Texte intégral
Merci, j'avais besoin d'un programme, le voilà.
Je voudrais vous saluer toutes et tous et remercier le président Bockel de son invitation.
En cette période particulièrement grave dans le monde, je crois qu'il est important que nous fassions preuve, à la fois, de conscience des événements, mais en même temps d'une détermination complète de façon à ce que nous puissions, nous, responsables publics, assumer les responsabilités qui sont les nôtres avec sérénité, avec calme, détermination, sans bousculer nos agendas mais en veillant vraiment à la cohésion nationale et aussi à la sécurité des Français. C'est pour cela que j'ai trouvé que cette rencontre avec les maires, aujourd'hui était tout à fait dans l'actualité, parce que les maires sont les premiers militants et de la cohésion sociale et les premiers exposés aux questions de sécurité qui sont les deux grandes préoccupations auxquelles nous devons être particulièrement vigilants en ce moment.
J'ajouterai, que puisque nous sommes dans cette Journée mondiale contre le racisme, c'est souvent aussi les maires qui sont en première ligne contre le racisme, contre l'antisémitisme. J'ai vu beaucoup d'entre vous engager des actions au niveau local. Vous-même, Monsieur le Président, vous êtes monté très souvent en ligne sur ce sujet, et je voudrais saluer votre action et vous encourager, en cette période où les bruits du monde grondent de toujours faire inlassablement la guerre au racisme, la guerre à l'antisémitisme, la guerre à tout ce qui est intolérance, non respect des autres. Et je crois qu'au fond, la ville est le lieu où l'on peut mieux avoir conscience de l'autre, aller au devant de l'autre. La ville fait partie de cet élément de cohésion républicaine, et je voudrais vous remercier, Mesdames et Messieurs les Maires, de cette action que vous menez pour cette cause qui est au fond au cur de notre pacte républicain.
C'est pour cela que je crois que, aujourd'hui, cette réunion est - au-delà de votre besoin de réforme et de soutien, puisque la considération, elle, est acquise -, cette réunion est la bienvenue.
Il me faut donc transformer un cri d'alarme en un nouvel espoir. Je crois que c'est faisable. Dans la période actuelle, je crois avoir des tâches plus difficiles. Ceci me paraît faisable parce que je voudrais vraiment vous dire que la vision que nous avons de la décentralisation, c'est une vision qui place la commune en général, la ville en particulier, dans la destination de la décentralisation. La décentralisation, ce n'est pas, de mon point de vue, le partage des responsabilités, voire des pouvoirs, ce n'est pas la distribution de responsabilités dont l'Etat se déchargerait et qu'il attribuerait à tel ou tel. C'est l'organisation de la responsabilité, dans notre République, au plus près du citoyen, au plus près du terrain, notamment là où sont les élus de proximité. Et quand je dis cela, je sais très bien que la région peut être facteur de décentralisation, mais qu'elle est aussi facteur de centralisation. Et quelquefois, vu de Grenoble, un transfert de Paris à Lyon n'est pas forcément un progrès, voire un transfert de Paris à Poitiers pour Jonzac - pour parler à monsieur le maire de Poitiers un langage qu'il connaît bien.
Mais, au fond, ceci est vrai aussi du département et quelquefois même de certaines agglomérations. Ce qui est très important, c'est d'aller au bout du cheminement de la décentralisation, c'est-à-dire rapprocher la décision du citoyen au plus près du terrain. C'est pour cela que je ne crains pas pour la place des villes dans ce processus, car nous ferons toutes les pressions nécessaires sur les structures intermédiaires pour que la responsabilité descende. Ce qui nous paraît très important aujourd'hui, pour rendre notre République plus vivante, c'est de faire en sorte que les responsabilités soient mieux partagées. C'est quand les responsabilités sont confuses, quand les démarches sont opaques que les Français doutent de nos systèmes publics. C'est quand ils ne connaissent pas les responsables, c'est quand ils trouvent les procédures très lentes et qu'ils ont du mal à percevoir vraiment où est le décideur, où est le guichet, où est le responsable auquel on peut s'adresser, voire que l'on peut sanctionner.
Donc, dans la vision de la décentralisation qui est la nôtre, je voudrais bien que vous soyez convaincus que la ville, la commune, dernier espace avant le citoyen, est le lieu de la plus grande proximité. Donc, c'est la destination de la réforme. Et toutes les étapes intermédiaires, que ce soit l'Etat, que ce soit la Région, que ce soit le Département, doivent faire en sorte que le principe de subsidiarité que nous faisons entrer dans la Constitution aille jusqu'au plus proche du citoyen ; donc son premier espace de solidarité pour ce qui concerne notre organisation territoriale, c'est-à-dire la ville.
Cela, c'est un point de principe très important, et je veillerai personnellement à ce que cette décentralisation ne soit pas transformée en un esprit féodal qui bloquerait la décentralisation à certains niveaux pour pouvoir organiser la prise de pouvoir sans qu'elle aille là où elle doit aller, c'est-à-dire vers le citoyen, c'est-à-dire soutenir la République. Nous avons tous en tête le printemps 2001, cet appel à la République, ce scepticisme sur la capacité de faire vivre les valeurs liberté, égalité, fraternité, oui, ces belles valeurs, ces grandes valeurs, mais sont-elles accessibles aux citoyens ? Il faut que la décentralisation permette à la République de mettre ces valeurs en accès libre aux citoyens. C'est pour cela que je suis très déterminé à ce que l'on trouve bien, ensemble, la place de la ville dans le sujet, et je ne suis pas du tout complice de tous ceux qui mettront de l'esprit féodal dans la décentralisation.
La décentralisation est républicaine. Elle doit nous permettre de définir clairement les responsabilités de l'Etat, que l'Etat définisse bien, ses missions régaliennes c'est évident, mais au-delà de cela, la cohésion sociale, l'équité, l'égalité entre les Français, les valeurs de la République. L'Etat a ses responsabilités. Il délègue pour que les décisions soient prises au plus près du citoyen et, là, il s'agit donc d'aller dans tout ce qui peut aider le citoyen à avoir accès aux services publics notamment, le plus près de chez lui, c'est-à-dire dans la ville.
J'ai vu les résultats de l'étude de la DATAR et je crois qu'il est très important de refaire de la ville, dans notre culture territoriale nationale, un succès. Je pense que c'est très important de mesurer que, finalement, la ville a ses propres problèmes. Nous en parlerons tout à l'heure, à propos notamment, de la politique que mène J.-L. Borloo, et des projets que nous avons de lois de programmation et d'orientation -, mais nous voyons bien qu'il y a des difficultés majeures dans la ville ; nous voyons bien, grâce à l'étude de la DATAR, que quand on s'analyse, ville par ville, on s'inquiète, quand on se compare au niveau européen, quelquefois, on se rassure. Car l'attractivité de rayonnement, elle est très, très forte. Et quand on regarde dans cette période de crise aujourd'hui, par exemple l'importance de la culture dans la cohésion sociale - je vais vous parler de lutte contre le racisme -, l'importance de la vie culturelle, qui sont les principaux acteurs culturels aujourd'hui dans notre pays, au quotidien ? C'est l'alliance entre la ville et la vie associative, et des concours qui sont apportés par l'Etat, par les autres collectivités. Mais c'est cette cohésion-là, qui s'exprime dans une pratique culturelle de haut niveau, qui justifie que nos villes ont un fort rayonnement.
Mais c'est vrai que nous avons, avec nos villes, des capacités importantes de rayonnement de la France, même si, dans les trente dernières années, on a eu, peut-être, le tort de faire en sorte que Carcassonne, La Rochelle, Annecy - qui sont, pour prendre des villes particulièrement ... Mais je pourrais prendre Boulogne, Perpignan et toutes les autres - que toutes ces villes - quand on est à 15 kilomètres, se ressemblent toutes parce qu'elles ont toutes les mêmes niveaux de grandes surfaces et les mêmes zones périphériques. Ces villes finalement, sont toutes différentes dans leur cur, mais quelquefois semblables dans leurs horreurs. Mais laissons, nous corrigerons cela.
L'essentiel est quand même de s'appuyer sur les forces qui sont ses capacités de rayonnement économique, social et aussi culturel. De ce point de vue-là, je crois que l'étude de la DATAR peut être la première étape, mon cher Nicolas, Monsieur le Délégué, pour participer dans notre pays à une revalorisation culturelle du fait urbain qui ne doit pas apparaître comme ce qui serait la cause d'une nostalgie sur une mutation qui est passée du rural à l'urbain, mais qui est un projet d'avenir, un projet qui a ses forces et ses grandes capacités. Je crois qu'il y a là, un élément très important, même si je ne nie pas les problèmes de la ville. Mais les problèmes de la ville, nous les plaçons dans la ville ; mais, en fait, ce sont les problèmes de la société française qui se trouvent localisés dans la ville ; mais ce n'est pas la ville qui est problème, c'est le problème lui-même qu'il faut résoudre.
