dignité humaine, à la citoyenneté réelle, et à la vie sociale et à l'emploi. J'ai la conviction, aujourd'hui, que notre politique du logement est à la croisée des chemins et que nous devons la refonder quelque peu en ce début de XXIème siècle.
Les efforts qui ont été réalisés en matière de logement par notre pays depuis l'après-guerre sont inscrits dans notre mémoire : on en connaît tous les succès - je veux passer vite sur ces sujets ; on en connaît aussi un certain nombre de difficultés. On voit aujourd'hui le logement face à de fortes tensions qui se traduisent par une augmentation générale des loyers et des prix de vente et, globalement, une insuffisance de l'offre locative privée et sociale. C'est une donnée qu'il nous faut affronter.
Encore trop de Françaises et de Français aujourd'hui vivent cette difficulté à trouver un toit, pour eux, pour leurs enfants, pour leur famille ou connaissent des files d'attente - chacun connaît ça sur le terrain - de plusieurs années pour obtenir un logement social.
Le fait même qu'un déficit de plusieurs centaines de milliers de logements ait pu s'accumuler ces dernières années dans nos territoires illustre cette sorte de " bug " réglementaire, financier, administratif qui nous conduit à repenser un peu notre organisation. Parce que, ce ne sont pas les organismes qui manquent ; ce ne sont pas les procédures qui manquent, mais tout est très complexe. Nous voyons que notre pays, malgré son organisation sophistiquée, son haut niveau de pratiques administratives, est capable de se trouver face à un déficit de plusieurs centaines de milliers de logements qui s'accumule sur plusieurs années. C'est, je crois, pour nous, l'occasion de mesurer que certains outils de la politique du logement ont vieilli et que, sans doute, le système est beaucoup trop cloisonné.
Il faut que les responsabilités de l'Etat, qui est en partie financeur, et des collectivités locales, de l'ensemble des organismes puissent être organisées et que ces responsabilités soient plus clairement définies. Il faut notamment éviter ce paradoxe - mais que l'on connaît sur le terrain - de voir que quelquefois, c'est la subvention nationale qui retarde le projet au lieu de l'accélérer. On voit des programmes qui sont en attente parce que les dispositifs ne sont pas bouclés. Je crois qu'il y a là un certain nombre de procédures qu'il nous faut modifier. Je crois beaucoup que la décentralisation fait partie de cette refonte de la politique du logement. Je pense que c'est un point clair : si on veut que, dans notre pays, les territoires puissent respirer, il faut que la politique du logement soit en partie décentralisée. Cela ne veut pas dire que l'Etat abandonne ses responsabilités ; cela ne veut pas dire que tout ce qu'il y a de justice sociale dans la politique du logement ne soit pas assumée par l'Etat et que l'Etat n'en soit pas le garant. Mais cela veut dire qu'il faut que l'Etat puisse confier par des délégations aux départements, aux EPCI, l'intercommunalité, des conventions, une délégation de responsabilités pour des opérations de reconstruction, de réhabilitation ou de construction.
Je crois qu'il nous faut mener cette réflexion collective pour repenser le logement dans toutes ses dimensions aussi bien en matière d'urbanisme que face aux exigences sociales. C'est un point important puisque, au fond, il faut remonter à 1991 pour avoir eu un débat sur ces sujets, un débat national qui avait, à l'époque, été lancé à l'initiative du Commissariat général au Plan et du Conseil Economique et Social. C'est pour cela que la demande qui est proposée par la Fondation Abbé Pierre d'avoir un grand débat est tout à fait fondée et je vous propose que le Gouvernement organise, avec les partenaires, à l'automne, mais qu'on se mette au travail dès maintenant pour préparer ce grand débat national, sur le logement des plus démunis notamment, afin d'associer nos compatriotes à la refonte de la politique du logement. Je crois que c'est très important d'avoir ce grand débat national. Le logement prend une place de plus en plus importante dans l'équilibre social. Je suis convaincu que le logement est devenu le premier lien de l'intégration sociale, économique et culturelle. Très longtemps, l'emploi a joué cette fonction. Aujourd'hui, la place qu'a le logement, notamment face à une organisation familiale en mouvement - pour prendre des mots modérés -, face à une organisation familiale qui est en train dans notre société de beaucoup évoluer, le logement se trouve tiraillé entre de multiples forces et on voit bien, aujourd'hui, que la difficulté en matière de logement conduit à des déracinements et à des frontières, des fractures qu'il est difficile de franchir seul. Là, je crois vraiment que nous avons besoin d'un grand débat national sur ce sujet pour placer le logement au cur-même de notre vivre ensemble. En ce qui concerne notre vision du logement, je crois qu'elle s'articule, pour le Gouvernement, autour de 4 priorités. Elle doit s'articuler autour de ces 4 grands engagements du Gouvernement, qui peuvent servir à l'introduction au débat.
