L'acte administratif unilatéral (AAU) est l'instrument par excellence de l'action administrative : il s'agit d'un acte par lequel l'administration modifie l'ordonnancement juridique, produisant des effets à l'égard des administrés. Un AAU peut être adopté pour :
- fixer de nouvelles règles juridiques qui créent de nouveaux droits et obligations ;
- modifier des normes existantes.
L'AAU peut être établi par une personne publique, mais aussi par une personne privée chargée de la gestion d’un service public administratif, ou, plus rarement, d’un service public à caractère industriel et commercial.
Contrairement à un contrat, qui repose sur l’accord des deux parties, un acte administratif unilatéral est édicté par l'administration seule. Il bénéficie du "privilège du préalable", c'est-à-dire qu'il peut être pris :
- sans consentement préalable des administrés : ceux-ci sont obligés de se conformer à l'acte, qui est directement exécutoire, même s'ils l'estiment contestable. Si l'AAU fait l'objet d'un recours, il continue en principe de produire ses effets, tant qu'il n'a pas été annulé par le juge administratif (s'il conclut à son illégalité) : il bénéficie d'une véritable présomption de légalité.
- sans besoin de recourir au juge avant d'être mis en œuvre. Le juge administratif affirme même qu’il est vain pour l’administration de lui demander la permission d’agir, alors qu’elle n’en a pas besoin (Conseil d’État, Préfet de l’Eure, 30 mai 1913).
Les actes administratifs unilatéraux sont de deux types :
- les AAU réglementaires, pris en application du pouvoir réglementaire dont disposent certaines autorités administratives. Les décrets, arrêtés, délibérations des assemblées des collectivités locales ont une portée générale et impersonnelle : ils ne s’adressent pas à des personnes nommément désignées. Différentes autorités peuvent les prendre. Les décrets relèvent de la compétence du président de la République ou du Premier ministre, les arrêtés ont pour auteur les ministres, les préfets, les maires, les présidents de conseil départemental ou régional ;
- les AAU non réglementaires concernent une ou des personnes nommément désignées (ex : permis de construire, refus de titre de séjour, arrêté de nomination…). On parle alors d’actes individuels. Ils peuvent être émis par toute autorité administrative, à condition toutefois qu’ils présentent bien un caractère décisoire (exemple contraire : le courrier d’une autorité administrative rappelant à un administré les conditions pour bénéficier d’une prestation n’est pas un AAU).
Le fait de caractériser une mesure prise unilatéralement par l'administration d'acte administratif est important afin de déterminer si elle peut faire l'objet d'un recours. La possibilité de soumettre les AAU au contrôle du juge administratif s'explique par leur caractère décisoire - et donc les effets juridiques qu'ils sont susceptibles de produire.
En principe, les mesures non décisoires ne peuvent à l'inverse faire l'objet d'un contrôle. Néanmoins, la jurisprudence du Conseil d’État a contribué à étendre progressivement son contrôle à des actes dits "de droit souple" (qui n'ont pas de caractère décisoire).
C'est le cas pour certaines circulaires. En principe, ce type d'acte de droit souple n'étant pas à proprement parler une décision administrative (les circulaires n'ajoutent pas d'éléments à la loi mais l'explicitent, et n'ont pas vocation à être impératives), elles ne sont pas soumises au contrôle du Conseil d’État. La jurisprudence du Conseil a néanmoins progressivement évolué afin d'inclure dans son contrôle certaines circulaires qui allaient au-delà d’une simple interprétation. Il exerce aujourd'hui un contrôle vis-à-vis de toutes celles qui sont susceptibles d'avoir des effets notables sur les droits ou la situation des administrés (décision du 12 juin 2020). Le Conseil d’État vérifie ainsi la légalité de ces circulaires, et conclut souvent à l'incompétence de l'auteur de la circulaire, qui a exercé un pouvoir réglementaire dont il ne dispose pas.