Je voudrais également ajouter, dans cette démarche de succès, le succès de l'intercommunalité parce que, au fond, la ville portait souvent des capacités identitaires qui pouvaient conduire à des jalousies territoriales et pouvaient conduire à, finalement, des difficultés de travailler ensemble et au manque de solidarité. Et finalement, la preuve a été faite, quand on regarde notre organisation territoriale, que les lois sur l'intercommunalité ont été un grand succès, que les élus ont su se rassembler, dégager des cohésions, dégager des cohérences, bâtir des projets et faire en sorte que le citoyen, globalement, s'y retrouve dans l'intercommunalité. Alors, je sais qu'on pourrait faire un pas supplémentaire pour faire en sorte qu'il puisse y avoir une élection sur ce sujet. L'expérience des commissions que j'ai, y compris celle présidée par monsieur Mauroy, laisserait à penser qu'il y a une assez forte propension à aller dans cette direction ; l'expérience que j'ai de la vie sénatoriale de l'autre, me fait penser qu'il y a quelques résistances. Il faudra concilier les deux, c'est pour ça qu'il faut débattre de cette question, elle est importante, elle pose la question de légitimités : la légitimité électorale, la légitimité collégiale. L'ensemble de ces sujets doit être posé, il faut en débattre de manière sereine. C'est un juste débat de démocratie locale qui doit être posé et dont on ne doit pas avoir peur. Cela dit, reconnaissons tous ensembles, et je suis le premier à le faire, le succès de l'intercommunalité.
Dans ce dispositif, je voudrais vraiment vous dire que la ville a sa place dans notre architecture des responsabilités publiques dans notre pays, qu'elle n'est pas le parent pauvre de la décentralisation, qu'elle est, au contraire, la destination d'un processus de décentralisation qui rapproche la décision du terrain, que nous considérons que nous avons un devoir de valorisation du fait urbain pour ne pas le laisser se désintégrer dans l'image des Français, et de faire en sorte qu'il puisse avoir toute sa place dans l'organisation des responsabilités dans notre pays.
Alors, je vais répondre sur les demandes que vous avez exprimées. Un point - je commence par le désaccord parce que, sur tout le reste, je serai d'accord - de désaccord qui est le problème du chef de file. Je crois que là, il faut éviter que le citoyen soit perdu dans la responsabilité des projets, notamment. Je ne suis pas hostile aux financements croisés. Ce serait absurde, on voit bien que c'est tous ensemble, quand on peut mobiliser tous les acteurs autour d'une table, que l'on arrive à bâtir quelque chose. Mais je crois qu'il faut une responsabilité de bonne fin, c'est souvent le maître d'ouvrage ; mais il faut une responsabilité de bonne fin, non seulement pour que le projet aille à son terme, mais il faut aussi qu'il y ait quelqu'un qui rassemble. Et d'ailleurs, quand on construit, par exemple, un auditorium, il y a un chef de file de fait, il y a quelqu'un qui est au centre du dispositif, qui est en général le maire puisque c'est sur son terrain que ça se passe et que c'est lui qui a les services, et qui, finalement, est quand même celui qui recevra les compliments ou les critiques des citoyens. Même le maire reçoit les critiques quand le département augmente ses impôts. Cela n'a échappé à personne, y compris, d'ailleurs, aux présidents de départements qui ont bien compris le sujet.
Le maire est donc évidemment celui qui est en premier contact avec le citoyen. C'est pour cela que je pense que, plutôt que de dire stoppons les financements croisés, faisons en sorte que, globalement, quand il y a contrat, il y a une collectivité territoriale qui, pour les autres, est chef de file. C'est un point très important - je pense notamment à l'évaluation. Les Girondins doivent être favorables à l'évaluation, et l'évaluation, c'est le moyen que nous avons, les uns et les autres, pour que le citoyen, mais en même temps l'ensemble de notre système public, puisse avoir confiance dans notre capacité à bâtir des projets, à exécuter des projets selon les règles de financement et de procédure, qui sont celles de la République. Il faut donc favoriser l'évaluation. Mais quand vous êtes tous autour d'une table, si vous voulez vous protéger - vous, vous êtes département ou région ou ville -, et que vous allez faire faire des audits sur votre partenaire, ce n'est pas très courtois, ce n'est pas très élégant de dire : je vais vérifier comment mon partenaire gère la manière dont il construit ce projet, par exemple.
Je pense que celui qui est chef de file doit prendre en charge les dispositifs d'évaluation de l'ensemble du système, et cela fait partie de sa responsabilité de chef de file. Il y a un certain nombre de sujets que nous allons travailler dans les textes législatifs. Il ne s'agit pas de créer une hiérarchie définitive, mais sur un projet que, dans l'organisation du projet, dans sa gouvernance, je dirais, mais aussi, dans sa relation avec le citoyen, que le citoyen sache qu'il y en a un parmi les acteurs qui a la responsabilité de bonne fin et auquel on peut s'adresser pour faire en sorte qu'il y ait une gestion qui soit correcte et donc aux normes de notre gestion publique.
Dans ce contexte-là, je pense qu'il y a trois types de compétences qui vous concernent. Premièrement, les compétences qui peuvent vous être directement déléguées, de l'Etat aux villes, ou agglomérations, communauté de villes. Les compétences qui peuvent vous être déléguées par le département et la région, et les expérimentations.
Je commence par les expérimentations. Je suis ouvert, je l'ai dit, à ce qu'il y ait des expérimentations qui se fassent dans la ville pour faire en sorte que, dans l'agglomération, on puisse expérimenter là où la réforme est difficile - ça, c'est gentil d'allumer un peu que je voie la salle, la France aux 500 visages. Je crois qu'il faut qu'on puisse expérimenter, c'est vrai qu'il y a un certain nombre de sujets qui sont très importants. Nous avons passé, Monsieur le Premier Ministre, Pierre Mauroy, en Conseil des ministres, mercredi, un Traité solennel entre la France et la Belgique pour autoriser les collectivités territoriales de Belgique, les communautés et la France à participer à un dispositif partenarial sur lequel, déjà, vous étiez bien avancé. Et ce Traité, je ne sais pas depuis combien de temps vous l'attendez, mais depuis un certain temps, et je crois qu'il doit pouvoir permettre de participer à un certain nombre d'initiatives qui soient des initiatives de responsabilités. Mais naturellement, on peut faire ça par expérimentation suivant les circonstances, on peut faire ça aussi de manière générale ; est au choix des uns et des autres. Je suis donc très ouvert aux expérimentations.
Il y a notamment, un sujet très important que je considère, qui est le sujet de l'insertion. Vous en parlez un petit peu quand vous parlez de prévention spécialisée qui comprend une partie quelquefois d'insertion, mais on voit bien que le domaine de l'insertion est un domaine dans lequel tout le monde intervient. L'insertion, la région est acteur de l'insertion quand elle est acteur de la formation. Le département est acteur de l'insertion quand il est acteur des prestations sociales. Et la ville, finalement, est acteur de l'insertion, d'abord, parce que c'est elle souvent qui fait fonctionnement la mission locale, ou les structures diverses et variées qui interviennent dans le dispositif d'insertion, qui sont liées, souvent, à l'équipe municipale, qui sont liées aux services municipaux, et c'est souvent la ville qui gère, quartier par quartier, les antennes qui permettent d'avoir le contact avec le citoyen sur la politique d'insertion. L'insertion, c'est vraiment un sujet, je crois, sur lequel on doit pouvoir avancer et on doit pouvoir faire en sorte qu'il y ait des capacités donc spécifiques d'expérimentations pour voir comment, dans une ville, on peut mettre tous les partenaires ensemble pour faciliter l'insertion dans toutes ses dimensions, sociales, économiques, professionnelles.
Je pense qu'il y a là des possibilités d'expérimentations qui sont ouvertes. Il y a d'autres sujets qui sont ouverts à l'expérimentation. Je pense à un sujet qui m'a été proposé par monsieur le maire de Lyon - je devrais dire le président d'agglomération - sur ce sujet, qui est : comment avoir, quel statut peut-on avoir avec une commune qui n'est pas membre de l'agglomération mais avec laquelle on peut développer un projet d'envergure d'infrastructure ? Il y a des liens à trouver pour faire en sorte que, quand une agglomération qui bâtit une infrastructure à destination de valorisation de l'agglomération, mais qui est obligée d'associer un deuxième cercle, comment ce deuxième cercle participe et à des retours, et à des dialectiques, financières notamment, avec le premier cercle de l'agglomération. C'est un sujet sur lequel, je crois, qu'on peut faire des expérimentations. Parce qu'on comprend bien qu'il peut y avoir, il y aura de plus en plus, avec l'exigence sur les grandes infrastructures, c'est vrai notamment des aéroports, ça peut être vrai d'autres infrastructures, des discussions entre l'agglomération et son environnement. Voilà pour ce qui est le sujet de l'expérimentation qui peut se faire au niveau de la ville.
En ce qui concerne les transferts qui peuvent se faire avec le département. Le département aura une forte responsabilité en matière de logement. Le département aura un certain nombre de responsabilités, je pense également aux routes. Il y a des routes nationales dans les villes, c'est le cas, je crois, dans l'agglomération lilloise. Donc il serait normal que le département délègue à l'agglomération la gestion de cet axe qui est une route nationale mais, en fait, qui est une voie urbaine dans la réalité, dans la pratique. Et donc je pense qu'il faut aller au bout du dispositif, à chaque fois : quand on sera dans l'agglomération que le département puisse aller jusqu'à confier, par cette délégation-là, des compétences aux collectivités territoriales, communes ou agglomérations.