II. La définition d'une politique pérenne du logement suppose une grande clarté dans les priorités.
Je fixe à la politique du logement les 4 priorités suivantes qui ont d'ores et déjà inspiré l'action de mon gouvernement :
- maintenir un rythme élevé de construction ;
- intensifier l'effort de réhabilitation du parc privé ;
- renforcer la solidarité en faveur des plus démunis ;
- favoriser l'accession à la propriété.
1) Première priorité : maintenir un rythme élevé de construction de logements dans notre pays.
C'est un point clé, nous avons la nécessité de maintenir ce rythme rapide, si nous ne voulons pas accumuler, au fil des années, des retards. Nous avons accumulé un retard de production, chacun le sait, sur les loyers, les prix de vente et il nous fait prendre la mesure de ce retard. C'est pour cela que nous avons décidé, avec G. De Robien, de relancer la construction dans le secteur social. Nous avons, notamment, par les décisions que nous avons prises concernant le Livret A, permis aux organismes HLM de réduire leurs charges financières à hauteur de 500 millions d'euros : c'est un élément majeur du coût de la ressource et donc un effet de levier important pour le logement social.
L'objectif fixé de 80 000 logements locatifs sociaux qui figure dans le budget 2004 auxquels s'ajoutent 10 000 logements en location-accession constitue une véritable remobilisation des organismes HLM pour lesquels je voudrais saluer les initiatives et le dynamisme. C'est très important pour notre construction sociale d'avoir en perspective ces 80 000 logements locatifs plus les 10 000 logements en location-accession.
La construction a repris depuis 2002 et on a obtenu en 2003 des résultats très encourageants. Avec 315.000 logements mis en chantier, c'est depuis 14 ans l'année la plus forte si on ne compte pas l'année 1999 où il y avait un effet de retraite de la disposition Périssol, qui naturellement, elle aussi, un effet incitatif.
Près de 58.000 logements locatifs sociaux ont été financés, soit 55 % de plus que la moyenne de ces dernières années.
L'année également exceptionnelle pour la promotion privée, puisque plus de 100.000 logements ont été vendus pour la location comme pour l'accession à la propriété.
Les perspectives pour 2004 sont d'ores et déjà favorables, puisque le nombre de permis de construire - c'est un bon indicateur - accordés en 2003 atteint près de 380.000 logements, soit une progression, quand même, de 9% par rapport à 2002. Beaucoup de secteurs voudraient avoir ce niveau de croissance de 9 %. L'économie française aussi d'ailleurs.
Mais au-delà de ces premiers résultats encourageants, il paraît encore indispensable de faire encore davantage, et notamment de lever les obstacles à la construction.
D'abord, il faut détendre les marchés fonciers, c'est un point clair, chacun le connaît. Mais il n'y a pas de construction sans disponibilité foncière. Je sais l'inquiétude qui est souvent exprimée par les professionnels du logement pour les perspectives à venir en matière de marché foncier.
La loi "Urbanisme et habitat", que le Parlement a adoptée au printemps dernier, permet notamment, de libérer des terrains urbanisables et de simplifier surtout, c'est cela qui compte, je crois, les procédures de modifications des documents d'urbanisme. Il sera aussi plus facile aux maires, bâtisseurs, de réaliser des projets au services, notamment pour construire, aujourd'hui, dans un certain nombre de villes, où l'on a cessé de bâtir, notamment en raison de la complexité des procédures et de la difficulté de pouvoir maîtriser les sols.
L'Etat doit également contribuer à détendre les marchés fonciers. C'est pour cela que j'ai demandé à G. De Robien, une action déterminée, notamment pour libérer du foncier public en Ile-de-France en mobilisant les établissements publics détenteurs de patrimoine, en particulier la SNCF et RFF. Cela ne pourra pas faire de mal à leur endettement.
