1954-1971 : Crise du logement et reconstruction du pays
"En finir avec les bidonvilles" (Jacques Chaban-Delmas)
Au sortir de la Seconde Guerre mondiale, la France doit se reconstruire. Les destructions provoquées par la guerre provoquent une crise du logement. La France fait aussi appel à de la main-d'œuvre immigrée logée dans des conditions souvent précaires. Des bidonvilles apparaissent.
1er février 1954
Appel de l'abbé Pierre en faveur des sans-abris, dans le contexte de pénurie de logements et d'un hiver particulièrement froid.
4 août 1956
Création de la Société nationale de construction de logements pour les travailleurs algériens (Sonacotral, devenue par la suite Sonacotra) par l'article 116 de la loi n° 56-780 du 4 août 1956 portant ajustement des dotations budgétaires reconduites à l'exercice 1956. Un des objectifs est la résorption des bidonvilles, dans un contexte de crise du logement pour les sans-abris et les immigrés.
14 décembre 1964
Loi n° 64-1229 du 14 décembre 1964 tendant à faciliter aux fins de reconstruction ou d'aménagement, l'expropriation des terrains sur lesquels sont édifiés des locaux d'habitation insalubres et irrécupérables, communément appelés "bidonvilles".
1969
Le Premier ministre, Jacques Chaban-Delmas, engage une politique de résorption des bidonvilles.
1971
Le plus grand bidonville de France, situé à Nanterre, est rasé.
1973-1983 : Naissance de la politique de la ville et premières émeutes
"Prévention, répression, solidarité" (rapport Bonnemaison)
Le groupe de travail Habitat et vie sociale, créé en 1977, marque la naissance d'une politique de la ville en France. La destruction des grands ensembles construits dans l'après-Seconde Guerre mondiale commence. Les premières émeutes importantes ont lieu à Vaulx-en-Velin, dans le Rhône, en 1979, à la suite de l'arrestation d'un jeune homme. Les quartiers sont souvent vus sous l'angle de la délinquance.
21 mars 1973
Une circulaire du 21 mars 1973 relative aux formes d'urbanisation dites "grands ensembles" et la à la lutte contre la ségrégation sociale par l'habitat met fin à la construction des barres et tours. Ces formes d'urbanisation sont peu conformes aux aspirations des habitants et sans justification économique sérieuse.
24 août 1976
Création du fonds d'aménagement urbain, par arrêté, destiné à appuyer financièrement l'aménagement des centres des villes et de leurs quartiers.
Juin 1977
Les pouvoirs publics créent le groupe de travail Habitat et vie sociale, qui a pour mission de mener le premier "plan banlieue". L'objectif est de réhabiliter 53 sites, tout en y réalisant un accompagnement social.
Le groupe dresse un sombre constat : pauvreté et atomisation de la vie quotidienne, faiblesse des structures sociales locales, ségrégation interne entre les groupes les plus pauvres et les groupes qui attendent pour épargner en vue d’une accession ultérieure à la propriété individuelle, ghettoïsation des jeunes.
Septembre 1977
Le comité d’études sur la violence, la criminalité et la délinquance, présidé par Alain Peyrefitte, rend ses conclusions dans un rapport intitulé "Réponses à la violence". Après avoir diagnostiqué l’apparition d’un sentiment généralisé d’insécurité, le rapport préconise un redéploiement des forces de police et de gendarmerie afin "d’accroître la densité des forces de sécurité dans les zones nouvelles d’urbanisation, où leur absence est gravement ressentie". Il souligne les dysfonctionnements inhérents aux groupes d’habitat collectif.
Octobre 1977
Le maire de Villeurbanne (Rhône), Charles Hernu, annonce la destruction de la cité Olivier-de-Serres. Le permis de démolir la première barre est signé le 21 septembre 1978. Il s'agit de la première cité en France à être ainsi rasée.
15 septembre 1979
Les premières émeutes urbaines d'ampleur ont lieu à Vaulx-en-Velin (Rhône), dans la cité de la Grappinière.
Juillet 1981
Création par le ministre de l'éducation nationale, Alain Savary, des zones d'éducation prioritaire (ZEP) afin de lutter contre l'inégalité sociale. La circulaire n° 81-238 du 1er juillet 1981 précise l'objectif des ZEP : "Corriger cette inégalité par le renforcement sélectif de l'action éducative dans les zones et dans les milieux sociaux où le taux d'échec scolaire est le plus élevé."
Été 1981
De violents incidents éclatent dans le quartier des Minguettes, à Vénissieux (Rhône).
23 décembre 1981
La Commission nationale pour le développement social des quartiers est instituée en Conseil des ministres. La commission est chargée de mettre en œuvre des mesures gouvernementales portant sur la réhabilitation d'immeubles et de leur environnement, l'animation socio-éducative, les loisirs, la formation professionnelle et la sécurité.
26 mars 1982
L'ordonnance n° 82-273 du 26 mars 1982 institue les missions locales pour l'emploi des jeunes, conçues comme des lieux d’accueil, d’information et de soutien à l’intention des jeunes de 16 à 25 ans sortis de leur formation initiale sans qualification.
Juillet 1982
En réponse aux incidents de l'été 1981, lancement de la première Opération prévention été.
13 décembre 1982
Présentation à Pierre Mauroy, Premier ministre, par Hubert Dubedout, maire de Grenoble, de son rapport sur le développement social des quartiers, "Ensemble, refaire la ville".
13 janvier 1983
Remise à Pierre Mauroy du rapport Bonnemaison, "Face à la délinquance : prévention, répression, solidarité". Le rapport présente l'évolution de la délinquance sur vingt ans et présente 64 propositions réparties sur cinq thèmes : environnement social et cadre de vie, protection de la jeunesse, réforme des méthodes administratives, politique judiciaire, organisation de structures permanentes de la prévention.
11 juillet 1983
Émeutes à la suite du meurtre d'un enfant de 10 ans dans la cité des 4000 de La Courneuve. Ce meurtre fait suite à une vague de violences à caractère raciste, lors du "difficile été 1983", selon les mots de François Mitterrand.
21 juillet 1983 - 6 septembre 1983
Le 21 juillet, installation par Pierre Mauroy du Conseil national de prévention de la délinquance (CNPD), principal élément du dispositif proposé par la Commission des maires sur la sécurité. Gilbert Bonnemaison est élu vice-président du CNPD.