Il y a là, je pense, des initiatives qui peuvent être prises, également en ce qui concerne les compétences de la région sur le plan du développement économique, je pense sur la gestion de zone économique, sur la gestion de tout ce qui est le dispositif d'accueil, y compris dans les télécommunications pour le système de haut débit dans des zones importantes, qui sont des zones d'accueil, pour qu'on puisse développer une attractivité de la ville. Je pense que celui qui est le maître d'ouvrage de la zone économique en question doit pouvoir avoir des responsabilités, et la région aurait tout intérêt, dans ce cas-là, à déléguer ses politiques de soutien et d'aides, dans ces politiques économiques, à l'acteur de terrain qui est l'aménageur qui gère l'attractivité d'une zone, et notamment les moyens d'attractivité de cette zone, et je pense notamment aux VRD, d'une part, mais aussi naturellement aux télécommunications.
Dans ce que vous avez demandé tout à l'heure, Monsieur le Président, je crois que nous sommes d'accord pour le logement étudiant, nous sommes d'accord pour un transfert direct. Je pense que là, il y a un point important, je pense qu'on aurait intérêt à avoir une discussion avec la région, quand il y a plusieurs universités par région, pour avoir un schéma régional, mais je pense que cette bataille-là est une bataille très importante et pour nos villes et pour notre pays. Je pense vraiment que nous ne sommes pas, aujourd'hui, suffisamment mobilisés sur l'avenir de l'accueil de nos universités. Nous sommes très mobilisés sur la qualité de l'enseignement, très mobilisés sur les moyens de recherche - et encore, il y a beaucoup de choses encore qu'il reste à faire -, mais nos universités vont être surdimensionnées par rapport au flux démographique qui est actuellement correspondant à leur zone d'influence. Donc notre seule façon de faire face - parce qu'on ne va pas reculer dans notre mobilisation de formation, tout le monde est d'accord pour dire que la clé de l'avenir, c'est la formation tout au long de la vie ; on ne va fermer ni des universités, ni des lycées. Ce serait, je crois, absurde d'avoir cette démobilisation. Tout notre problème est de les ouvrir, de les ouvrir géographiquement, de les ouvrir professionnellement, de les ouvrir sociologiquement, de les ouvrir à un certain nombre de nouvelles formes d'éducation et de formation ; là, toutes ces ouvertures passeront toujours par un problème de logements, car dès qu'on sortira pour parler de l'attractivité, que ce soit les étudiants étrangers, les chercheurs étrangers ou les gens qui, au-delà du bassin d'emploi, peuvent venir à l'université, tout cela passera par l'accueil étudiant.
Et donc, je pense qu'il y a là une vraie priorité qui est une priorité urbaine parce qu'on est auprès de la ville, parce que je crois vraiment que l'université est un élément clé du développement et du rayonnement d'une ville, et je pense que l'université est bien dans sa ville. Elle est bien dans sa ville parce que ce sont ses racines. On peut être l'Université de Strasbourg, on peut être une université à Lyon, sa ville, c'est un point d'ancrage, mais on ne se laisse pas enfermer. Un département, ou une région quelquefois, pourrait donner le sentiment que l'université, dont l'ambition est, par définition, comme son nom l'indique, universelle, l'université n'est pas régionale ; une université, elle a un ancrage, elle a des partenariats, mais elle a une dimension, une vocation qui dépasse les limites du territoire. Donc l'université est bien comme référence dans sa ville, et c'est pour ça, je crois, qu'il faut que le logement des étudiants, qui est une priorité nationale, puisse faire partie des dispositifs transférés de manière systématique.
Je pense qu'il peut aussi faire en sorte qu'on puisse, comme vous l'avez demandé, sur l'éducation spécialisée, la prévention spécialisée, je pense que là, je suis d'accord pour qu'il y ait des transferts systématiques et qui soient dans les lois de transfert. Je pense qu'on peut aller loin sur ces sujets avec le débat ouvert sur l'insertion, avec expérimentation, comme vous l'avez souhaité. Je pense également que nous devons ouvrir, je le disais tout à l'heure, mais d'une manière générale les accords, et notamment les accords internationaux, je pense que c'est un des éléments importants de l'attractivité de la France de faire en sorte qu'on joue la carte de nos villes pour parler de l'attractivité de la France, c'est un élément très important.
Donc en ce qui concerne les transferts, que ce soit les transferts du département et de la région sur la ville, dans le cadre d'un processus de décentralisation qui va jusqu'à destination, que ce soit les transferts directs de l'Etat, il n'y a aucune raison d'abandonner la ville. Quant au Parlement, nous défendrons ces textes, ils seront dans le projet de loi que vous proposera le Gouvernement. Il pourra aussi être ajouté des amendements sur ces différents sujets par vos représentants. Je voudrais dire, évidemment, que la décentralisation à elle seule ne constitue pas l'ensemble de la politique que nous devons mener pour la ville. Je voudrais dire, d'abord, sur le plan financier, j'ai bien entendu vos demandes, j'ai bien entendu la réforme de la DGF. Je vois qu'il est nécessaire, et nous l'avons dit à plusieurs reprises, de fusionner les différentes dotations. Je vois qu'il est très important - et monsieur le président du Comité des finances locales nous a mis ça dans notre logiciel central, ce qui est le plus important - c'est de décentraliser des processus fiscaux plutôt que des dotations puisque notre objectif de décentralisation est un objectif de responsabilisation des acteurs. Et donc, c'est un point important, un groupe de travail se réunit sur ces sujets et fera les propositions pour que, en temps utiles, on puisse mettre dans ces réformes la dimension financière. Mais il est clair qu'aucun gouvernement, jusqu'à maintenant, n'est allé aussi loin que nous en plaçant le problème au niveau de la Constitution, ce qui fait que toutes nos réformes seront obligées de passer par ce filtre-là ; et que le jour où on voudra faire une réforme qui est de décharger l'Etat sur une collectivité sans mettre les financements à côté, le Conseil constitutionnel jugera inconstitutionnelle la loi. Et donc là, nous sommes dans un dispositif où la réforme des finances locales est en fait dans la réforme de la Constitution.
Nous nous sommes mis, naturellement, face à un défi considérable. Je sais même qu'il y en a certains qui ont voté la Constitution rien que pour ça, pour nous obliger à faire la réforme, ça ne m'a pas échappé, mais je crois que comme cette réforme était nécessaire, je pense qu'il est important de se donner cette contrainte-là parce que s'il n'y a pas cette contrainte-là, on verra toujours la réforme des finances locales reportée de gouvernement en gouvernement, de législature en législature. C'est pour ça que nous voulons le faire, c'est pour ça que nous avons mis les différents éléments, ce principe de fiscalité, ce principe de compensation, ce principe de péréquation, et quand je dis péréquation, je vois bien combien le sujet est difficile. Et je sais bien qu'on a encore beaucoup de travail à faire, parce que la péréquation, c'est un problème national ; ce sera même, après 2006, un problème européen encore, mais c'est un problème national, c'est un problème régional parce qu'à l'intérieur d'une région, il y a per aequae ". C'est un problème départemental, c'est un problème urbain entre les quartiers. Donc la péréquation, c'est un problème qui se décline comme la décentralisation : du sommet jusqu'au citoyen. Donc là, nous avons un certain nombre de réformes qui sont des réformes nécessaires pour lesquelles nous sommes au travail et pour lesquelles nous voulons tenir le calendrier pour être prêts, pour ce premier rendez-vous très important qu'est le nôtre, le 1er janvier 2004.
Il y a aussi tout ce que nous voulons faire sur les problèmes d'aménagement du territoire et de la ville dans son territoire. Là, je crois qu'il nous faut essayer de simplifier un peu l'ensemble de ces dispositifs, dont je reconnais qu'ils ont leur cohérence, mais pour lesquels il est évident qu'il y a des difficultés importantes: d'abord pour le citoyen mais aussi pour les élus. Et donc là, il est très important de bien organiser cette réflexion. Nous avons mis au travail les deux délégations d'aménagement du territoire de l'Assemblée et du Sénat sur le sujet. Je crois qu'il est important d'accepter l'idée, évidemment, qu'au-delà de l'agglomération, il y a une relation particulière avec l'agglomération. Cette dialectique-là doit être organisée : qu'il y ait un périmètre, à l'extérieur de l'agglomération, qui puisse être un périmètre où on pense un aménagement spécifique. Il faut organiser la relation avec les autres structures intercommunales, naturellement, qui sont à la périphérie de l'agglomération et qui estiment que c'est quelquefois un impérialisme de l'agglomération que de vouloir prétendre à aménager au-delà de ses propres limites. Donc là, il faut qu'on organise la dialectique entre le pays, ou l'autre agglomération, et l'agglomération, mais c'est un sujet qui est très important. En tout cas, le gouvernement reconnaît tout à fait volontiers qu'il y a nécessité d'organiser la relation entre l'urbain et le rural, tout ce périurbain qui est autour de l'agglomération, qui vit en général avec l'agglomération, dont l'agglomération est le coeur et pour lequel il faut organiser la relation. C'est un élément très important.