L'urgence commande de procéder à cette mobilisation de foncier dans des conditions qui doivent nous permettre de traiter au mieux les charges de dépollution, puisque c'est le sujet majeur que nous avons souvent à traiter et qui grève souvent ces fonciers en périphérie des villes, et qui rend les choses difficiles.
Je demande aux ministères susceptibles de disposer de réserves foncières en zones urbaines, je pense notamment au ministre de la Défense, au ministère de la Défense, de s'associer dès le début de cette initiative, pour que nous soyons en mesure de dresser dans un an le bilan, afin, de pouvoir chiffrer exactement ce qui a pu être dégagé par ce type de procédure. Et éventuellement prendre d'autres mesures si cela ne suffisait pas. Il est essentiel que le domaine public soit libéré. C'est l'intérêt de l'Etat. Le patrimoine de l'Etat est, aujourd'hui, très important, trop important. C'est vraiment dommage de voir que, sur un certain nombre de sites, l'Etat possède les moyens de permettre la construction de logements. C'est l'objectif qu'il nous fait attendre. C'est le premier levier.
Second levier : inciter les collectivités locales à construire.
Avec la loi SRU, il y a eu un dispositif qui était un peu de sanctions, pourrait-on dire. Donc, c'est incitatif naturellement, la sanction. Les pénalités encourues sont significatives en cas de non-respect des règles de la loi. Mais je pense que, en parallèle, il faut considérer une incitation financière comme un élément positif pour inciter les communes à construire. Je sais que certains maires craignent une augmentation des charges pour la commune en termes d'équipement, hésitent à se lancer dans des projets d'urbanisation. C'est pour cela qu'à côté de la démarche quelque peu contraignante, il nous faut une démarche quelque peu incitative si l'on veut pouvoir créer ces logements.
C'est cela, que j'ai demandé aux ministres concernés, notamment, celui de la réforme des finances locales qui est en préparation, M. Devedjian, de rendre les dotations apportées par l'Etat aux collectivités territoriales, notamment, la DSU et la DGE, de faire en sorte qu'il y ait des paramètres incitatifs pour les communes qui veulent construire. C'est un des éléments importants de motivation pour la construction et tenir la construction comme un des objectifs de la dotation de l'Etat.
Troisième levier : il importe que les communes puissent être face à des procédures plus simples et donc, il faut interrompre l'inflation réglementaire qui grève l'acte de construire. Donc, interrompons l'inflation réglementaire, et si j'ai bien compris le débat, la question de l'inflation législative était également posée. Donc, je crois, en effet, que vous êtes dans un secteur où il faut être un champion de la technicité pour pouvoir même déposer un permis de construire. Et il y a là, je crois, des éléments qui sont à simplifier. Je ne méconnais pas l'importance des normes, et notamment pour ce qui concerne : la sécurité, la protection de l'environnement, la qualité de la vie des habitants. Mais l'accumulation de textes peut quelquefois se retourner contre notre objectif collectif, qui est quand même de produire des logements. Donc, à force de nous mettre nous-mêmes un certain nombre de contraintes, il ne faut pas que l'on s'étonne ensuite que l'on a des difficultés à construire. Donc, je souhaite que tout ce que nous aurons à faire pour l'avenir, par voie réglementaire et législative, soit fait avec esprit de simplification et de permettre aux acteurs de pouvoir maîtriser les procédures et de pouvoir ainsi, faire en sorte que - il y a certainement dans la salle des champions de la complexité, qu'ils ne soient pas inquiets pour l'avenir de leur métier. Ne vous inquiétez pas, la complexité de toute façon, il y en a pour un certain temps. Mais enfin, si on pouvait l'alléger quelque peu, dans ce domaine comme dans d'autres, les Français s'y retrouveraient.