Le 1er août, Gilbert Bonnemaison annonce l’établissement d’un inventaire de la délinquance et des moyens de la combattre dans dix villes pilotes.
Le 24 août, la ville de Mulhouse est choisie pour la mise en place d’un plan de prévention de la délinquance décidé par le conseil.
Novembre 1983
Création de la mission Banlieues 89 sous la direction des architectes Roland Castro et Michel Cantal-Dupart. Il s’agit de mettre en œuvre des projets de réhabilitation, d’aménagement et de désenclavement des banlieues tout en réintroduisant l’esthétique dans ces quartiers.
15 octobre 1983 - 3 décembre 1983
La marche pour l'égalité et contre le racisme, dite "marche des Beurs", part de Marseille pour rejoindre Paris. Plusieurs membres du cortège sont issus des Minguettes. Une délégation est reçue à l'Élysée par le président de la République, François Mitterrand.
1984-1994 : Structures interministérielles de la ville et création d'un ministère dédié
"Casser partout le mécanisme de la ségrégation urbaine" (François Mitterrand)
La politique de la ville devient un domaine interministériel avec la création du comité interministériel pour les villes. Pour la première fois, un portefeuille ministériel est consacré à la ville. La question des quartiers est abordée sous les aspects de l'urbanisme, de la sécurité, de l'emploi ou encore de l'éducation. Les émeutes se multiplient.
1984
Les premiers contrats de plan État-régions intègrent le développement social des quartiers (DSQ) : 148 conventions DSQ y sont inscrites concernant environ 170 quartiers, jusqu'en 1988. Le fonds social urbain (FSU) remplace le fonds d'aménagement urbain.
Juin 1984
Création du comité interministériel pour les villes (CIV). Organe transversal, le CIV est chargé de définir, d’animer et de coordonner les politiques relevant de la responsabilité de l’État destinées à améliorer le cadre de vie urbain. Le dispositif est lié au dessaisissement de l’État en matière d’urbanisme par les lois de décentralisation. Le fonds de solidarité urbaine finance des opérations relevant de la solidarité nationale à l’égard des quartiers affectés par de grands déséquilibres sociaux.
15 octobre 1984
Création de l'association SOS Racisme, dont le slogan sera "Touche pas à mon pote".
Février 1985
Mise en place des contrats d’action prévention pour la sécurité dans la ville (CAPS) là où existent des conseils communaux de prévention de la délinquance.
1986
Mise en œuvre d’un programme d’expérimentation du dispositif Régie de quartier. La création de régies de quartier est encouragée pour gérer les espaces publics résidentiels, apporter des services de proximité et promouvoir un petit commerce local.
29 juin 1988
Déclaration de politique générale de Michel Rocard, Premier ministre, devant l’Assemblée nationale et annonce de la création d’une mission interministérielle de la ville.
3 novembre 1988
Publication au Journal officiel du décret n° 88-1015 du 28 octobre 1988 portant création d'un conseil national et d'un comité interministériel des villes et du développement social urbain et d'une délégation interministérielle à la ville et au développement social urbain.
22 mai 1989
La circulaire n° 3464 et la circulaire n° 3465, de Michel Rocard, Premier ministre, définissent les programmes d'action de la politique de la ville.
2 juin 1990
Promulgation la loi n° 90-449 du 31 mai 1990 ("loi Besson") visant à la mise en œuvre du droit au logement. La loi rend obligatoire l’élaboration d’un plan départemental d’action pour le logement des personnes défavorisées et prévoit l’institution d’un fonds de solidarité pour le logement (FSL) ainsi que des protocoles d’occupation du patrimoine social (POPS). Les POPS fixent les objectifs en termes d’accueil de populations défavorisées.
6-10 octobre 1990
À la suite du décès d’un jeune motard lors d’une collision avec un véhicule de police, des affrontements entre jeunes et forces de l'ordre ainsi que des scènes de pillage se déroulent dans la banlieue de Lyon, à Vaulx-en-Velin, dans les nuits du 6 au 10 octobre.
Le 10 octobre, à l’Assemblée nationale, Michel Rocard affirme sa volonté de poursuivre les efforts en matière d’urbanisme notamment à l’encontre "d’une certaine forme d’architecture quasi concentrationnaire dans sa nature et criminogène dans ses résultats".
4-7 décembre 1990
Les 4 et 5 décembre, les troisièmes assises nationales Banlieues 89 consacrées aux quartiers défavorisés des grandes agglomérations urbaines se tiennent à Bron (Rhône).
Le 4 décembre, déclaration de François Mitterrand, qui annonce un plan de rénovation des quartiers défavorisés sur 5 ans et estime qu’il faut "casser partout le mécanisme de la ségrégation". Le président de la République annonce la création d’un ministère chargé de coordonner les actions en faveur de ces quartiers et préconise la solidarité entre les communes riches et les communes pauvres.
Le 5 décembre, intervention de Michel Rocard, Premier ministre, qui précise les modalités du plan proposé par François Mitterrand :
- préparation d’un projet de loi "anti-ghetto" sur la maîtrise foncière, destiné à répartir les logements sociaux sur le territoire urbain ;
- amélioration des carrières des fonctionnaires nommés dans les quartiers difficiles ;
- aides spéciales aux entreprises pour l’embauche des jeunes des grands ensembles.
Le 7 décembre, à Paris, séminaire gouvernemental sur la politique urbaine, destiné à préciser les mesures proposées par François Mitterrand lors des assises :
- globalisation au niveau régional des crédits pour le développement social des quartiers ;
- création à titre expérimental de cinq groupements d’intérêt public (GIP) pour gérer en commun les moyens des collectivités locales et de l’État, et de quinze "maisons de la formation" pour l’accueil et l’orientation des jeunes ;
- diverses mesures destinées à faciliter l’accès des jeunes à des clubs sportifs et à des centres d’animation.
21 décembre 1990
Michel Delebarre est nommé ministre d’État chargé de la politique de la ville. Le décret relatif à ses attributions prévoit que le ministre de la ville, qui est chargé de préparer et de mettre en œuvre la politique de la ville, en animant et coordonnant l’action du gouvernement, a autorité sur la délégation interministérielle à la ville et au développement urbain, et sur la délégation à la rénovation des banlieues. Il dispose en outre des directions d’administration centrale relevant des différents ministères qui contribuent à la politique de la ville.