Je voudrais dire que, avec Jean-Louis Borloo, nous voulons nous engager dans une vraie politique d'humanisation de la ville. Nous voulons sortir de cette logique où la politique de la Ville est une politique de quartiers. Pour cela, il faut faire en sorte qu'on puisse corriger toutes ces injustices qui sont rassemblées, concentrées dans les quartiers. S'il y a quelque chose dont la République ne peut pas être fière, c'est bien de la vie dans ces 750 quartiers où, aujourd'hui, on voit que tout est plus grave qu'ailleurs, que tout est plus compliqué qu'ailleurs ; et qu'on voit bien, quand on parle de chômage, quand on parle de maladie, quand on parle de délinquance, tous les maux de la société, tous les maux de la personne se trouvent concentrés dans un certain nombre de territoires pour lesquels on voit bien qu'on a à repenser l'ensemble du dispositif. C'est pour ça que nous voulons créer ces 200.000 logements nouveaux réhabilités. Ce qui veut dire qu'il faut restructurer complètement ces différents quartiers. C'est pour ça qu'il nous faut à la fois mutualiser les interventions et à la fois faire en sorte que nous soyons capables d'avoir un guichet unique national pour faire en sorte qu'il y ait cette capacité à réorganiser avec une ingénierie nationale, mais aussi avec les acteurs locaux évidemment de la ville, mais qu'on puisse vraiment s'attaquer à la vie dans ce type de dispositif, tellement elle est aujourd'hui une vie difficile, une vie souvent insupportable et une vie qui est à la source de bien des difficultés de la ville.
Enfin, je voudrais dire que tout ce qui peut concerner le personnel - et je pense que là, il est très important de mesurer combien les villes ont une expérience, une bonne expérience de la gestion des fonctionnaires - et je voudrais vraiment dire aux maires, et au-delà, à l'ensemble des personnels communaux, qu'ils peuvent être fiers et du travail qui a été accompli et des procédures qui sont celles aujourd'hui de notre Fonction publique territoriale, même s'il y a beaucoup de choses à améliorer, mais du dialogue social dans les villes, de l'ensemble des procédures qui ont été... et André Rossinot sait mieux que quiconque tout le travail qui a pu être fait dans cette Fonction publique territoriale. Quand je vois les autres fonctions publiques, on me cite souvent en exemple des procédures qui existent dans la Fonction publique territoriale. Et quand je vois, ce que je comprends bien, certains personnels qui relèvent de la Fonction publique nationale être inquiets de pouvoir passer sous l'organisation de la Fonction publique territoriale, j'ai envie de leur dire : mais regardez, allez interroger vos propres collègues, regardez comment les choses fonctionnent. On peut être aussi dévoué à l'intérêt général, aussi dévoué aux valeurs de la République, aussi dévoué à la France et à ce qu'elle peut porter, en servant une collectivité territoriale qu'en servant l'Etat. Et on sert, là, la République et ses valeurs, et nous faisons en sorte que, dans nos villes, dans l'ensemble de nos collectivités territoriales, il y ait ce respect, cet engagement et, au fond, cette reconnaissance des différents métiers au-delà de la mission. Et je crois que c'est très important d'essayer d'avoir cette pédagogie, mais aussi de faire un certain nombre de réformes pour pouvoir les convaincre. Là, nous avons besoin d'un dialogue social renforcé pour, naturellement, en permanence, essayer de convaincre. Mais je pense que c'est un des éléments très importants de la décentralisation. Si on dit aux Français qu'on décentralise et que les personnels qui, auparavant, faisaient ces missions, ne les feront pas sous l'autorité de la collectivité territoriale, on ne sera pas crédible sur la décentralisation. Et donc si on dit que les personnels, aujourd'hui, qui sont en charge de la décentralisation, sont en charge de ces missions qui, hier, étaient des responsabilités de l'Etat, qui demain seront la responsabilité des collectivités territoriales, ces personnels seront autant respectés, leur statut sera autant respecté - on leur laissera le choix - et en plus, ils seront gérés dans la proximité.
Et même, franchement, pour les plus revendicatifs, est-ce qu'il ne vaut mieux pas avoir un patron plus près qu'un patron très loin ? Vraiment, il faut leur expliquer ça. Moi j'ai vu une expérience là-dessus : la CGT et la réforme du transport régional ferroviaire. Au début, ils étaient tous contre : c'était une réforme. Et puis un jour, ils se sont aperçus que, au niveau régional, finalement, il y avait des personnes identifiées et que les pressions sur ces personnes-là, c'était quelque chose qui pouvait s'organiser assez facilement, et que les discussions, elles étaient franches, cordiales, identifiées et pas anonymes. Et d'un seul coup, on a vu progressivement la CGT devenir un grand militant de la réforme. Peut-être que monsieur Gayssot y a aidé, j'en suis sûr. En tout état de cause, il y a eu une réforme de la régionalisation du transport ferroviaire qui s'est faite, après expérimentation, avec l'accord des partenaires sociaux. Alors, l'expérimentation était très importante parce que ça a permis à tout le monde d'apprivoiser les procédures, d'apprivoiser les partenaires et de faire en sorte que l'on puisse mieux savoir là où on allait, et ça, je crois que c'est un élément très important pour rassurer ; finalement, c'est souvent en traçant la perspective et en associant les acteurs, les usagers, l'ensemble de ceux qui sont concernés à la réforme, que l'on peut le mieux atteindre son objectif. C'est pour ça que le dispositif me paraît très important.
En résumé et pour terminer, je voudrais vous dire que je serai très attentif, et je suis prêt, Monsieur le Président, à continuer le dialogue avec vous. C'est un sujet très difficile que nous avons à traiter ensemble puisqu'il s'agit, en fait, d'une réforme de l'Etat dont la décentralisation est la première grande étape, la simplification en est une autre, la loi organique en est une troisième, et un certain nombre de fonctions vont suivre en terme de réformes. Mais je crois vraiment que cette réforme-là, elle est, pour les villes, une chance extraordinaire. Vous trouverez votre place dans ces responsabilités, parce que c'est une réforme pour la proximité, et qu'il n'y a personne de mieux placé que la ville pour assumer cette fonction de proximité. Alors, c'est vrai que, dans notre pays, le débat de la décentralisation a très souvent été posé dans des termes classiques, et je dirais traditionnels, entre départements et régions, et c'est comme ça que souvent s'est posé le problème. On voit bien que la société française, entre-temps, a bougé, et qu'il y a eu l'émergence des grandes agglomérations et qu'il y a l'émergence du fait urbain, on voit bien cette évolution et qu'aujourd'hui la ville est au coeur de cette France des proximités que nous voulons bâtir. Et donc, nous ferons tout pour que dans les lois de transfert, dans les lois d'expérimentation, dans les lois financières, vous puissiez avoir toute votre place dans ce dispositif. Il serait absurde de penser qu'aujourd'hui, alors qu'une majorité de Français vit dans la ville, on ne mette pas la ville au coeur d'un processus de proximité, et on sait bien que c'est là où se gère cette relation avec le citoyen qu'est la première, je dirais, des actions démocratiques. C'est aussi, là, où le citoyen a pour la politique le plus d'estime. Il serait donc absurde, pour un gouvernement, de ne pas prendre en compte à la fois le besoin d'efficacité et la considération qu'a le citoyen pour son maire et pour son équipe municipale, puisque c'est là que la République, finalement, a le plus de force. Nous sommes bien déterminés sur cette action-là. C'est un atout pour la ville. Vous avez une chance formidable, à condition, comme le disait le délégué à la DATAR, qu'on fasse en sorte que, dans la société française, le fait urbain n'apparaisse pas simplement comme un fait à problème, mais aussi un fait à rayonnement, à vie intense et capacité de résoudre des problèmes. Et puis aussi, c'est l'intérêt de la France.
Je termine par ce point-là, parce que ça me paraît très important. Aujourd'hui, on voit bien toutes les complications auxquelles nous avons à faire face, et ces complications, elles viennent souvent par une congestion au sommet et un manque de responsabilisation du terrain. C'est pour ça que nous voulons inverser la dynamique pour faire en sorte que les acteurs de terrain soient le plus responsables, et je ne dis pas ça par démagogie, par intérêt politique ou simplement parce que je suis face à des maires. Je dis ça en pensant, à la tête du gouvernement de mon pays, que ce dont le pays a besoin aujourd'hui, c'est d'une mobilisation générale, d'une libération des énergies en même temps que des responsabilités. Et c'est pour ça qu'il faut faire cette réforme aujourd'hui, c'est dans l'intérêt du pays, ce n'est pas dans l'intérêt d'élus, ce n'est pas dans l'intérêt de la notabilisation ni, naturellement, de l'esprit féodal qui est à l'opposé de tout ça. C'est dans l'intérêt du pays pour que le pays, lui-même, au plus près des Français, aille chercher vraiment et l'énergie humaine où elle se trouve et en même temps le sens des responsabilités, car il faut pouvoir avancer sur ces deux éléments : d'une part la dynamique, d'autre part la solidarité. C'est pour ça que la décentralisation doit avoir la ville pour destination."