Je pense qu'un progrès serait assez accessible, on l'a vu dans d'autres domaines, c'est tout ce qui concerne les risques juridiques inhérents aux opérations de construction ; qui sont probablement devenus excessifs. C'est un peu d'ailleurs, un problème général à la société. Je crois que, comme d'autres sociétés européennes ou occidentales, le recours des tiers est une liberté fondamentale qu'il faut protéger. On peut aussi envisager le recours abusif comme pouvant être sanctionné. C'est un élément important pour que l'on ne puisse engager des procédures qu'avec sens des responsabilité. Parce qu'on en arrive dans une société où les pouvoirs sont tellement partagés, les responsabilités dispersées dans la société, à ce que chacun ait le pouvoir d'empêcher l'autre. Notre problème, c'est de faire ensemble, ce n'est pas d'empêcher les autres. Il faut donc avoir la liberté d'engager une démarche, et notamment un recours, mais il faut être responsable de son recours. Sinon, on risque d'être dans une situation de blocage, je crois qu'il y en a trop.
C'est pourquoi je demande à la Chancellerie et au ministère de l'Equipement, à G. De Robien, de constituer rapidement un groupe de travail pour faire, en ce domaine, des propositions équilibrées en liaison avec les professionnels.
Je souhaite que les professionnels travaillent sur ce sujet pour que l'on puisse définir ce qu'est "le recours abusif", et comment l'on pourrait essayer de maîtriser quelque peu ce type de procédure.
2) Deuxième priorité : intensifier l'effort de réhabilitation
Chacun le sait, c'est très important pour notre pays. Nous avons engagé avec le plan pluriannuel de rénovation urbaine, lancé par J.-L. Borloo, une profonde action, dans 150 quartiers, avec une loi d'orientation et de programmation, pour la ville, avec 600 00 logements pour cinq ans, avec l'Agence nationale de rénovation urbaine, pour une protection des financements, mon cher Pierre, pour qu'il y ait, là, des moyens financiers clairement identifiés. Parce que je crois qu'il faut, dans un certain nombre de domaines, pour l'Etat, pouvoir engager une vision pluriannuelle. L'annualité budgétaire est un élément plus important, mais il y a un certain nombre de programmes et de sujets sur lesquels il faut des visions pluriannuelles. Quand on s'attaque à des sujets aussi complexes que la rénovation de 150 quartiers, il faut avoir une vision pluriannuelle, puisqu'il nous faut, à la fois, reconstruire un dispositif pour faire reculer le mal-logement. Tout ceci est naturellement complexe. Il y a dans ce texte une vraie volonté, notamment pour les Françaises et les Français, qui vivent dans les quartiers les plus difficiles, qui sont en voie de ghettoïsation et que nous devons rebâtir, de reconstruire, avec humanité et avec des procédures qui sont particulièrement efficaces et qui doivent être rapides. C'est pour cela que nous avons fait ce programme pour atteindre nos objectifs sur les cinq ans. C'est un élément essentiel de cette rénovation.
Mais la rénovation concerne également le parc privé :
- Je salue les initiatives de l'agence nationale d'amélioration de l'habitat qui joue un rôle de premier plan sur l'ensemble de ces sujets. Elle a en particulier une action en direction des logements vacants qui est très importante.
Je crois que, sur les logements vacants, il faut qu'on engage, Gilles, une campagne spécifique visant à inciter les propriétaires de logements vacants à les remettre sur le marché rapidement. Je voudrais vraiment qu'on puisse être conscient qu'on ne peut pas rester dans la situation dans notre pays, durablement, où nous avons sans doute près de 500 000 logements vacants dans les zones où il y a une vraie tension sur le logement, c'est-à-dire, finalement, des logements vacants qui représentent une année et demie de constructions.
Je comprends qu'il y a les familles modestes, qui ont leur logement qui est vacant dans l'attente d'une destination. Tout ceci doit être protégé. Mais je vois aussi d'autres formes de logements vacants, sur lesquels il nous faut inciter l'ensemble des propriétaires à pouvoir mettre ces logements sur le marché, car autrement, nous serons devant la nécessité de revoir la taxe sur les logements vacants, de manière à donner des moyens supplémentaires à l'ANAH. Sur ce sujet, je crois que nous n'hésiterons pas. On va se donner un an pour que tout le monde soit bien informé. Mais il est clair qu'à la fois sur la taille des villes, sur le niveau de la taxe, le logement vacant, à condition naturellement de ne pas mettre en difficulté les familles modestes, il est clair que nous devons faire un effort sur ce parc qui aujourd'hui est un parc qui dort, alors que nous avons besoin de ces espaces pour loger un grand nombre de Français qui sont en attente de logement.
