Les accords commerciaux régionaux font-ils concurrence à l'OMC ?

Relations internationales

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L’essentiel

  • Les accords commerciaux régionaux (ACR) sont des exceptions à la règle de l'OMC qui prévoit des accords commerciaux multilatéraux fondés sur la non-discrimination entre partenaires commerciaux (clause de la nation la plus favorisée).
  • De nombreux États privilégient les accords régionaux signés entre deux ou plusieurs pays, jugés plus souples que les accords conclus dans le cadre de l'OMC.
  • S'ils peuvent compliquer la lisibilité des règles commerciales mondiales, ces accords peuvent également favoriser l'intégration des pays vulnérables dans le commerce international.
     

En détail

Les accords commerciaux régionaux (ACR) sont des accords de commerce conclus entre deux ou plusieurs pays, qui ne se situent pas forcément dans la même zone géographique. Les ACR se mettent en place parallèlement aux accords multilatéraux conclus dans le cadre de l’Organisation mondiale du commerce (OMC). Ils constituent des exceptions au système élaboré par l'OMC, fondé sur la liberté commerciale et sur la non-discrimination entre les partenaires. 

Un ACR peut consister :

  • en l'institution d'une zone de libre-échange (ZLE), qui consiste à éliminer les barrières tarifaires entre les États de la zone ;
  • en une union douanière, qui va au-delà de la ZLE en adoptant par ailleurs des tarifs extérieurs communs à l'ensemble des États de l'union.

Les règles fondamentales de l'OMC n'interdisent pas la constitution de tels instruments d'intégration régionale, sous réserve du respect de certaines règles. Par exemple, les États membres doivent notifier leurs ACR à l'OMC. Les ACR dérogent à la clause de la nation la plus favorisée, qui prévoit que chaque État membre doit bénéficier des mêmes avantages commerciaux que ceux accordés aux autres. 

Ces accords peuvent ainsi apparaître comme un système concurrent visant à contourner les contraintes de l’OMC.

La multiplication de négociations d’ACR est intervenue au moment de l'échec des négociations commerciales entre les membres de l'OMC lors du cycle de Doha en 2001. Issus de négociations plus restreintes, ces accords sont en effet supposés assurer la protection des pays les plus vulnérables, noyés dans le cadre de l’OMC.

De fait, l’OMC dénombre 369 accords commerciaux régionaux en vigueur en 2024 contre 20 en 1980. Le commerce mondial serait aujourd’hui pour moitié un commerce régional, et concernerait de plus en plus des pays de zones géographiques distinctes. Afin d’analyser leurs implications sur le système commercial multilatéral, l’OMC a mis en place, dès 1996, un comité des accords commerciaux régionaux (CACR).

Les regards sur les effets de l'explosion du nombre d'ACR divergent : 

  • pour certains, le nombre de ces accords complexifie la lisibilité du commerce international, par la superposition de normes parfois contradictoires ;
  • d'autres considèrent au contraire qu’en imposant des règles plus rigoureuses que l’OMC, le régionalisme peut apparaître comme un facteur d’intégration dans l’espace mondial, voire constituer un laboratoire d’expérimentation. C’est le cas de l’Union européenne (UE), construite selon les principes du libéralisme et de l’absence de discrimination dans les relations commerciales entre les États membres.

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Qu'est-ce que l'OMC ?

Bonjour, je suis Bertrand, rédacteur pour le site vie-publique.fr, et je vais vous expliquer le rôle de l’Organisation mondiale du commerce (l’OMC).

Alors quelle est l’origine de l’OMC ?

Créée à l’issue du cycle de négociations commerciales Uruguay round, par l'accord de Marrakech conclu en 1994, l'Organisation mondiale du commerce entre en fonction l’année suivante en 1995. Mais ses principes 
fondamentaux sont bien plus anciens car l’OMC succède en fait à l'Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (le GATT), signé au lendemain de la Seconde Guerre mondiale.

Pourquoi le GATT est-il devenu l’OMC ?

Avec l’accord de Marrakech, l’objectif des 123 États participants au GATT était de lancer à la fois un processus 
d’ouverture des échanges et de faciliter le règlement des différends commerciaux dans un cadre multilatéral.

L'OMC diffère de son prédécesseur sur plusieurs points : 

  • D’abord il s’agit d’une organisation internationale (OI) de plein exercice, dotée d’une personnalité juridique ;
  • L’adhésion des membres se fait sur un socle commun de normes, bien différent de la participation "à la carte" que permettait le GATT ;
  • C’est aussi une procédure rigoureuse de règlement des différends commerciaux qui est mise en place là où le mécanisme prévu par le GATT n'était pas institutionnalisé ni clairement défini ;
  • Enfin de nouveaux secteurs sont couverts par l'OMC tels que l’agriculture, la propriété intellectuelle ou le textile.

L'OMC compte aujourd’hui 166 membres qui représentent 98 % du commerce mondial.

Quels sont les nouveaux défis de l’OMC ?

Ils sont multiples. On peut citer notamment :

- les divergences d’intérêts entre États qui conduisent à de nombreux différends dont le règlement est bloqué 
depuis plusieurs années ;

- les accords commerciaux régionaux qui contreviennent aux règles du commerce multilatéral fondé sur la 
non-discrimination entre partenaires commerciaux ; 

- ou encore le retour du protectionnisme qui marque une rupture totale avec la logique du libre-échange prônée par l’institution.  

Des négociations plurilatérales ont aussi été lancées pour adapter les règles de l’OMC aux nouveaux enjeux des échanges internationaux comme le développement du commerce numérique et pour réformer le système 
commercial multilatéral afin de garantir que ses règles bénéficient à tous les pays, en particulier les plus vulnérables.

 

 

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