(source Premier ministre, Service d'information du gouvernement, le 11 avril 2003)
Je voudrais vous saluer toutes et tous et remercier le président Bockel de son invitation.
En cette période particulièrement grave dans le monde, je crois qu'il est important que nous fassions preuve, à la fois, de conscience des événements, mais en même temps d'une détermination complète de façon à ce que nous puissions, nous, responsables publics, assumer les responsabilités qui sont les nôtres avec sérénité, avec calme, détermination, sans bousculer nos agendas mais en veillant vraiment à la cohésion nationale et aussi à la sécurité des Français. C'est pour cela que j'ai trouvé que cette rencontre avec les maires, aujourd'hui était tout à fait dans l'actualité, parce que les maires sont les premiers militants et de la cohésion sociale et les premiers exposés aux questions de sécurité qui sont les deux grandes préoccupations auxquelles nous devons être particulièrement vigilants en ce moment.
J'ajouterai, que puisque nous sommes dans cette Journée mondiale contre le racisme, c'est souvent aussi les maires qui sont en première ligne contre le racisme, contre l'antisémitisme. J'ai vu beaucoup d'entre vous engager des actions au niveau local. Vous-même, Monsieur le Président, vous êtes monté très souvent en ligne sur ce sujet, et je voudrais saluer votre action et vous encourager, en cette période où les bruits du monde grondent de toujours faire inlassablement la guerre au racisme, la guerre à l'antisémitisme, la guerre à tout ce qui est intolérance, non respect des autres. Et je crois qu'au fond, la ville est le lieu où l'on peut mieux avoir conscience de l'autre, aller au devant de l'autre. La ville fait partie de cet élément de cohésion républicaine, et je voudrais vous remercier, Mesdames et Messieurs les Maires, de cette action que vous menez pour cette cause qui est au fond au cur de notre pacte républicain.
C'est pour cela que je crois que, aujourd'hui, cette réunion est - au-delà de votre besoin de réforme et de soutien, puisque la considération, elle, est acquise -, cette réunion est la bienvenue.
Il me faut donc transformer un cri d'alarme en un nouvel espoir. Je crois que c'est faisable. Dans la période actuelle, je crois avoir des tâches plus difficiles. Ceci me paraît faisable parce que je voudrais vraiment vous dire que la vision que nous avons de la décentralisation, c'est une vision qui place la commune en général, la ville en particulier, dans la destination de la décentralisation. La décentralisation, ce n'est pas, de mon point de vue, le partage des responsabilités, voire des pouvoirs, ce n'est pas la distribution de responsabilités dont l'Etat se déchargerait et qu'il attribuerait à tel ou tel. C'est l'organisation de la responsabilité, dans notre République, au plus près du citoyen, au plus près du terrain, notamment là où sont les élus de proximité. Et quand je dis cela, je sais très bien que la région peut être facteur de décentralisation, mais qu'elle est aussi facteur de centralisation. Et quelquefois, vu de Grenoble, un transfert de Paris à Lyon n'est pas forcément un progrès, voire un transfert de Paris à Poitiers pour Jonzac - pour parler à monsieur le maire de Poitiers un langage qu'il connaît bien.
Mais, au fond, ceci est vrai aussi du département et quelquefois même de certaines agglomérations. Ce qui est très important, c'est d'aller au bout du cheminement de la décentralisation, c'est-à-dire rapprocher la décision du citoyen au plus près du terrain. C'est pour cela que je ne crains pas pour la place des villes dans ce processus, car nous ferons toutes les pressions nécessaires sur les structures intermédiaires pour que la responsabilité descende. Ce qui nous paraît très important aujourd'hui, pour rendre notre République plus vivante, c'est de faire en sorte que les responsabilités soient mieux partagées. C'est quand les responsabilités sont confuses, quand les démarches sont opaques que les Français doutent de nos systèmes publics. C'est quand ils ne connaissent pas les responsables, c'est quand ils trouvent les procédures très lentes et qu'ils ont du mal à percevoir vraiment où est le décideur, où est le guichet, où est le responsable auquel on peut s'adresser, voire que l'on peut sanctionner.
Donc, dans la vision de la décentralisation qui est la nôtre, je voudrais bien que vous soyez convaincus que la ville, la commune, dernier espace avant le citoyen, est le lieu de la plus grande proximité. Donc, c'est la destination de la réforme. Et toutes les étapes intermédiaires, que ce soit l'Etat, que ce soit la Région, que ce soit le Département, doivent faire en sorte que le principe de subsidiarité que nous faisons entrer dans la Constitution aille jusqu'au plus proche du citoyen ; donc son premier espace de solidarité pour ce qui concerne notre organisation territoriale, c'est-à-dire la ville.
Cela, c'est un point de principe très important, et je veillerai personnellement à ce que cette décentralisation ne soit pas transformée en un esprit féodal qui bloquerait la décentralisation à certains niveaux pour pouvoir organiser la prise de pouvoir sans qu'elle aille là où elle doit aller, c'est-à-dire vers le citoyen, c'est-à-dire soutenir la République. Nous avons tous en tête le printemps 2001, cet appel à la République, ce scepticisme sur la capacité de faire vivre les valeurs liberté, égalité, fraternité, oui, ces belles valeurs, ces grandes valeurs, mais sont-elles accessibles aux citoyens ? Il faut que la décentralisation permette à la République de mettre ces valeurs en accès libre aux citoyens. C'est pour cela que je suis très déterminé à ce que l'on trouve bien, ensemble, la place de la ville dans le sujet, et je ne suis pas du tout complice de tous ceux qui mettront de l'esprit féodal dans la décentralisation.
La décentralisation est républicaine. Elle doit nous permettre de définir clairement les responsabilités de l'Etat, que l'Etat définisse bien, ses missions régaliennes c'est évident, mais au-delà de cela, la cohésion sociale, l'équité, l'égalité entre les Français, les valeurs de la République. L'Etat a ses responsabilités. Il délègue pour que les décisions soient prises au plus près du citoyen et, là, il s'agit donc d'aller dans tout ce qui peut aider le citoyen à avoir accès aux services publics notamment, le plus près de chez lui, c'est-à-dire dans la ville.
J'ai vu les résultats de l'étude de la DATAR et je crois qu'il est très important de refaire de la ville, dans notre culture territoriale nationale, un succès. Je pense que c'est très important de mesurer que, finalement, la ville a ses propres problèmes. Nous en parlerons tout à l'heure, à propos notamment, de la politique que mène J.-L. Borloo, et des projets que nous avons de lois de programmation et d'orientation -, mais nous voyons bien qu'il y a des difficultés majeures dans la ville ; nous voyons bien, grâce à l'étude de la DATAR, que quand on s'analyse, ville par ville, on s'inquiète, quand on se compare au niveau européen, quelquefois, on se rassure. Car l'attractivité de rayonnement, elle est très, très forte. Et quand on regarde dans cette période de crise aujourd'hui, par exemple l'importance de la culture dans la cohésion sociale - je vais vous parler de lutte contre le racisme -, l'importance de la vie culturelle, qui sont les principaux acteurs culturels aujourd'hui dans notre pays, au quotidien ? C'est l'alliance entre la ville et la vie associative, et des concours qui sont apportés par l'Etat, par les autres collectivités. Mais c'est cette cohésion-là, qui s'exprime dans une pratique culturelle de haut niveau, qui justifie que nos villes ont un fort rayonnement.
Mais c'est vrai que nous avons, avec nos villes, des capacités importantes de rayonnement de la France, même si, dans les trente dernières années, on a eu, peut-être, le tort de faire en sorte que Carcassonne, La Rochelle, Annecy - qui sont, pour prendre des villes particulièrement ... Mais je pourrais prendre Boulogne, Perpignan et toutes les autres - que toutes ces villes - quand on est à 15 kilomètres, se ressemblent toutes parce qu'elles ont toutes les mêmes niveaux de grandes surfaces et les mêmes zones périphériques. Ces villes finalement, sont toutes différentes dans leur cur, mais quelquefois semblables dans leurs horreurs. Mais laissons, nous corrigerons cela.
L'essentiel est quand même de s'appuyer sur les forces qui sont ses capacités de rayonnement économique, social et aussi culturel. De ce point de vue-là, je crois que l'étude de la DATAR peut être la première étape, mon cher Nicolas, Monsieur le Délégué, pour participer dans notre pays à une revalorisation culturelle du fait urbain qui ne doit pas apparaître comme ce qui serait la cause d'une nostalgie sur une mutation qui est passée du rural à l'urbain, mais qui est un projet d'avenir, un projet qui a ses forces et ses grandes capacités. Je crois qu'il y a là, un élément très important, même si je ne nie pas les problèmes de la ville. Mais les problèmes de la ville, nous les plaçons dans la ville ; mais, en fait, ce sont les problèmes de la société française qui se trouvent localisés dans la ville ; mais ce n'est pas la ville qui est problème, c'est le problème lui-même qu'il faut résoudre.