- Le gouvernement s'est également attaché à ce que les mesures fiscales d'aide à l'investissement locatif présentées par Gilles de Robien puissent s'adresser au parc ancien, afin de faciliter la remise sur le marché après travaux. Dans les logements vacants, beaucoup ont besoin de travaux, et donc, il y a une incitation là qui est un élément important pour la remise sur le marché.
- Je rappelle - mais je vois qu'il y a des professionnels qui sont ici, qui connaissent cela - que la TVA à taux réduit sur les travaux est une incitation également à mener des travaux, et ainsi à transformer des logements qui sont pas forcément habitables, à les transformer en logements vacants, puis en logement disponible, grâce à la prolongation que nous avons pu obtenir de l'Union européenne, ce de taux de TVA réduit, que beaucoup de professions envient - j'espère que vous êtes heureux de ce taux, je vois tellement d'autres partenaires économiques qui le souhaitent, qu'au moins que ceux qui en bénéficient aient au fond du coeur, un grand bonheur.
C'est toujours pareil : quand ça marche, on n'en entend pas parler, mais quand on ne marche pas, on l'entend. Je vois qu'il y a trois constructeurs dans la salle qui sont motivés. Je les ai reconnus.
Toutes ces mesures sont nécessaires, compte tenu de l'évolution de notre société - je pense notamment à l'urbanisation vieillissante. Prenons en charge la vision de la société française avec le sens de la prospective. Je crois que ce qui est très important en matière de logement comme dans bien des domaines, de mesurer les conséquences sur le logement du vieillissement de la population.
Ce qui me frappe le plus dans ma responsabilité de Premier ministre, c'est de voir à quel point la société française n'a pas anticipé le vieillissement de sa population. Il y a pourtant eu quelques rapports, mais que ce soit sur le sujet des retraites, sur le sujet de la maladie, sur un certain nombre de sujets très important, ce qui se passe est écrit dans les chiffres depuis un certain nombre d'années, y compris en matière éducative. Et y compris en matière de logement. Donc, il faut que nous [...] les décisions que nous prenons actuellement, doivent être des décisions qui doivent s'adapter à la société qui est en train de se construire et qui est en voie de vieillissement, ce qui pose un certain nombre de problèmes qu'il nous faut anticiper.
3) Troisième priorité : renforcer la solidarité en faveur des plus démunis.
Les trois millions de mal-logés dont l'Abbé Pierre fait la cause de sa légitime indignation révèlent les limites de la politique du logement. Nous en sommes d'accord.
L'éradication des situations de mal-logement est au cur du débat que j'appelle de mes vux pour clarifier les responsabilités respectives entre les différents acteurs.
* Les responsabilités de l'Etat, je l'ai dit, doivent être réaffirmées. Je souhaite que, sur un certain nombre de sujets, on puisse montrer que la volonté de l'Etat est vraiment d'être le garant d'un certain nombre d'initiatives. C'est pour cela que je peux vous confirmer que le Gouvernement demandera à l'Assemblée nationale de revenir sur l'amendement transférant aux maires, le contingent préfectoral. Ce n'est pas que je n'ai pas confiance dans les maires. Ne croyez pas que je sois devenu d'un seul coup jacobin. Je pense qu'il y a un moment où l'Etat doit montrer qu'il sait être garant d'un certain nombre de valeurs, sur lesquelles il doit s'engager, et le citoyen doit savoir que l'Etat s'engage. Donc, je souhaite qu'il y ait cet engagement. En revanche, la délégation, par voie de convention, du contingent aux EPCI - les établissements publics de coopération internationale [sic, intercommunale]- doit être rendue possible. C'est un élément très important.
Je souhaite pas que l'Etat fasse tout, et que l'Etat assure les normes, que l'Etat soit capable d'assurer un certain nombre de valeurs, un certain nombre d'exigences, et que sur un certain nombre de sujets, il puisse déléguer. L'Etat définit en amont, évalue en aval et, au milieu, peut déléguer et notamment par convention, c'est ce que nous voulons faire avec les EPCI, parce que c'est, je crois, le niveau intercommunal, comme l'a dit récemment le président de la République, qui paraît le mieux adapté pour être le pilote local de l'action en faveur du logement des plus démunis, en particulier, pour progresser dans la voie du droit au logement opposable, qui est une perspective importante et qui ne peut vraiment se réaliser que par la mobilisation au niveau du territoire.