25 avril 1991
Réunion du CIV sous la présidence de Michel Rocard :
- adoption d’un ensemble de mesures destinées à favoriser l’installation et la formation des fonctionnaires dans les quartiers faisant l’objet de procédures de développement social urbain ;
- allocation de 780 millions de francs au titre de la politique des villes.
13 mai 1991
La loi n° 91-429 du 13 mai 1991 sur la solidarité financière institue trois mécanismes de péréquation en faveur des communes pauvres supportant de lourdes charges liées aux dysfonctionnements urbains :
- la dotation de solidarité urbaine (DSU) ;
- le fonds de solidarité pour les communes d’Île-de-France ;
- la dotation particulière de solidarité urbaine.
Juillet 1991
Lancement de la première opération École ouverte. L'ouverture pendant l’été d’établissements scolaires volontaires aux jeunes de quartiers en difficulté est expérimentée la première année en Île-de-France, elle est étendue à l’ensemble du territoire national à partir de 1997.
19 juillet 1991
Publication au Journal officiel de la loi d'orientation pour la ville, qui établit le droit à la ville et pose les principes de la politique de la ville. Les programmes locaux pour l'habitat (PLH) sont instaurés.
25 juillet 1991
Le CIV désigne les premiers grands projets urbains.
13 mai 1992
Communication en Conseil des ministres de Pierre Bérégovoy, Premier ministre, qui présente les grandes lignes de la politique de rénovation et de sécurité urbaines.
Octobre 1992
Nouvelles émeutes à Vaulx-en-Velin, à la suite de la mort d'un jeune homme de 18 ans tué par balle alors qu'il tentait de forcer un barrage de police.
27-28 avril 1993
Débat à l’Assemblée nationale sur la politique de la ville. Simone Veil, ministre des affaires sociales, de la santé et de la ville, déclare que le gouvernement entend "remettre de l’ordre dans la politique de la ville" en :
- simplifiant les procédures, notamment par l’institution d’un fonds unique d’intervention et par la négociation contractuelle ;
- accroissant la présence de l’État dans les quartiers difficiles ;
- soutenant les acteurs de terrain (2 000 appelés du contingent supplémentaires).
Janvier 1994
Émeutes dans le quartier des Sapins (Rouen), à la suite de la mort d'un jeune homme de 18 ans tué par balle alors qu'il tentait de forcer un barrage de gendarmerie.
3 février 1994
Publication de la circulaire du 26 janvier 1994, qui réaffirme l'amélioration des résultats scolaires comme objectif central des zones d'éducation prioritaires.
11-22 février 1994
Le 11 février, Simone Veil, en déplacement à Vaulx-en-Velin et à Vénissieux (Rhône), annonce que ces deux villes sont sélectionnées parmi les dix villes françaises devant disposer d’un "grand projet urbain" dans le cadre de la politique de la ville.
Le 12 février, à Meyzieu (Rhône), François Mitterrand souhaite que la politique de la ville redevienne l’une des "trois ou quatre priorités" de la politique gouvernementale et regrette que le ministère de la ville n’occupe plus la place qui était la sienne en 1991 lors de sa création.
Le 22 février, réunion à l’hôtel Matignon d’un CIV, sous la présidence d'Édouard Balladur, afin de dresser un bilan du "plan d’urgence pour la ville" décidé en juillet 1993. Une rallonge budgétaire de 100 millions de francs affectés au plan d’urgence est annoncée, ainsi que la préparation d’un projet de loi destiné à donner une priorité de mutation aux fonctionnaires ayant travaillé dans les quartiers difficiles.
1995-2004 : Rénovation urbaine et répression de la délinquance
"Jusqu'ici tout va bien" (La Haine, Mathieu Kassovitz)
La politique de la ville est un outil complexe dont les effets tardent parfois à se faire sentir. Entre gestion interministérielle et crédits déconcentrés, appels à un "urbanisme nouveau" et affinement de la géographie prioritaire, le schéma se répète, les tentatives d'améliorer la vie dans les quartiers se succèdent. Mais aussi le schéma des émeutes et de leur déclenchement. L'État se concentre sur la répression de la délinquance.
1995
Un rapport de la Cour des comptes sur la politique de la ville souligne que l'organisation administrative et les dispositifs budgétaires qui traduisent la politique de la ville sont "inadaptés sur de nombreux points".
Janvier 1995
Création du fonds interministériel d’intervention pour la ville, qui permet notamment de renforcer la gestion interministérielle des crédits déconcentrés de la politique de la ville.
4 février 1995
Promulgation de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire. L'article 2 définit les zones urbaines sensibles, "caractérisées par la présence de grands ensembles ou de quartiers d'habitat dégradé et par un déséquilibre accentué entre l'habitat et l'emploi. Elles comprennent les zones de redynamisation urbaine et les zones franches urbaines".
23 mai 1995
Dans sa déclaration de politique générale, Alain Juppé, Premier ministre, annonce un programme national pour l’intégration urbaine dans le but de créer "un habitat et un urbanisme nouveaux". Il estime nécessaire de réimplanter des services publics dans les quartiers difficiles et d’y appliquer une fiscalité dérogatoire.
31 mai 1995
Sortie nationale du film La Haine, de Mathieu Kassovitz, qui filme la banlieue et traite de la marginalisation des cités ou des violences policières. Après le festival de Cannes, Alain Juppé a tenu à voir La Haine avec quelques-uns de ses ministres, lors d'une projection privée organisée par le Centre national de la cinématographie (CNC).
1er octobre 1995
Émeutes à Vaulx-en-Velin, à la suite de la mort d'un terroriste responsable des attentats de 1995 en France.
18 janvier 1996
Lors d’un Conseil interministériel des villes (CIV) réuni à Marseille, présentation par Alain Juppé des 68 mesures du pacte de relance pour la ville.
Sur le volet économique, sont prévues :
- l’instauration d’une trentaine de zones franches où les entreprises sont totalement exonérées d’impôts et de charges sociales (l’accord de la Commission européenne est nécessaire) jusqu’en 2001, à condition d’embaucher des habitants des quartiers difficiles ;
- l’instauration d’un contrat "emploi-ville", qui devrait bénéficier dans les quatre prochaines années à 100 000 jeunes de 18-25 ans habitant dans les quartiers difficiles (l’État versant en moyenne 55% du salaire) ;
- des aides spécifiques pour le maintien des commerces dans les zones difficiles (création d’un établissement public de restructuration des espaces commerciaux).
