Le premier élément est la qualité de la rédaction. Le texte retenu par le Conseil d’État doit comporter des dispositions suffisamment précises et des formules non équivoques, claires et intelligibles. On appelle aujourd'hui "légistique" l’ensemble des règles à respecter dans la rédaction des textes afin de contribuer à l’intelligibilité du droit.
Le Conseil d’État et le Secrétariat général du Gouvernement ont édité un Guide de légistique, composé de fiches régulièrement mises à jour sur le site Légifrance. Le Conseil d’État peut en outre, de façon générale, appeler l’attention du Gouvernement sur des améliorations à apporter à l’écriture des textes (voir par exemple : "Recommandations au Gouvernement sur la rédaction des dispositions d’application outre-mer des textes législatifs et réglementaires", adoptées par l’assemblée générale du Conseil d’État le 7 janvier 2016, in Commission supérieure de codification, Rapport annuel 2015).
Le deuxième élément est la sécurité juridique du texte. L’examen du Conseil d’État doit avoir pour objectif de transmettre au Gouvernement un texte qui n’encourt pas de risque d’annulation. Le rapporteur examine en particulier l’effectivité des consultations requises, le caractère normatif des dispositions, les modalités d’application à l’outre-mer, la pertinence des dispositions transitoires et le respect de la hiérarchie des normes.
Sur ce dernier point, il examine les éventuelles incompatibilités du texte étudié avec les normes internationales, européennes et constitutionnelles (bien que le contrôle de constitutionnalité relève de la compétence exclusive du Conseil constitutionnel). Comme l’observait le vice-président du Conseil d’État, "il répond de moins en moins à la demande suivante : “Qu’en pense le Conseil d’État ?”, mais bien plutôt à cette question : “Que pense le Conseil d’État de ce que pensera demain de ce texte le Conseil constitutionnel, la Cour européenne des droits de l’homme ou la Cour de justice de l’Union ?" (Jean-Marc Sauvé, intervention devant le Parlement de la République de Croatie, 3 mars 2015).
Il contrôle également la qualité de l’étude d’impact, imposée pour les projets de loi par la loi organique prévue à l’article 39 alinéa 3 de la Constitution (chapitre II de la loi organique no 2009-403 du 15 avril 2009 relative à l’application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution).
Le Conseil d’État vérifie, pour les ordonnances et les décrets, la présence des contreseings exigés par les articles 19 ou 22 de la Constitution.
Le troisième élément est la recherche de l'opportunité du texte qui participe à l'objectif d’une bonne administration.
Il s’agit de s’interroger non sur l’opportunité politique du texte, mais sur le réalisme et l’efficacité de ses dispositions. Le Conseil d’État s'assure de l'utilité et de la nécessité du texte au regard des objectifs poursuivis, et de son insertion au sein de l'ensemble des normes juridiques existantes. Il examine également les conditions de mise en œuvre du texte et analyse la pertinence des moyens juridiques proposés, notamment au regard de la capacité des services administratifs à appliquer les dispositions étudiées.
À cet égard, la connaissance par les membres du Conseil d’État du fonctionnement de l’administration revêt un caractère très précieux pour apprécier les conditions envisagées de la mise en œuvre du texte.