Je voudrais également ajouter, dans cette démarche de succès, le succès de l'intercommunalité parce que, au fond, la ville portait souvent des capacités identitaires qui pouvaient conduire à des jalousies territoriales et pouvaient conduire à, finalement, des difficultés de travailler ensemble et au manque de solidarité. Et finalement, la preuve a été faite, quand on regarde notre organisation territoriale, que les lois sur l'intercommunalité ont été un grand succès, que les élus ont su se rassembler, dégager des cohésions, dégager des cohérences, bâtir des projets et faire en sorte que le citoyen, globalement, s'y retrouve dans l'intercommunalité. Alors, je sais qu'on pourrait faire un pas supplémentaire pour faire en sorte qu'il puisse y avoir une élection sur ce sujet. L'expérience des commissions que j'ai, y compris celle présidée par monsieur Mauroy, laisserait à penser qu'il y a une assez forte propension à aller dans cette direction ; l'expérience que j'ai de la vie sénatoriale de l'autre, me fait penser qu'il y a quelques résistances. Il faudra concilier les deux, c'est pour ça qu'il faut débattre de cette question, elle est importante, elle pose la question de légitimités : la légitimité électorale, la légitimité collégiale. L'ensemble de ces sujets doit être posé, il faut en débattre de manière sereine. C'est un juste débat de démocratie locale qui doit être posé et dont on ne doit pas avoir peur. Cela dit, reconnaissons tous ensembles, et je suis le premier à le faire, le succès de l'intercommunalité.
Dans ce dispositif, je voudrais vraiment vous dire que la ville a sa place dans notre architecture des responsabilités publiques dans notre pays, qu'elle n'est pas le parent pauvre de la décentralisation, qu'elle est, au contraire, la destination d'un processus de décentralisation qui rapproche la décision du terrain, que nous considérons que nous avons un devoir de valorisation du fait urbain pour ne pas le laisser se désintégrer dans l'image des Français, et de faire en sorte qu'il puisse avoir toute sa place dans l'organisation des responsabilités dans notre pays.
Alors, je vais répondre sur les demandes que vous avez exprimées. Un point - je commence par le désaccord parce que, sur tout le reste, je serai d'accord - de désaccord qui est le problème du chef de file. Je crois que là, il faut éviter que le citoyen soit perdu dans la responsabilité des projets, notamment. Je ne suis pas hostile aux financements croisés. Ce serait absurde, on voit bien que c'est tous ensemble, quand on peut mobiliser tous les acteurs autour d'une table, que l'on arrive à bâtir quelque chose. Mais je crois qu'il faut une responsabilité de bonne fin, c'est souvent le maître d'ouvrage ; mais il faut une responsabilité de bonne fin, non seulement pour que le projet aille à son terme, mais il faut aussi qu'il y ait quelqu'un qui rassemble. Et d'ailleurs, quand on construit, par exemple, un auditorium, il y a un chef de file de fait, il y a quelqu'un qui est au centre du dispositif, qui est en général le maire puisque c'est sur son terrain que ça se passe et que c'est lui qui a les services, et qui, finalement, est quand même celui qui recevra les compliments ou les critiques des citoyens. Même le maire reçoit les critiques quand le département augmente ses impôts. Cela n'a échappé à personne, y compris, d'ailleurs, aux présidents de départements qui ont bien compris le sujet.
Le maire est donc évidemment celui qui est en premier contact avec le citoyen. C'est pour cela que je pense que, plutôt que de dire stoppons les financements croisés, faisons en sorte que, globalement, quand il y a contrat, il y a une collectivité territoriale qui, pour les autres, est chef de file. C'est un point très important - je pense notamment à l'évaluation. Les Girondins doivent être favorables à l'évaluation, et l'évaluation, c'est le moyen que nous avons, les uns et les autres, pour que le citoyen, mais en même temps l'ensemble de notre système public, puisse avoir confiance dans notre capacité à bâtir des projets, à exécuter des projets selon les règles de financement et de procédure, qui sont celles de la République. Il faut donc favoriser l'évaluation. Mais quand vous êtes tous autour d'une table, si vous voulez vous protéger - vous, vous êtes département ou région ou ville -, et que vous allez faire faire des audits sur votre partenaire, ce n'est pas très courtois, ce n'est pas très élégant de dire : je vais vérifier comment mon partenaire gère la manière dont il construit ce projet, par exemple.
Je pense que celui qui est chef de file doit prendre en charge les dispositifs d'évaluation de l'ensemble du système, et cela fait partie de sa responsabilité de chef de file. Il y a un certain nombre de sujets que nous allons travailler dans les textes législatifs. Il ne s'agit pas de créer une hiérarchie définitive, mais sur un projet que, dans l'organisation du projet, dans sa gouvernance, je dirais, mais aussi, dans sa relation avec le citoyen, que le citoyen sache qu'il y en a un parmi les acteurs qui a la responsabilité de bonne fin et auquel on peut s'adresser pour faire en sorte qu'il y ait une gestion qui soit correcte et donc aux normes de notre gestion publique.
Dans ce contexte-là, je pense qu'il y a trois types de compétences qui vous concernent. Premièrement, les compétences qui peuvent vous être directement déléguées, de l'Etat aux villes, ou agglomérations, communauté de villes. Les compétences qui peuvent vous être déléguées par le département et la région, et les expérimentations.
Je commence par les expérimentations. Je suis ouvert, je l'ai dit, à ce qu'il y ait des expérimentations qui se fassent dans la ville pour faire en sorte que, dans l'agglomération, on puisse expérimenter là où la réforme est difficile - ça, c'est gentil d'allumer un peu que je voie la salle, la France aux 500 visages. Je crois qu'il faut qu'on puisse expérimenter, c'est vrai qu'il y a un certain nombre de sujets qui sont très importants. Nous avons passé, Monsieur le Premier Ministre, Pierre Mauroy, en Conseil des ministres, mercredi, un Traité solennel entre la France et la Belgique pour autoriser les collectivités territoriales de Belgique, les communautés et la France à participer à un dispositif partenarial sur lequel, déjà, vous étiez bien avancé. Et ce Traité, je ne sais pas depuis combien de temps vous l'attendez, mais depuis un certain temps, et je crois qu'il doit pouvoir permettre de participer à un certain nombre d'initiatives qui soient des initiatives de responsabilités. Mais naturellement, on peut faire ça par expérimentation suivant les circonstances, on peut faire ça aussi de manière générale ; est au choix des uns et des autres. Je suis donc très ouvert aux expérimentations.
Il y a notamment, un sujet très important que je considère, qui est le sujet de l'insertion. Vous en parlez un petit peu quand vous parlez de prévention spécialisée qui comprend une partie quelquefois d'insertion, mais on voit bien que le domaine de l'insertion est un domaine dans lequel tout le monde intervient. L'insertion, la région est acteur de l'insertion quand elle est acteur de la formation. Le département est acteur de l'insertion quand il est acteur des prestations sociales. Et la ville, finalement, est acteur de l'insertion, d'abord, parce que c'est elle souvent qui fait fonctionnement la mission locale, ou les structures diverses et variées qui interviennent dans le dispositif d'insertion, qui sont liées, souvent, à l'équipe municipale, qui sont liées aux services municipaux, et c'est souvent la ville qui gère, quartier par quartier, les antennes qui permettent d'avoir le contact avec le citoyen sur la politique d'insertion. L'insertion, c'est vraiment un sujet, je crois, sur lequel on doit pouvoir avancer et on doit pouvoir faire en sorte qu'il y ait des capacités donc spécifiques d'expérimentations pour voir comment, dans une ville, on peut mettre tous les partenaires ensemble pour faciliter l'insertion dans toutes ses dimensions, sociales, économiques, professionnelles.
Je pense qu'il y a là des possibilités d'expérimentations qui sont ouvertes. Il y a d'autres sujets qui sont ouverts à l'expérimentation. Je pense à un sujet qui m'a été proposé par monsieur le maire de Lyon - je devrais dire le président d'agglomération - sur ce sujet, qui est : comment avoir, quel statut peut-on avoir avec une commune qui n'est pas membre de l'agglomération mais avec laquelle on peut développer un projet d'envergure d'infrastructure ? Il y a des liens à trouver pour faire en sorte que, quand une agglomération qui bâtit une infrastructure à destination de valorisation de l'agglomération, mais qui est obligée d'associer un deuxième cercle, comment ce deuxième cercle participe et à des retours, et à des dialectiques, financières notamment, avec le premier cercle de l'agglomération. C'est un sujet sur lequel, je crois, qu'on peut faire des expérimentations. Parce qu'on comprend bien qu'il peut y avoir, il y aura de plus en plus, avec l'exigence sur les grandes infrastructures, c'est vrai notamment des aéroports, ça peut être vrai d'autres infrastructures, des discussions entre l'agglomération et son environnement. Voilà pour ce qui est le sujet de l'expérimentation qui peut se faire au niveau de la ville.
En ce qui concerne les transferts qui peuvent se faire avec le département. Le département aura une forte responsabilité en matière de logement. Le département aura un certain nombre de responsabilités, je pense également aux routes. Il y a des routes nationales dans les villes, c'est le cas, je crois, dans l'agglomération lilloise. Donc il serait normal que le département délègue à l'agglomération la gestion de cet axe qui est une route nationale mais, en fait, qui est une voie urbaine dans la réalité, dans la pratique. Et donc je pense qu'il faut aller au bout du dispositif, à chaque fois : quand on sera dans l'agglomération que le département puisse aller jusqu'à confier, par cette délégation-là, des compétences aux collectivités territoriales, communes ou agglomérations.