Pour renforcer et adapter les services publics dans les quartiers difficiles, sont notamment prévus :
- l’affectation de 4 000 policiers supplémentaires ;
- la création "d’unités à encadrement éducatif renforcé" pour les mineurs délinquants ;
- la priorité accordée aux établissements scolaires de ces quartiers pour l’aménagement des rythmes scolaires ;
- le passage de 7 000 à 10 000 du nombre d’appelés du contingent "service-ville".
28 mars 1996
Présentation de la liste des 38 quartiers en difficulté qui peuvent être classés en zone franche.
14 novembre 1996
Promulgation de la loi n° 96-987 du 14 novembre 1996 relative à la mise en œuvre du pacte de relance pour la ville. À la suite de la loi de 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire, le texte distingue trois niveaux d'intervention :
- la zone urbaine sensible (ZUS) ;
- la zone de redynamisation urbaine (ZRU) ;
- la zone franche urbaine.
Ces trois niveaux, selon l'Institut national de la statistique et des études économiques (Insee), sont "caractérisés par des dispositifs d'ordre fiscal et social d'importance croissante" et "visent à répondre à des degrés différents de difficultés rencontrées dans ces quartiers".
26 décembre 1996
Promulgation des décrets délimitant les zones franches, fixant la liste des zones urbaines sensibles et la liste des zones de redynamisation urbaine (JORF n° 0302 du 28 décembre 1996).
1er juillet 1997
Martine Aubry, ministre de l’emploi et de la solidarité, expose les grands axes de son action et envisage une réorientation en profondeur de la politique de la ville sur la base de "politiques transversales" plutôt que d’une "politique-ghetto de subventions particulières".
13 novembre 1997
Relance de l'éducation prioritaire par la circulaire n° 97-233 du 31 octobre 1997 : la carte des ZEP est révisée et les réseaux d'éducation prioritaire (REP) sont créés. La circulaire s'appuie sur les conclusions du rapport Moisan-Simon.
17 décembre 1997
Émeutes à Dammarie-les-Lys, à la suite de la mort d'un jeune homme de 16 ans tué par balle alors qu'il tentait de forcer un barrage de police.
18 décembre 1997
Émeutes dans le quartier de la Duchère (Lyon), à la suite de la mort d'un homme de 24 ans abattu dans un commissariat.
13 février 1998
Remise à Martine Aubry du rapport "Demain, la ville" de Jean-Pierre Sueur, maire (PS) d’Orléans, qui appelle à une "mobilisation nationale" pour les quartiers dégradés. Le rapport préconise une loi de programmation sur 10 ans pour encadrer un effort "à la hauteur" de celui accompli pour les emplois-jeunes (35 milliards de francs annuels).
Juin 1998
Installation du nouveau Conseil national des villes (CNV) en présence de Lionel Jospin, Premier ministre, qui souligne la volonté gouvernementale d’une "nouvelle ambition pour les villes". Claude Bartolone, ministre de la ville, rend publiques les décisions du nouveau comité interministériel de la ville (CIV) consistant en une "approche globale et de long terme", rompant avec les pratiques de "discrimination positive" envers les quartiers en difficulté.
13 décembre 1998
Émeutes à Toulouse, à la suite de la mort d'un homme de 17 ans pris en flagrant délit de vol de voiture, abattu par la police.
14 décembre 1999
Le CIV détermine un programme autour de trois priorités :
- Engager un programme de renouvellement urbain centré sur 50 grands projets de villes ;
- Revitaliser avec ceux qui vivent dans les quartiers l'économie, l'emploi et le lien social ;
- Faire des services publics des acteurs majeurs de la solidarité et du développement urbain.
8 février 2000
Création de pôles d'excellence scolaire au service des apprentissages, visant à développer, dans les ZEP et les réseaux d'éducation prioritaire, des activités de haut niveau de nature à renforcer les apprentissage et à valoriser l'image des écoles.
13 décembre 2000
Promulgation de la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains (SRU). La loi SRU vise notamment à inciter les communes à construire des logements sociaux afin de favoriser la mixité sociale.
14 décembre 2000
À Paris, rencontre nationale des grands projets de ville (GPV), programme sur six ans visant à réinsérer les quartiers difficiles dans leur environnement urbain. Lancement de 52 sites.
Avril 2001
Signature de près de 250 contrats de ville pour la période 2000-2006. Les contrats de ville constituent le cadre d’action de la politique de la ville pour les quartiers prioritaires. Ils reposent sur un partenariat, en termes de pilotage et de financement, entre l’État, les établissements de coopération intercommunale (EPCI), les villes, le conseil régional, les bailleurs sociaux et les opérateurs publics (organismes d’emploi et de protection sociale…) ainsi que des représentants de la société civile, en particulier les associations et habitants des quartiers concernés, à travers les conseils citoyens.
1er octobre 2001
À la suite d'un CIV, Lionel Jospin, Premier ministre, se rend à Trappes (Yvelines) pour présenter un plan en faveur des quartiers en difficulté d’un montant de 5,34 milliards d’euros sur cinq ans :
- accélération du programme de démolition de tours et de barres (démolition de 30 000 logements HLM par an dans les années à venir) ;
- extension du programme de renouvellement urbain décidé lors du CIV de décembre 1999 ;
- programme de grands travaux visant à rompre l’enclavement de certains quartiers ;
- amélioration de la qualité de la vie et de la sécurité (augmentation du nombre de gardiens d’immeubles, mesures de sécurisation en faveur des professionnels de santé, possibilité, pour les collectivités locales, les établissements scolaires et les organismes HLM, de recruter des adultes-relais).
1er février 2002
Un nouveau rapport de la Cour des comptes sur la politique de la ville souligne qu'elle repose sur une dynamique d'action "horizontale", interministérielle et insuffisamment développée, qu'il est difficile de faire coexister avec l'organisation "verticale" des services de l'État. Selon la Cour des comptes, "la délégation interministérielle à la ville n'assure pas de manière pleinement satisfaisante sa mission de pilotage auprès des services déconcentrés".
30 octobre 2002
Jean-Louis Borloo, ministre délégué à la ville et à la rénovation urbaine, présente la politique de la ville comme une "priorité nationale destinée à maintenir la cohésion sociale".
29 janvier 2003
Présentation en Conseil des ministres d’une communication sur les zones franches urbaines (ZFU), qui prévoit la création de 41 nouvelles ZFU à partir de 2004, venant s’ajouter aux 44 ZFU existantes.