S'agissant des expulsions, je retiens la proposition du haut Comité pour le logement des personnes défavorisées visant à donner aux EPCI un droit de substitution du locataire défaillant pour éviter à ce dernier, quand il est de bonne foi, d'être expulsé pour impayés de loyer.
La collectivité pourrait ainsi reprendre à son compte, pour une durée limitée, le bail dont la résiliation a été prononcée et assurer le maintien dans les lieux le temps qu'une solution de relogement adaptée soit trouvée. Je demande que ce dispositif soit rapidement mis au point naturellement en concertation avec les collectivités locales.
* S'agissant de la lutte contre l'habitat indigne, en particulier dans un certain nombre de villes, nous ne pouvons pas tolérer que perdurent un certain nombre de situations. Et c'est pour cela que nous mobiliserons dans les tout prochains jours, les préfets afin de mettre en place, avec les élus, les bailleurs et l'ensemble du monde associatif, un plan de bataille pour lutter contre l'insalubrité sur l'ensemble de notre territoire. C'est, je crois, là aussi, essentiel.
Enfin, parce qu'il est des gens qui exploitent la misère de façon inacceptable en offrant des conditions de logement inadmissibles et en refusant les travaux nécessaires, Dominique Perben, le garde des Sceaux et Gilles de Robien, le ministre du Logement, prévoiront ensemble la possibilité de séquestrer les biens de ces marchands de sommeil. C'est là aussi un dispositif important et quelque peu vigoureux.
Les collectivités locales et l'Etat auront désormais les moyens pour réaliser les travaux d'office indispensables lorsque le propriétaire s'entête et fait la sourde oreille.
4) Quatrième priorité : favoriser l'accession à la propriété.
L'accession à la propriété répond dans notre pays à la fois à une demande des ménages et à un intérêt social, car évidemment, il est plus motivant d'entretenir un bien qui vous appartient et qui constitue un facteur de sécurité pour l'avenir. C'est un point très important pour l'équilibre social, pour aider notre société à avoir le goût de l'avenir. On est dans une société qui souvent a peur de l'avenir, qui a peur des changements de repères de la société. Il faut renforcer tous les liens qui peuvent donner confiance en l'avenir, et je pense que le logement est un facteur de sécurité nécessaire à ce goût de l'avenir qu'il faut développer dans notre société.
Le gouvernement, en fait, a fait de tout cela, un des volets principaux de sa politique du logement.
Il a retenu en ce domaine deux séries de mesures :
- je pense à la réforme du prêt à taux zéro dont les conditions sont devenues plus favorables pour les ménages qui en ont le plus besoin.
- je pense aussi au développement de formules innovantes d'accession à la propriété dont les dispositions figureront dans le texte préparé par Gilles de Robien, donc un projet de loi qui s'appelle donc à partir de maintenant, Propriété pour tous. Ceux qui le veulent.
Je souhaite adopter donc ce texte dans l'interministériel, rapidement, pour qu'on puisse le présenter donc en Conseil des ministres, également, rapidement.
Les organismes de logement social ont un rôle majeur à jouer en faveur de l'accession sociale à la propriété grâce à ces nouvelles formules qui devront apporter toute la sécurité nécessaire aux accédants en cas d'accident de la vie.
J'entendais tout à l'heure le président Delebarre dire un élément avec lequel je suis entièrement d'accord, c'est qu'il faut vraiment que tout ce qui peut être fait sans la loi puisse être fait sans la loi. Il faut donc faire l'inventaire de tout ce qu'on peut faire sans la loi, et donc ne consacrer la loi que simplement aux nouveaux droits, aux nouvelles capacités juridiques nécessaires pour les uns et pour les autres, pour favoriser l'acquisition du logement, et notamment par tous ceux qui peuvent le souhaiter, et notamment les locataires HLM. J'ai bien compris qu'il ne fallait pas mettre en opposition, l'accession et la location. J'ai fait assez de réunions avec les organismes de HLM pour savoir qu'il ne fallait pas confondre les deux. Je ne les confonds pas. Mais il est important d'avoir éventuellement des passerelles pour ceux qui le veulent. Donc, c'est ainsi qu'il faut travailler cette ambition sociale que de pouvoir répondre à l'aspiration des familles qui, elles aussi, sont dans la mesure où elles peuvent être inquiètes pour l'avenir face à un besoin, de pouvoir être propriétaires de leur logement, et qu'on puisse leur donner la possibilité de léguer ce capital, ce logement, à leurs enfants.