Il y a là, je pense, des initiatives qui peuvent être prises, également en ce qui concerne les compétences de la région sur le plan du développement économique, je pense sur la gestion de zone économique, sur la gestion de tout ce qui est le dispositif d'accueil, y compris dans les télécommunications pour le système de haut débit dans des zones importantes, qui sont des zones d'accueil, pour qu'on puisse développer une attractivité de la ville. Je pense que celui qui est le maître d'ouvrage de la zone économique en question doit pouvoir avoir des responsabilités, et la région aurait tout intérêt, dans ce cas-là, à déléguer ses politiques de soutien et d'aides, dans ces politiques économiques, à l'acteur de terrain qui est l'aménageur qui gère l'attractivité d'une zone, et notamment les moyens d'attractivité de cette zone, et je pense notamment aux VRD, d'une part, mais aussi naturellement aux télécommunications.
Dans ce que vous avez demandé tout à l'heure, Monsieur le Président, je crois que nous sommes d'accord pour le logement étudiant, nous sommes d'accord pour un transfert direct. Je pense que là, il y a un point important, je pense qu'on aurait intérêt à avoir une discussion avec la région, quand il y a plusieurs universités par région, pour avoir un schéma régional, mais je pense que cette bataille-là est une bataille très importante et pour nos villes et pour notre pays. Je pense vraiment que nous ne sommes pas, aujourd'hui, suffisamment mobilisés sur l'avenir de l'accueil de nos universités. Nous sommes très mobilisés sur la qualité de l'enseignement, très mobilisés sur les moyens de recherche - et encore, il y a beaucoup de choses encore qu'il reste à faire -, mais nos universités vont être surdimensionnées par rapport au flux démographique qui est actuellement correspondant à leur zone d'influence. Donc notre seule façon de faire face - parce qu'on ne va pas reculer dans notre mobilisation de formation, tout le monde est d'accord pour dire que la clé de l'avenir, c'est la formation tout au long de la vie ; on ne va fermer ni des universités, ni des lycées. Ce serait, je crois, absurde d'avoir cette démobilisation. Tout notre problème est de les ouvrir, de les ouvrir géographiquement, de les ouvrir professionnellement, de les ouvrir sociologiquement, de les ouvrir à un certain nombre de nouvelles formes d'éducation et de formation ; là, toutes ces ouvertures passeront toujours par un problème de logements, car dès qu'on sortira pour parler de l'attractivité, que ce soit les étudiants étrangers, les chercheurs étrangers ou les gens qui, au-delà du bassin d'emploi, peuvent venir à l'université, tout cela passera par l'accueil étudiant.
Et donc, je pense qu'il y a là une vraie priorité qui est une priorité urbaine parce qu'on est auprès de la ville, parce que je crois vraiment que l'université est un élément clé du développement et du rayonnement d'une ville, et je pense que l'université est bien dans sa ville. Elle est bien dans sa ville parce que ce sont ses racines. On peut être l'Université de Strasbourg, on peut être une université à Lyon, sa ville, c'est un point d'ancrage, mais on ne se laisse pas enfermer. Un département, ou une région quelquefois, pourrait donner le sentiment que l'université, dont l'ambition est, par définition, comme son nom l'indique, universelle, l'université n'est pas régionale ; une université, elle a un ancrage, elle a des partenariats, mais elle a une dimension, une vocation qui dépasse les limites du territoire. Donc l'université est bien comme référence dans sa ville, et c'est pour ça, je crois, qu'il faut que le logement des étudiants, qui est une priorité nationale, puisse faire partie des dispositifs transférés de manière systématique.
Je pense qu'il peut aussi faire en sorte qu'on puisse, comme vous l'avez demandé, sur l'éducation spécialisée, la prévention spécialisée, je pense que là, je suis d'accord pour qu'il y ait des transferts systématiques et qui soient dans les lois de transfert. Je pense qu'on peut aller loin sur ces sujets avec le débat ouvert sur l'insertion, avec expérimentation, comme vous l'avez souhaité. Je pense également que nous devons ouvrir, je le disais tout à l'heure, mais d'une manière générale les accords, et notamment les accords internationaux, je pense que c'est un des éléments importants de l'attractivité de la France de faire en sorte qu'on joue la carte de nos villes pour parler de l'attractivité de la France, c'est un élément très important.
Donc en ce qui concerne les transferts, que ce soit les transferts du département et de la région sur la ville, dans le cadre d'un processus de décentralisation qui va jusqu'à destination, que ce soit les transferts directs de l'Etat, il n'y a aucune raison d'abandonner la ville. Quant au Parlement, nous défendrons ces textes, ils seront dans le projet de loi que vous proposera le Gouvernement. Il pourra aussi être ajouté des amendements sur ces différents sujets par vos représentants. Je voudrais dire, évidemment, que la décentralisation à elle seule ne constitue pas l'ensemble de la politique que nous devons mener pour la ville. Je voudrais dire, d'abord, sur le plan financier, j'ai bien entendu vos demandes, j'ai bien entendu la réforme de la DGF. Je vois qu'il est nécessaire, et nous l'avons dit à plusieurs reprises, de fusionner les différentes dotations. Je vois qu'il est très important - et monsieur le président du Comité des finances locales nous a mis ça dans notre logiciel central, ce qui est le plus important - c'est de décentraliser des processus fiscaux plutôt que des dotations puisque notre objectif de décentralisation est un objectif de responsabilisation des acteurs. Et donc, c'est un point important, un groupe de travail se réunit sur ces sujets et fera les propositions pour que, en temps utiles, on puisse mettre dans ces réformes la dimension financière. Mais il est clair qu'aucun gouvernement, jusqu'à maintenant, n'est allé aussi loin que nous en plaçant le problème au niveau de la Constitution, ce qui fait que toutes nos réformes seront obligées de passer par ce filtre-là ; et que le jour où on voudra faire une réforme qui est de décharger l'Etat sur une collectivité sans mettre les financements à côté, le Conseil constitutionnel jugera inconstitutionnelle la loi. Et donc là, nous sommes dans un dispositif où la réforme des finances locales est en fait dans la réforme de la Constitution.
Nous nous sommes mis, naturellement, face à un défi considérable. Je sais même qu'il y en a certains qui ont voté la Constitution rien que pour ça, pour nous obliger à faire la réforme, ça ne m'a pas échappé, mais je crois que comme cette réforme était nécessaire, je pense qu'il est important de se donner cette contrainte-là parce que s'il n'y a pas cette contrainte-là, on verra toujours la réforme des finances locales reportée de gouvernement en gouvernement, de législature en législature. C'est pour ça que nous voulons le faire, c'est pour ça que nous avons mis les différents éléments, ce principe de fiscalité, ce principe de compensation, ce principe de péréquation, et quand je dis péréquation, je vois bien combien le sujet est difficile. Et je sais bien qu'on a encore beaucoup de travail à faire, parce que la péréquation, c'est un problème national ; ce sera même, après 2006, un problème européen encore, mais c'est un problème national, c'est un problème régional parce qu'à l'intérieur d'une région, il y a per aequae ". C'est un problème départemental, c'est un problème urbain entre les quartiers. Donc la péréquation, c'est un problème qui se décline comme la décentralisation : du sommet jusqu'au citoyen. Donc là, nous avons un certain nombre de réformes qui sont des réformes nécessaires pour lesquelles nous sommes au travail et pour lesquelles nous voulons tenir le calendrier pour être prêts, pour ce premier rendez-vous très important qu'est le nôtre, le 1er janvier 2004.
Il y a aussi tout ce que nous voulons faire sur les problèmes d'aménagement du territoire et de la ville dans son territoire. Là, je crois qu'il nous faut essayer de simplifier un peu l'ensemble de ces dispositifs, dont je reconnais qu'ils ont leur cohérence, mais pour lesquels il est évident qu'il y a des difficultés importantes: d'abord pour le citoyen mais aussi pour les élus. Et donc là, il est très important de bien organiser cette réflexion. Nous avons mis au travail les deux délégations d'aménagement du territoire de l'Assemblée et du Sénat sur le sujet. Je crois qu'il est important d'accepter l'idée, évidemment, qu'au-delà de l'agglomération, il y a une relation particulière avec l'agglomération. Cette dialectique-là doit être organisée : qu'il y ait un périmètre, à l'extérieur de l'agglomération, qui puisse être un périmètre où on pense un aménagement spécifique. Il faut organiser la relation avec les autres structures intercommunales, naturellement, qui sont à la périphérie de l'agglomération et qui estiment que c'est quelquefois un impérialisme de l'agglomération que de vouloir prétendre à aménager au-delà de ses propres limites. Donc là, il faut qu'on organise la dialectique entre le pays, ou l'autre agglomération, et l'agglomération, mais c'est un sujet qui est très important. En tout cas, le gouvernement reconnaît tout à fait volontiers qu'il y a nécessité d'organiser la relation entre l'urbain et le rural, tout ce périurbain qui est autour de l'agglomération, qui vit en général avec l'agglomération, dont l'agglomération est le coeur et pour lequel il faut organiser la relation. C'est un élément très important.