3 février 2003
Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, déclare lors d'un déplacement à Toulouse, dans le quartier du Mirail : "La police n'est pas là pour organiser des matchs de rugby dans les quartiers mais pour arrêter les délinquants." Cela marque un tournant et l'abandon d'une police de proximité que le gouvernement précédent avait tenté de mettre en place.
1er août 2003
Promulgation de la loi n° 2003-710 du 1er août 2003 d’orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine. Le texte prévoit :
- un programme de reconstruction urbaine représentant 30 milliards d’euros d’investissement sur 5 ans (objectif de construction de 200 000 logements locatifs sociaux, 200 000 réhabilitations ou reconstructions lourdes, 150 000 à 200 000 démolitions de logements vétustes) ;
- la création d’une Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) et d'un Observatoire national des zones urbaines sensibles (Onzus) ;
- le soutien à la création d’emplois et à l’activité économique ;
- le traitement des problèmes des familles surendettées ;
- la solidarité envers les communes les plus pauvres.
11 septembre 2003
La circulaire "Éducation prioritaire : des objectifs et des méthodes pour lutter contre la fracture scolaire et élaborer des contrats de réussite scolaire" réaffirme la priorité des apprentissages scolaires – langue, lecture, écriture – et insiste sur la continuité des apprentissages entre école, collège et lycée.
2005-2016 : Émeutes nationales et réforme de la politique de la ville
"Il n'y a pas de solution miracle face à la situation des quartiers" (Dominique de Villepin)
En réponse à la mort de deux jeunes gens, électrocutés dans un transformateur EDF alors qu'ils tentaient d'échapper à la police, des émeutes éclatent partout en France. D'aucuns critiquent une escalade répressive. La loi Lamy de 2014 réforme la politique de la ville et crée les quartiers prioritaires de la politique de la ville.
18 janvier 2005
Promulgation de la loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale, qui comporte trois axes : l'emploi, le logement et l'égalité des chances.
27 octobre - 24 novembre 2005
Des violences urbaines éclatent à Clichy-sous-Bois (Seine-Saint-Denis), le 27 octobre, à la suite de l’électrocution de trois jeunes gens, dont deux décèdent, dans un transformateur EDF en essayant d’échapper à la police.
Le 2 novembre, intervenant en Conseil des ministres, Jacques Chirac, président de la République, souhaite que "les esprits s’apaisent" et demande au gouvernement de présenter "dans un délai d’un mois" des propositions pour "renforcer" l’égalité des chances.
Dominique de Villepin, Premier ministre, annule son voyage au Canada et réunit les ministres concernés par "la mise en œuvre des actions dans les zones urbaines sensibles".
Le 6 novembre, à l’issue d’une réunion du Conseil de sécurité intérieure, Jacques Chirac souligne la nécessité de rétablir la sécurité et l’ordre public. Le Syndicat de la magistrature dénonce une "escalade répressive" dans les choix du gouvernement pour endiguer les violences urbaines.
Le 7 novembre, Dominique de Villepin annonce le prochain recours au couvre-feu et l’appel à 1 500 réservistes en plus des 8 000 policiers et gendarmes déjà mobilisés. Il annonce par ailleurs des mesures d’ordre social (apprentissage dès l’âge de 14 ans, multiplication des bourses scolaires, augmentation de l’aide aux associations) et souhaite renforcer les pouvoirs du maire en matière d’ordre public.
Le 8 novembre, le Conseil des ministres prend un décret permettant d’imposer un couvre-feu "dans des zones qui seront définies", en se fondant sur la loi n° 55-385 du 3 avril 1955 qui institue l’état d’urgence dans le contexte de la guerre d’Algérie.
Le 9 novembre, Nicolas Sarkozy, ministre de l’intérieur et de l’aménagement du territoire, annonce avoir demandé aux préfets d’expulser tous les étrangers condamnés dans le cadre des violences urbaines ; les sénateurs Verts réclament la création d’une commission d’enquête parlementaire sur la gestion des forces de l’ordre par Nicolas Sarkozy.
Le 14 novembre, présentation en Conseil des ministres d’un projet de loi prorogeant, à compter du 21 novembre, l’état d’urgence pour une durée de 3 mois ; allocution radiotélévisée de Jacques Chirac, qui annonce certaines mesures pour aider les jeunes des quartiers difficiles à sortir de la "crise d’identité".
Le 17 novembre, la police fait état d’un "retour à une situation normale partout en France".
Le 24 novembre, Nicolas Sarkozy affirme que les services de police ont effectué 1 540 interpellations dans le cadre des enquêtes judiciaires en banlieue et ont arrêté 3 200 personnes impliquées dans les violences.
8-22 novembre 2005
Dominique de Villepin, Premier ministre, annonce, le 8 novembre, la création de :
- 15 ZFU supplémentaires ;
- 20 000 contrats d’accompagnement pour l’emploi et de contrats d’avenir pour les jeunes des quartiers difficiles.
Le 13 novembre, lors d’une rencontre avec Dominique de Villepin, José Manuel Barroso, président de la Commission européenne, évoque la mise à disposition des 50 millions d’euros de l'initiative Urban II, destinée au soutien des quartiers en difficulté dans les grandes villes européennes, et des fonds régionaux et sociaux auxquels la France a droit jusqu’à la fin 2006 (soit 1 milliard d’euros).
Le 14 novembre, Jacques Chirac, président de la République, annonce la création d’un service civil volontaire, associant accompagnement et formation, pour 50 000 jeunes à partir de 2007.
Le 18 novembre, Brice Hortefeux, ministre délégué aux collectivités locales, annonce un "effort particulier" en faveur des communes comportant des quartiers sensibles, comme celles de Seine-Saint-Denis, en proie depuis le 27 octobre à de graves violences.
Le 21 novembre, lors d’une réunion à l’Élysée avec le bureau de l’Association des maires de France (AMF) et les représentants des commissions ville et logement, Jacques Chirac rappelle son attachement à la mise en œuvre de la loi sur les quotas de logements sociaux dans les communes. Le même jour, lors de l’adoption par les députés des crédits 2006 de la mission ville et logement, Catherine Vautrin, ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité, souligne que le rétablissement des crédits du fonds d’intervention pour la ville (FIV) en faveur des associations des quartiers difficiles correspond non seulement à la volonté du gouvernement de "reconnaître leur action" mais aussi de la "conforter".