C'est une ambition sociale elle aussi importante, et il faut assurer aux organismes HLM, les moyens financiers supplémentaires pour construire au profit de nouveaux ménages à ressources modestes, c'est un point clé de l'ensemble de cette politique.
Le projet de loi définira des objectifs globaux en faisant une large place, naturellement, pour adapter les actions des élus aux différentes réalités locales, puisque évidemment l'accession à la propriété, suivant la rénovation des quartiers, par exemple, suivant l'urbaniste, elle prend des formes très différentes, et il faut pouvoir, là, avoir une action très proche du terrain. Je suis très attaché à ce qu'il intègre des dispositions spécifiques pour sécuriser les candidats à l'accession, les préserver du risque de voir se créer des copropriétés dégradées - ça c'est un point-clé - et affecter le produit des ventes au service de la construction nouvelle. Cette accession doit garder sa dimension sociale. Donc, il y a une dimension sociale qui doit rester la fondatrice un peu de cette démarche.
Le projet de loi consacre aussi la vocation des organisations HLM à répondre aux besoins de logement de leurs locataires dans leur diversité. Je voudrais remercier beaucoup le Mouvement HLM non seulement pour tout ce qu'il a pu faire, et notamment ce qu'il a fait dans le cadre des initiatives que nous avons prises pour la rénovation urbaine avec la loi Borloo, mais aussi pour tout ce qui est aujourd'hui engagé, pour qu'il y ait cette ouverture maîtrisée des compétences, parce que cela, je crois que c'est important, en matière d'offre locative, d'accession voire d'aménagement pour les offices et les sociétés qui en ont la capacité, dans le respect, toujours, de la vocation sociale qui est initiale et fondamentale.
Nous avons besoin pour cela de mobiliser l'ensemble des organismes sociaux, les offices comme les sociétés anonymes HLM.
Je crois enfin que l'accession à la propriété gagnerait à emprunter des voies nouvelles.
Pourquoi ne pas envisager que l'on puisse devenir propriétaire de son logement sans acquérir la propriété du sol sur lequel il est construit ? Il nous faut être créatifs sur ces sujets, car il est évident qu'un certain nombre de questions, aujourd'hui, ne pourront être résolues que si nous trouvons des solutions innovantes et, très souvent, naturellement, le problème du foncier est un obstacle majeur. D'ores et déjà, des collectivités locales sont prêtes à s'engager dans des formules innovantes pour loger leurs habitants à moindre coût. Je souhaite qu'on puisse les encourager dans cette démarche.
Je crois aussi qu'une modernisation du régime de l'hypothèque, qui est rigide et qui est coûteux en France plus qu'ailleurs, devrait pouvoir permettre de faciliter la portabilité des crédits en cas de changement de résidence principale. Ceci est aussi nécessaire.
Les formules permettant de mobiliser des ressources financières gagées sur le logement que l'on occupe, qui sont en usage dans des pays où le marché hypothécaire est moderne et développé constitueraient, je le crois, une liberté de plus à offrir à nos concitoyens. Gilles de Robien et Alain Lambert, avant l'été, feront des propositions dans ce domaine. Je pense que c'est important d'avoir une adaptation de nos dispositifs.
Telles sont les réflexions que je souhaitais partager avec vous en ce début d'année marqué par un certain nombre d'initiatives, et notamment par les propos prononcés par le Président de la République en matière de logement, quand il s'est adressé aux " forces vivres " mais aussi par la mobilisation réclamée avec force par l'Abbé Pierre, tout récemment. Je souhaite que l'on puisse s'engager vraiment dans une politique moderne du logement, avec cette volonté de placer le logement au coeur même de la société. C'est au coeur de la société qu'il nous faut bâtir cette nouvelle vision du logement. Le logement, c'est le lien social, le logement appartient donc à une vision humaniste de la société. C'est pour cela que je crois vraiment qu'il faut en faire une priorité de ce début du 21ème siècle. Je vous remercie de votre attention.
(Source http://www.premier-ministre.gouv.fr, le 16 février 2004)