Je voudrais dire que, avec Jean-Louis Borloo, nous voulons nous engager dans une vraie politique d'humanisation de la ville. Nous voulons sortir de cette logique où la politique de la Ville est une politique de quartiers. Pour cela, il faut faire en sorte qu'on puisse corriger toutes ces injustices qui sont rassemblées, concentrées dans les quartiers. S'il y a quelque chose dont la République ne peut pas être fière, c'est bien de la vie dans ces 750 quartiers où, aujourd'hui, on voit que tout est plus grave qu'ailleurs, que tout est plus compliqué qu'ailleurs ; et qu'on voit bien, quand on parle de chômage, quand on parle de maladie, quand on parle de délinquance, tous les maux de la société, tous les maux de la personne se trouvent concentrés dans un certain nombre de territoires pour lesquels on voit bien qu'on a à repenser l'ensemble du dispositif. C'est pour ça que nous voulons créer ces 200.000 logements nouveaux réhabilités. Ce qui veut dire qu'il faut restructurer complètement ces différents quartiers. C'est pour ça qu'il nous faut à la fois mutualiser les interventions et à la fois faire en sorte que nous soyons capables d'avoir un guichet unique national pour faire en sorte qu'il y ait cette capacité à réorganiser avec une ingénierie nationale, mais aussi avec les acteurs locaux évidemment de la ville, mais qu'on puisse vraiment s'attaquer à la vie dans ce type de dispositif, tellement elle est aujourd'hui une vie difficile, une vie souvent insupportable et une vie qui est à la source de bien des difficultés de la ville.
Enfin, je voudrais dire que tout ce qui peut concerner le personnel - et je pense que là, il est très important de mesurer combien les villes ont une expérience, une bonne expérience de la gestion des fonctionnaires - et je voudrais vraiment dire aux maires, et au-delà, à l'ensemble des personnels communaux, qu'ils peuvent être fiers et du travail qui a été accompli et des procédures qui sont celles aujourd'hui de notre Fonction publique territoriale, même s'il y a beaucoup de choses à améliorer, mais du dialogue social dans les villes, de l'ensemble des procédures qui ont été... et André Rossinot sait mieux que quiconque tout le travail qui a pu être fait dans cette Fonction publique territoriale. Quand je vois les autres fonctions publiques, on me cite souvent en exemple des procédures qui existent dans la Fonction publique territoriale. Et quand je vois, ce que je comprends bien, certains personnels qui relèvent de la Fonction publique nationale être inquiets de pouvoir passer sous l'organisation de la Fonction publique territoriale, j'ai envie de leur dire : mais regardez, allez interroger vos propres collègues, regardez comment les choses fonctionnent. On peut être aussi dévoué à l'intérêt général, aussi dévoué aux valeurs de la République, aussi dévoué à la France et à ce qu'elle peut porter, en servant une collectivité territoriale qu'en servant l'Etat. Et on sert, là, la République et ses valeurs, et nous faisons en sorte que, dans nos villes, dans l'ensemble de nos collectivités territoriales, il y ait ce respect, cet engagement et, au fond, cette reconnaissance des différents métiers au-delà de la mission. Et je crois que c'est très important d'essayer d'avoir cette pédagogie, mais aussi de faire un certain nombre de réformes pour pouvoir les convaincre. Là, nous avons besoin d'un dialogue social renforcé pour, naturellement, en permanence, essayer de convaincre. Mais je pense que c'est un des éléments très importants de la décentralisation. Si on dit aux Français qu'on décentralise et que les personnels qui, auparavant, faisaient ces missions, ne les feront pas sous l'autorité de la collectivité territoriale, on ne sera pas crédible sur la décentralisation. Et donc si on dit que les personnels, aujourd'hui, qui sont en charge de la décentralisation, sont en charge de ces missions qui, hier, étaient des responsabilités de l'Etat, qui demain seront la responsabilité des collectivités territoriales, ces personnels seront autant respectés, leur statut sera autant respecté - on leur laissera le choix - et en plus, ils seront gérés dans la proximité.
Et même, franchement, pour les plus revendicatifs, est-ce qu'il ne vaut mieux pas avoir un patron plus près qu'un patron très loin ? Vraiment, il faut leur expliquer ça. Moi j'ai vu une expérience là-dessus : la CGT et la réforme du transport régional ferroviaire. Au début, ils étaient tous contre : c'était une réforme. Et puis un jour, ils se sont aperçus que, au niveau régional, finalement, il y avait des personnes identifiées et que les pressions sur ces personnes-là, c'était quelque chose qui pouvait s'organiser assez facilement, et que les discussions, elles étaient franches, cordiales, identifiées et pas anonymes. Et d'un seul coup, on a vu progressivement la CGT devenir un grand militant de la réforme. Peut-être que monsieur Gayssot y a aidé, j'en suis sûr. En tout état de cause, il y a eu une réforme de la régionalisation du transport ferroviaire qui s'est faite, après expérimentation, avec l'accord des partenaires sociaux. Alors, l'expérimentation était très importante parce que ça a permis à tout le monde d'apprivoiser les procédures, d'apprivoiser les partenaires et de faire en sorte que l'on puisse mieux savoir là où on allait, et ça, je crois que c'est un élément très important pour rassurer ; finalement, c'est souvent en traçant la perspective et en associant les acteurs, les usagers, l'ensemble de ceux qui sont concernés à la réforme, que l'on peut le mieux atteindre son objectif. C'est pour ça que le dispositif me paraît très important.
En résumé et pour terminer, je voudrais vous dire que je serai très attentif, et je suis prêt, Monsieur le Président, à continuer le dialogue avec vous. C'est un sujet très difficile que nous avons à traiter ensemble puisqu'il s'agit, en fait, d'une réforme de l'Etat dont la décentralisation est la première grande étape, la simplification en est une autre, la loi organique en est une troisième, et un certain nombre de fonctions vont suivre en terme de réformes. Mais je crois vraiment que cette réforme-là, elle est, pour les villes, une chance extraordinaire. Vous trouverez votre place dans ces responsabilités, parce que c'est une réforme pour la proximité, et qu'il n'y a personne de mieux placé que la ville pour assumer cette fonction de proximité. Alors, c'est vrai que, dans notre pays, le débat de la décentralisation a très souvent été posé dans des termes classiques, et je dirais traditionnels, entre départements et régions, et c'est comme ça que souvent s'est posé le problème. On voit bien que la société française, entre-temps, a bougé, et qu'il y a eu l'émergence des grandes agglomérations et qu'il y a l'émergence du fait urbain, on voit bien cette évolution et qu'aujourd'hui la ville est au coeur de cette France des proximités que nous voulons bâtir. Et donc, nous ferons tout pour que dans les lois de transfert, dans les lois d'expérimentation, dans les lois financières, vous puissiez avoir toute votre place dans ce dispositif. Il serait absurde de penser qu'aujourd'hui, alors qu'une majorité de Français vit dans la ville, on ne mette pas la ville au coeur d'un processus de proximité, et on sait bien que c'est là où se gère cette relation avec le citoyen qu'est la première, je dirais, des actions démocratiques. C'est aussi, là, où le citoyen a pour la politique le plus d'estime. Il serait donc absurde, pour un gouvernement, de ne pas prendre en compte à la fois le besoin d'efficacité et la considération qu'a le citoyen pour son maire et pour son équipe municipale, puisque c'est là que la République, finalement, a le plus de force. Nous sommes bien déterminés sur cette action-là. C'est un atout pour la ville. Vous avez une chance formidable, à condition, comme le disait le délégué à la DATAR, qu'on fasse en sorte que, dans la société française, le fait urbain n'apparaisse pas simplement comme un fait à problème, mais aussi un fait à rayonnement, à vie intense et capacité de résoudre des problèmes. Et puis aussi, c'est l'intérêt de la France.
Je termine par ce point-là, parce que ça me paraît très important. Aujourd'hui, on voit bien toutes les complications auxquelles nous avons à faire face, et ces complications, elles viennent souvent par une congestion au sommet et un manque de responsabilisation du terrain. C'est pour ça que nous voulons inverser la dynamique pour faire en sorte que les acteurs de terrain soient le plus responsables, et je ne dis pas ça par démagogie, par intérêt politique ou simplement parce que je suis face à des maires. Je dis ça en pensant, à la tête du gouvernement de mon pays, que ce dont le pays a besoin aujourd'hui, c'est d'une mobilisation générale, d'une libération des énergies en même temps que des responsabilités. Et c'est pour ça qu'il faut faire cette réforme aujourd'hui, c'est dans l'intérêt du pays, ce n'est pas dans l'intérêt d'élus, ce n'est pas dans l'intérêt de la notabilisation ni, naturellement, de l'esprit féodal qui est à l'opposé de tout ça. C'est dans l'intérêt du pays pour que le pays, lui-même, au plus près des Français, aille chercher vraiment et l'énergie humaine où elle se trouve et en même temps le sens des responsabilités, car il faut pouvoir avancer sur ces deux éléments : d'une part la dynamique, d'autre part la solidarité. C'est pour ça que la décentralisation doit avoir la ville pour destination."
(source Premier ministre, Service d'information du gouvernement, le 11 avril 2003)