Le 22 novembre, dans un discours devant le congrès de l’AMF, Dominique de Villepin souhaite que la mise en vente des terrains de l’État pour la construction de logements sociaux soit accélérée.
Décembre 2005
Le décret n° 2005-1621 du 22 décembre 2005 et le décret n° 2005-1646 du 27 décembre 2005 instituent six préfets délégués à l'égalité des chances et désignent les départements dans lesquels ils sont nommés :
- Bouches-du-Rhône ;
- Essonne ;
- Nord ;
- Rhône ;
- Seine-Saint-Denis ;
- Val-d'Oise.
9 mars 2006
CIV à propos de la création de 15 nouvelles zones franches urbaines, portant ainsi leur nombre total à 100, et des "contrats urbains de cohésion sociale" destinés à prendre la suite des contrats de ville dès 2007. L’accélération du programme de rénovation urbaine et son prolongement de 2 ans jusqu’en 2013 sont également annoncés.
30 mars 2006
La circulaire "Principe et modalités de la politique de l'éducation prioritaire" du 30 mars 2006 présente un plan de relance de l'éducation prioritaire. Près de 250 réseaux ambition réussite (RAR), dotés de moyens supplémentaires, sont créés. Les ZEP et REP deviennent des réseaux de réussite scolaire (RRS) pilotés au niveau académique. Chaque RAR ou RRS est composé d'un seul collège et des écoles de son secteur de recrutement.
31 mars 2006
Promulgation de la loi n° 2006-396 du 31 mars 2006 pour l'égalité des chances, qui instaure le service civil volontaire, avec un objectif de 50 000 jeunes volontaires en 2007. En 2009, seulement 3 000 jeunes ont effectivement signé un contrat de service volontaire (exposé des motifs de la proposition de loi relative au service civique, 14 septembre 2009).
La loi accroît le nombre de ZFU et crée l'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances (Acsé).
13 juillet 2006
Promulgation de la loi n° 2006-872 du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le logement, visant à encourager les mairies à construire et à développer l'offre de logements en location à loyer maîtrisé, mais aussi à lutter contre l'habitat indigne.
2007
Mise en place des contrats urbains de cohésion sociale (CUCS), jusqu'en 2010. Les CUCS remplacent les contrats de ville, créés en 2001. Les CUCS sont des contrats passés entre l'État et les collectivités territoriales qui engagent chacun des partenaires à mettre en œuvre des actions concertées pour améliorer la vie quotidienne des habitants dans les quartiers connaissant des difficultés (chômage, violence, logement…).
Des fonds européens financent des projets urbains intégrés (PUI).
25 novembre 2007
Émeutes à Villiers-le-Bel (Val-d'Oise), à la suite de la mort de deux adolescents tués dans la collision entre leur moto et un véhicule de police.
20 juin 2008
Fadela Amara, secrétaire d'État chargée de la politique de la ville, présente le plan Espoir banlieues, dans le cadre du comité interministériel des villes et du développement social urbain. Nicolas Sarkozy, président de la République, présente un nouveau plan banlieue, intitulé "Une nouvelle politique en faveur des banlieues", dont l'ambition est de mettre en relation l'ensemble des acteurs concernés par la politique de la ville.
14 mai 2009
La décret n° 2009-539 du 14 mai 2009 relatif aux instances en charge de la politique de la ville remplace la délégation interministérielle à la ville par le secrétariat général du comité interministériel des villes.
3 novembre 2009
Le Sénat publie un rapport sur l'enquête de la Cour des comptes sur l'articulation entre les dispositifs de la politique de la ville et de l'éducation prioritaire dans les quartiers sensibles. Le rapport souligne l'urgence d'une meilleure cohérence territoriale entre la politique de la ville et l'action de l'Éducation nationale.
2010
Les CUCS sont prolongés jusqu'en 2014.
2011
Le programme ÉCLAIR (école, collège, lycée, ambition, innovation, réussite) vise à donner plus d'autonomie aux établissements et aux réseaux afin de développer l'innovation. Il crée la mission de préfet des études : un professeur coordonnateur par niveau au collège, chargé de renforcer les liens entre le pédagogique et l'éducatif, entre le premier degré et les parents.
17 juillet 2012
La Cour des comptes publie un rapport sur une décennie de réformes concernant la politique de la ville. La Cour des comptes fait un bilan de l'application de la loi de 2003 d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine et plus particulièrement de l'avancement du programme national de rénovation urbaine (PNRU) et son articulation avec les dispositifs d'accompagnement social. Le rapport constate une persistance des inégalités entre les quartiers prioritaires et les territoires voisins et analyse les facteurs pouvant expliquer ces résultats décevants.
Octobre 2012
Une concertation nationale sur la politique de la ville est organisée.
19 février 2013
Jean-Marc Ayrault, Premier ministre, à l'issue d'un CIV, dresse le bilan de la concertation nationale sur la politique de la ville. Il souligne, au sujet des "banlieues", que les "inégalités ont recommencé à s'accroître depuis une dizaine d'années. Dans ces quartiers, plus d'une personne sur trois vit en dessous du seuil de pauvreté au lieu d'une sur huit partout ailleurs. Le taux de chômage y est deux fois plus élevé. Près d'un jeune sur quatre y sort sans qualification du système éducatif, contre un sur neuf dans les quartiers urbains environnants".
Le rapport de synthèse de la concertation préconise la mise en œuvre de deux réformes principales :
- la réduction du nombre de territoires bénéficiant des crédits de la politique de la ville afin de mieux cibler les problèmes de ces territoires et de répondre à leur complexité ;
- l'élaboration de nouveaux contrats entre l'État et les collectivités qui incluraient à la fois la dimension urbaine et la dimension sociale.
Juillet 2013
Émeutes à Trappes (Yvelines), à la suite d'un contrôle de police qui vise une jeune femme portant le voile intégral.
17 décembre 2013
L'article 36 du règlement (UE) 1303/2013 du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 met en place l'investissement territorial intégré (ITI). Cet instrument permet d'élaborer une stratégie intégrée sur un territoire donné de manière transversale et en couplant les budgets de plusieurs axes prioritaires. Les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) feront partie des territoires concernés en France.
21 février 2014
La loi du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine, dite "loi Lamy", est issue des réflexions du CIV du 19 février 2013.
La loi instaure la notion de QPV. Elle recentre la politique de la ville sur la réduction des écarts entre les 1 514 QPV et les autres quartiers. Le législateur inscrit le principe d'une co-construction de la politique de la ville avec les habitants.
La loi crée un contrat de ville piloté à l'échelle intercommunale et lance le nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU).
La loi instaure un contrat urbain unique pour la ville et la cohésion sociale permettant la mobilisation de l'ensemble des politiques publiques afin de rétablir l'égalité dans les QPV.
La loi crée l'Observatoire national de la politique de la ville (ONPV), qui remplace l'Onzus.
24 mars 2014
Promulgation de la loi du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et l'urbanisme rénové, dite "loi ALUR", qui vise à combattre :
- la forte augmentation des prix des logements ;
- la pénurie de logements ;
- la baisse de pouvoir d'achat des ménages.
La loi renforce l'encadrement des loyers dans les zones dites "tendues" et porte à 25% la part d'obligation de certaines villes en logements sociaux.
4 juin 2014
La refondation de l'éducation prioritaire conduit à une révision de son périmètre, en prenant en compte les difficultés sociales et scolaires des collèges évaluées selon un indice construit sur quatre indicateurs :
- le taux d'élèves défavorisés ;
- le taux de boursiers ;
- le taux de retard d'entrée en 6e ;
- le taux d'élèves résidant dans ou à moins de 300 mètres d'un QPV.
17 juin 2014
Najat Vallaud-Belkacem, ministre des droits des femmes, de la ville, de la jeunesse et des sports, présente la nouvelle géographie prioritaire : 1 300 quartiers, contre 2 600 auparavant, sont concernés afin de concentrer les efforts sur les quartiers les plus pauvres.
30 juillet 2014
Une circulaire du Premier ministre du 30 juillet 2014 pose les principes des contrats de ville de nouvelle génération pour la période 2015-2020.
6 mars 2015
Dans le cadre d'un comité interministériel sur l'égalité et la citoyenneté, Manuel Valls, Premier ministre, évoque en France "un profond malaise, social et démocratique" et "une crise des valeurs". Il évoque l'"apartheid" afin de désigner les quartiers populaires et prône "une République ferme et bienveillante".
19 janvier 2016
Installation de l'Observatoire national de la politique de la ville.
2017-2023 : Rapport Borloo et nouvelles émeutes
"Près de 6 millions d’habitants vivent dans une forme de relégation voire parfois, d’amnésie de la nation" (Jean-Louis Borloo)
L'élection d'Emmanuel Macron à la présidence de la République suscite un espoir des banlieues avec la promesse d'une mobilisation générale en faveur des quartiers. Le rapport Borloo pour les banlieues propose des programmes destinés à tenir cette vieille promesse du politique : rétablir l'égalité républicaine dans les quartiers. Mais le plan ne sera pas mis en œuvre. Entre crise des Gilets jaunes et plans destinés aux centres des villes moyennes, la banlieue peut sembler délaissée. En juin 2023, la mort d'un jeune homme, abattu par un policier, provoque de nouvelles violences dans les quartiers.
17 octobre 2017
À la suite des premiers états généraux de la politique de la ville, élus locaux et associations lancent l'appel de Grigny, réclamant entre autres dix mesures préalables d'urgence concrètes à mettre en œuvre avant le budget 2018, précédant un plan national de solidarité :
- Suspension de la réduction des contrats aidés ;
- Rétablissement des financements de la politique de la ville réduits pendant l'été ;
- Création d'un fonds d'urgence doté de 100 millions d'euros pour 100 quartiers ;
- Doublement du budget de la politique de la ville ;
- Fléchage des moyens de la formation professionnelle ;
- Rétablissement et renforcement des effectifs de police et des moyens de justice dans les territoires les plus fragiles ;
- Désignation d'un ministre de la ville ayant le rang d'un ministre d'État ;
- Désignation d'un président de l'ANRU qui rendra à l'agence sa vocation initiale et suppression des règles "complexes et bureaucratisées" imposées à l'agence ;
- Lancement, avec l'aide de l'État et du Parlement, de territoires d'expérimentations de projets et de reconquête républicaine ;
- Création d'une plateforme nationale qualifiée de recensement des solutions et des initiatives issues des quartiers, accompagnée d'un fonds doté de 100 millions d'euros.
14 novembre 2017
Emmanuel Macron, président de la République, définit les grands principes d'un plan de mobilisation en faveur des quartiers et décrète une mobilisation générale en faveur des quartiers.
Le président répond entre autres à l'appel de Grigny : "Les difficultés que nous avons connues depuis trente ans ont conduit à créer […] une société de statut, où le déterminisme social est plus fort, et où l'assignation à résidence est aussi devenue plus grande. […] Aujourd'hui, nous ne pouvons pas accepter que plus de 40% des habitants de nos quartiers soient sous le seuil de pauvreté, que le taux de chômage soit près de trois fois supérieur aux autres territoires, que moins de la moitié des femmes soient en activité et, lorsqu'elles le sont, dans des emplois fragmentés, précaires, que les enfants de ces quartiers aient une réussite au brevet des collèges de huit points inférieure à celle de leurs homologues de la ville voisine, que les quartiers politiques de la ville comptent deux fois moins de médecins que leurs ville d'appartenance, que les quartiers politique de la ville comptent près de cinq fois moins de crèches, sans parler des bureaux de Poste qui ont fermé, des transports qui tardent à arriver, des bibliothèques aux horaires inadaptés."
26 mars 2018
Mise en place du programme Action cœur de ville, qui concerne 234 villes ou binômes de villes. Le programme est destiné à redonner de l'attractivité et du dynamisme aux centres des villes moyennes.
26 avril 2018
Jean-Louis Borloo remet un rapport intitulé "Vivre ensemble, vivre en grand : pour une réconciliation nationale", visant à présenter des propositions en vue de l'élaboration du plan banlieues prôné par Emmanuel Macron. Le plan se décline en 19 programmes :
- La qualité urbaine pour tous
- La mobilité, un droit et une nécessité
- Investir dans la petite enfance
- De l’école à la "cité éducative"
- Grandir par la culture
- Développer et insérer nos quartiers par le sport
- Tout passe par l’entreprise et l’emploi
- Un plan national pour gagner la bataille contre l’illettrisme et l’illectronisme, former aux savoirs de base
- 200 quartiers d’excellence numérique
- Reconnaître les nouveaux visages de Marianne
- L’académie des leaders, la nouvelle grande école
- Une nouvelle armée de la république solidaire
- Agir fermement pour la sécurité et la justice
- Des moyens d’agir pour les communes
- "La nation garantit à tous la protection de la santé"
- Les associations : le cœur des quartiers
- Lutter contre les discriminations
- Une Cour d’équité territoriale
- À la rencontre de l’Autre
Selon le rapport, "la situation est facile à résumer : près de 6 millions d’habitants vivent dans une forme de relégation voire parfois, d’amnésie de la nation réveillée de temps à autres par quelques faits divers ; un effort public en berne ; des maires de banlieues qui se battent en première ligne, qui craquent parfois et jettent l’éponge, des agents publics et des bénévoles épuisés.[…] L’archipel des 1 500 quartiers de la politique de la ville (QPV), c’est l’équivalent de la population cumulée des 10 premières villes de France. Parmi eux, 216 connaissent des difficultés urbaines plus graves encore, 60 sont en risque de fracture et 15 en risque de rupture".
Le rapport revient aussi sur une idée reçue, selon laquelle "trop d'argent aurait été déversé pour les quartiers". Dans les faits, les communes des QPV ont plus de besoins mais moins de ressources (30% de capacité financière en moins pour un taux d'imposition deux fois plus élevé et des besoins de 30% supérieurs).
22 mai 2018
Emmanuel Macron annonce que le rapport de Jean-Louis Borloo ne sera pas suivi d'un plan pour les banlieues, car "on est au bout de cette méthode" et "poursuivre dans cette logique c'est vouloir poursuivre dans l'assignation à résidence, la politique spécialisée, une forme de politique de clientèle en quelque sorte, qui ne bougerait pas, qui serait allouée à certains quartiers, certains espaces".
10 décembre 2018
Face au mouvement des Gilets jaunes, Emmanuel Macron décrète un "état d'urgence économique et sociale" et présente des mesures en faveur du pouvoir d'achat.
Le mouvement des Gilets jaunes met en évidence un autre malaise, celui de la "France des ronds-points".
2019
Le programme des cités éducatives, issu du rapport Borloo, vise à dynamiser les QPV en mobilisant autour de l'enjeu éducatif. Elles ont pour objectif d'accompagner les parcours individuels éducatifs depuis la petite enfance jusqu'à l'insertion professionnelle. Un rapport de l'Institut national de la jeunesse et de l'éducation populaire (Injep), de 2022, souligne une absence de vision homogène et le manque de perspectives à long terme et de moyens humains du programme.
Mars 2020
L'Organisation mondiale de la santé (OMS) estime que l'épidémie de Covid-19 peut être qualifiée de pandémie. Des mesures de confinement sont prises partout dans le monde afin de lutter contre la pandémie.
Dans une étude sur les inégalités sociales face à l’épidémie de Covid-19, la Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees) souligne que " les populations des banlieues et quartiers populaires présentent plus souvent des facteurs de risques face au coronavirus. Elles sont aussi plus souvent concernées par de mauvaises conditions de logement, ainsi que par le maintien d’une activité professionnelle qui suppose d’emprunter les transports en commun. La surmortalité apparue en Seine-Saint-Denis pendant le pic de l’épidémie pourrait donc être le résultat de plusieurs mécanismes cumulatifs, qui mériteraient d’être analysés en détail, et donc de faire l’objet de futurs travaux".
Dans son rapport pour l'année 2020, l'ONPV observe qu'"en mars 2020, les résidents des QPV étaient deux fois plus fréquemment positifs à la Covid-19 que ceux des autres quartiers".
14 novembre 2020
Dans le contexte de l'examen du projet de loi de finances pour 2021, une centaine de maires, dans l'Appel du 14 novembre, demandent que 1% du plan de relance soit consacré aux quartiers les plus fragiles.
2 décembre 2020
Un rapport de la Cour des comptes sur l'évaluation de l'attractivité des quartiers prioritaires, dans le contexte des 40 ans de la politique de la ville, souligne qu'en dépit des 10 milliards d'euros annuels qu'y consacre l'État, l'attractivité des QPV a peu progressé en 10 ans.
29 janvier 2021
À la suite de l'appel du 14 novembre, le Premier ministre, Jean Castex, relance les CIV. Par la suite, un CIV décentralisé se tiendra tous les six mois. Le ministère de la ville ayant été intégré au ministère de la cohésion des territoires et n'étant donc plus un ministère de plein exercice, Jean Castex prend en charge la responsabilité interministérielle du CIV et du comité de suivi.
2021
Des expérimentations sur les contrats locaux d'accompagnement (CLA) sont mises en place dans les académies d'Aix-Marseille, de Lille et de Nantes pour introduire plus de progressivité dans l'allocation des moyens en faveur des écoles, des collèges et des lycées socialement proches de l'éducation prioritaire.
19 juillet 2022
La commission des affaires économiques du Sénat remet un rapport sur la politique de la ville, un tremplin pour les habitants. Le rapport souligne que :
- le premier quinquennat d'Emmanuel Macron a été "celui du "stop & go" entre les quartiers et le gouvernement" (espoirs du plan Borloo puis son classement sans suite, oubli des quartiers dans plan de relance, crise sanitaire…) ;
- l'inégalité territoriale est toujours un enjeu actuel (40% de QPV n'ont pas de crèche ; les QPV disposent de 50% de médecins spécialistes en moins) ;
- les QPV ont une fonction de sas ou de tremplin (mobilité résidentielle et de revenus) ;
- les QPV ont une contribution bien réelle à l'économie (la Seine-Saint-Denis, département le plus pauvre de France, est le 8e contributeur net à la protection sociale et celui où la masse salariale a le plus augmenté entre 2007 et 2018) ;
- la promotion des modèles d'une réussite accessible a un vrai impact dans les quartiers (programme Entrepreneuriat pour tous et dans tous les territoires) ;
- la priorité est d'améliorer les outils de la politique de la ville ;
- l'ONPV, passé de dix équivalents temps plein (ETP) lors de sa création à deux ETP en 2022 est "en état de mort cérébrale".
27 juin 2023
Émeutes à Nanterre puis dans toute la France, durant près d'une semaine, à la suite de la mort d'un jeune homme de 17 ans tué par un policier lors d'un contrôle routier.
Les émeutes débouchent sur plus de 3 500 gardes à vue, beaucoup concernant des mineurs.